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Fédier (2010:169-171) – Sorge

sábado 16 de dezembro de 2023, por Cardoso de Castro

destaque

I. "O ser do Dasein revela-se como preocupação".

Não se trata de preocupação no sentido banal do termo, daquilo que aparece sempre no plural como preocupações, mas de uma estrutura existencial em que é o próprio ser do ser humano (como Dasein — ser fora de si = ser [transitivamente] o "aí") que se revela. Assim, o ser humano é fundamentalmente preocupação.

Se traduzirmos a palavra não por preocupação mas por cuidado, evitamos felizmente o entendimento banal de Heidegger. Se a ek-sistência é fundamentalmente cuidado, de que ela é cuidado? Aqui devemos recordar os dois níveis que Heidegger distingue por todo o lado, o nível próprio e o nível impróprio.

a) Impropriamente, o Dasein sob a forma banal de "a-gente" [das Man], não tem exatamente cuidado, mas necessidade. Assim, cada indivíduo tem necessidade dos outros. E precisa também do ente.

b) Mas propriamente, o cuidado ele mesmo, o cuidado que se trata de tomar, o cuidado que dá ritmo à ek-sistência, é o cuidado do ser (cuidado do ser humano e cuidado do ser do que não é humano).

Original

Die Sorge se traduit par «le souci», le soin (cura, en latin)

I. «L’être du Dasein se dévoile comme souci. »

Il ne s’agit pas du souci au sens banal du terme, de ce qui apparaît toujours au pluriel comme des soucis, mais d’une structure existentiale dans laquelle c’est l’être même de l’être humain (comme Dasein — être hors de soi = être [transitivement] le «là») qui se révèle. Ainsi l’être humain est-il fondamentalement souci.

Si l’on traduit le mot non pas par souci mais par soin, on fait heureusement l’économie de l’entente banale de Heidegger. Si l’ek-sistence est fondamentalement soin, de quoi est-elle soin ? Il faut ici rappeler les deux niveaux que distingue partout Heidegger, le niveau propre et le niveau impropre.

a) Improprement, le Dasein sous la forme banale du « on », n’a plus exactement soin, mais besoin. Ainsi chaque individu a besoin des autres. Et il a tout aussi besoin de l’étant.

b) Mais proprement, le soin lui-même, le soin qu’il [169] s’agit de prendre, le soin qui rythme l’ek-sistence, est le soin de l’être (soin de l’être humain et soin de l’être de ce qui n’est pas humain).

II. «La temporellité est le sens du souci.»

« Sens » doit être compris comme dans la citation de Paul Claudel que Merleau-Ponty   met en tête de son chapitre sur «la temporalité» (Phénoménologie de la perception) : «Le temps est le sens de la vie (sens : comme on dit le sens d’un cours d’eau, le sens d’une phrase, le sens d’une étoffe, le sens de l’odorat)» [c’est-à-dire dans tous les sens de «sens»]. Sens veut dire ici : cela à partir de quoi le souci prend le sens de souci. Or le souci (ou le soin) est évidemment, à la racine même, temporellité. Pourquoi? Heidegger l’explique dans la troisième proposition.

III. « Souci veut dire : être-en-avant de soi, dans un être-déjà-au-monde comme être auprès de l’étant qui fait rencontre à l’intérieur du monde. »

Dans cette phrase, est développée la triple articulation de la temporellité propre. Être-en-souci implique que nous prenions soin de nos possibilités les plus propres. En ce sens, le souci est ouvert à l’avenir — mieux, c’est : ouvrir la possibilité (ce qui est le rapport propre à l’avenir).

Mais cette ouverture sur le possible n’est elle-même possible qu’à l’intérieur d’une reprise, ou répétition de ce qui a déjà été. Cette répétition est le rapport propre au passé. Dans le rapport propre au passé, le passé n’est jamais passé.

Cette situation, tout à fait typique de la temporellité dans laquelle l’être humain se tempore par rapport à l’avenir et au passé, instaure la dimension propre du présent comme [170] «instant» (l’«aoûtement» de René Char, à comprendre comme acmé).

Le présent, compris comme aoûtement, nous fait comprendre en quel sens il n’y a présent que dans le mûrissement simultané d’un projet à venir, grâce à la reprise de ce qui a été. Tout projet qui ne tient pas compte de ce que nous nommons en français des données (autrement dit : de ce que le passé nous donne) est un projet chimérique, et par conséquent impropre. Nous connaissons tous ce type de velléités : elles tissent notre existence quotidienne.


Ver online : François Fédier


[FÉDIER, François. Le temps et le monde: de Heidegger à Aristote. Paris: Pocket, 2010]