detalhe
Para pensar a não substancialidade e a pertença essencial do Quatro [Geviert], Heidegger, tal como Fink , recorre ao conceito de jogo, que implica uma relação dinâmica entre os diferentes elementos: "A este jogo que nos faz aparecer, ao jogo de espelhos da simplicidade da terra e do céu, chamamos "o mundo". O mundo é na medida em que joga este jogo. Isto significa que o jogo do mundo não pode ser explicado por outra coisa, nem a sua essência pode ser apreendida a partir de outra coisa" [GA7 ]. Nesta concepção cosmológica e não metafísica do mundo como um ser último que não se funda em mais nada, é preciso sublinhar que o ser humano desempenha sempre um papel importante. Os mortais fazem parte do mundo e, como tal, são inseparáveis dos outros três elementos. Mas fazem-no como mortais, isto é, como seres capazes de morte, e não como simples viventes [GA7 ]. Isto leva-nos de volta à Carta sobre o Humanismo, onde Heidegger declara que a metafísica não pensa na humanitas do homem, mas apenas na sua animalitas, mesmo quando vê na razão ou no espírito a diferença específica do homem [GA9 ]. A metafísica define o homem como um ser entre outros e considera-o como um ente separado sem poder ver nele o que constitui a dignidade do seu ser, nomeadamente a sua participação no processo de desvelamento. Para pensar o Da-sein como ser com participação no advento do ser, temos que pensar o homem como ser para a morte, como mortal, e não como razão ou espírito, ou seja, como participante, através de uma parte de si, do eterno. Mas o que significa "ser capaz de morrer"? Heidegger explica, na sua conferência de 1951 intitulada "Construir, habitar, pensar": "Os mortais são homens. Chamam-se mortais porque podem morrer. Morrer significa ser capaz de morte enquanto morte. Só o homem morre, morre continuamente, enquanto habitar na terra, sob o céu, diante dos deuses" [GA7 ]. A existência humana como participação no mundo é uma morte contínua, não uma "vida". O que é que significa morrer continuamente, existir como mortal no sentido em que Heidegger já o entendia em Ser e Tempo [SZ :245: "A morte é um modo de ser que o Dasein assume logo que é"]]? Significa deixar a morte ter poder sobre nós, existir em relação ao fim do nosso Dasein, pensar o Dasein tendo como pano de fundo o fato de já não ser Dasein. Significa considerar a morte como a possibilidade extrema, isto é, como a única possibilidade absolutamente inatingível, e assim tomar consciência da nossa passividade em relação a nós próprios, daquilo que faz de nós outra coisa que não sujeitos. É esse, o fato de não sermos mestres do ser, que constitui a humanitas do homo humanus e, ao mesmo tempo, torna o mundo possível.
original
C’est seulement sur la base d’une telle conception « cosmologique » du monde qu’il est possible de comprendre que, dans sa conférence de 1950 sur « La chose », Heidegger puisse dire que les Quatre, terre et ciel, divins et mortels, sont le monder du monde, ce qui fait monde. Monde est ici le nom de l’unité d’un quadruple événement qui ne peut pas être expliqué par autre chose, ni fondé sur autre chose. Ce qui veut dire que les quatre « régions » du monde ne peuvent pas être considérées comme des réalités séparées explicables les unes par les autres ou fondées les unes sur les autres. Heidegger insiste sur le fait que chacune d’entre elles est le miroir des autres, retrouvant ainsi une idée hölderlinienne fortement exprimée [133] dans les grands poèmes de la dernière période, celle d’une réflection du ciel par la terre et les fleuves [1].
Afin de penser la non substantialité et l’appartenance essentielle des Quatre, Heidegger, comme Fink , fait appel au concept de jeu qui implique une relation dynamique entre les différents éléments : « Ce jeu qui fait paraître, le jeu de miroir de la simplicité de la terre et du ciel, nous le nommons “le monde”. Le monde est en tant qu’il joue ce jeu. Ceci veut dire : le jeu du monde ne peut être, ni expliqué par quelque chose d’autre, ni appréhendé dans son fond à partir de quelque chose d’autre. » [2] Dans cette conception cosmologique et non métaphysique du monde comme être ultime non fondé sur autre chose, il faut souligner que l’être humain joue toujours un rôle important. Les mortels sont parties prenantes du monder du monde, et en tant que tels, ils sont inséparables des trois autres éléments. Mais ils le sont en tant que mortels, c’est-à-dire en tant qu’êtres capables de la mort, et non en tant que simples vivants [3]. Cela nous ramène à la Lettre sur l’humanisme où Heidegger déclarait que la métaphysique ne pense pas l’humanitas de l’homme, mais seulement son animalitas, même lorsqu’elle voit dans la raison ou l’esprit la différence spécifique de l’homme [4]. La métaphysique définit l’homme comme un être parmi d’autres et le considère comme un étant séparé sans être capable de voir en lui ce qui fait la dignité de son être, à savoir sa participation au processus du dévoilement. Pour penser le Da-sein comme être ayant part à l’avènement de l’être, il faut penser l’homme comme être pour la mort, comme mortel, et non pas comme raison ou esprit, c’est-à-dire comme participant, par une part de lui-même, à l’éternel. Mais que veut dire « être capable de la mort » ? Heidegger s’en explique dans sa conférence de 1951 intitulée « Bâtir, habiter, penser » : « Les mortels sont les hommes. On les appelle mortels parce qu’ils peuvent mourir. Mourir veut dire : être capable de la mort en tant que la mort. Seul l’homme meurt, il meurt continuellement, aussi longtemps qu’il séjourne sur terre, sous le ciel, devant les divins. » [5] L’existence humaine en tant que participation au monder du monde est une mort continuelle et non pas une « vie ». Que veut dire mourir continuellement, exister comme mortel au sens où Heidegger l’entendait déjà [134] dans Être et temps [6] ? Cela veut dire laisser la mort avoir pouvoir sur nous, exister en se rapportant à la fin de notre Dasein, penser celui-ci sur le fond d’un ne plus-être Dasein. Cela veut dire considérer la mort comme la possibilité extrême, c’est-à-dire comme seule possibilité absolument irréalisable, et prendre ainsi conscience de notre passivité à l’égard de nous-mêmes, de ce qui fait de nous autre chose que des sujets. C’est cela, le fait que nous ne sommes pas les maîtres de l’être, qui constitue l’humanitas de l’homo humanus et qui rend en même temps le monder du monde possible.
Mais de même que, loin d’être déjà véritablement des humains, il faut au contraire aux hommes de la métaphysique, aux êtres vivants rationnels, devenir des mortels [7], de même le monde n’est pas déjà donné mais encore à venir : « Le monde est le jeu de miroir encore caché des Quatre : terre et ciel, mortels et divins », déclare Heidegger en 1949 dans sa conférence de Brême intitulé Die Gefahr (Le danger [8]). Que le monde en tant que l’unité des Quatre se refuse encore, qu’il se retire encore dans la dissimulation, cela tient au destin même de la pensée occidentale qui a, depuis Parménide et jusqu’à Heidegger lui-même, toujours subordonné la pensée du monde à celle de l’être : « Le monde est la vérité du déploiement de l’être. Nous caractérisons ainsi le monde par rapport à l’être. Le monde est, représenté ainsi, subordonné à l’être, alors qu’en vérité l’être ne se déploie qu’à partir du monder caché du monde. Le monde n’est pas un mode de l’être, il ne lui est pas assujetti. » [9] L’événement du monde au sens du Geviert ne peut donc signifier en lui-même que la disparition de l’être, et avec lui du néant, dans le monde : « Lorsque le monde advient en propre pour la première fois, l’être s’évanouit, mais avec lui aussi le néant, dans le monder. » [10] Il n’est donc guère étonnant que dans le texte qu’il dédie en 1956 à Jünger , Heidegger, après avoir apposé une biffure en croix sur le mot « être », afin de se préserver de « cette habitude presque inextirpable de représenter l’être comme un en-face qui se tient en soi et qui ensuite seulement advient parfois à l’homme », ajoute que ce signe de la biffure en croix n’a pas seulement un sens négatif, mais qu’il « indique les [135] quatre du Cadran et leur assemblement dans le Lieu où se croise cette croix » [11].
De ce lieu où la représentation métaphysique de l’être comme grand objet fait l’épreuve de son caractère illusoire, du monde, nous ne pouvons approcher que si nous-mêmes ne nous posons plus en sujets. Ce à quoi il serait alors possible de s’ouvrir, ce ne sont plus aux « objets », mais à l’inapparence et à la proximité des choses. Car c’est en elles qu’advient le monde [12]. L’événement du monde ne peut en effet avoir lieu qu’à partir du moment où ce qui est n’apparaît plus sous la figure de l’autosuffisance de ce qui se tient en vis-à-vis (Gegenstand) et en soi (Selbststand [13]) et où ce n’est plus l’ab-solu, mais au contraire l’ajointement (Fuge [14]) qui est le véritable sens de l’être. De ces mortels habitant le monde que les hommes d’aujourd’hui doivent devenir, on pourrait dire alors qu’ils sont « au sens rigoureux du mot, ceux qui sont pourvus de choses [die Be-dingten] », c’est-à-dire les conditionnés, ceux qui « ont laissé derrière eux toute prétention à l’absolu ».