Heidegger, fenomenologia, hermenêutica, existência

Dasein descerra sua estrutura fundamental, ser-em-o-mundo, como uma clareira do AÍ, EM QUE coisas e outros comparecem, COM QUE são compreendidos, DE QUE são constituidos.

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Marion (1989:262-264) – a angústia e o nada

sábado 20 de janeiro de 2024

destaque

O fenômeno fundamental foi assim adquirido: como tonalidade fundamental, "a angústia manifesta o Nada"; portanto, no momento da crise de angústia, "o próprio Nada — enquanto tal — estava aí". Doravante, "a questão do Nada permanece efetivamente construída (gestellt bleibt)". Mas o que manifesta o Nada, que está aí, no ser-aí?

original

Du moins un point paraît acquis : l’ennui donne accès à l’étant dans son ensemble, parce qu’il réduit tout étant à sa pure et simple permanence indifférenciée. Pourtant, une fois l’étant en totalité devenu phénomène, l’essentiel reste encore à conquérir : la mise en scène phénoménologique du Rien (en vue du « phénomène d’être »). Le « phénomène fondamental » demande une nouvelle disposition, une « tonalité (affective) fondamentale (Grundstimmung  ) »; au-delà de l’ennui, qui montre la totalité de l’étant, l’angoisse dispose à son Rien  [1] . L’ennui ne reçoit donc qu’un rôle provisoire et de transition, sur une route qui mène de l’étant à son Rien par l’intermédiaire de sa totalisation. D’où vient la supériorité de l’angoisse ? Comment reprend-elle pourtant l’acquis de l’ennui ? En fait, elle en répète l’indifférenciation, mais en l’inversant. Comme l’ennui, l’angoisse ne se fixe pas sur tel ou tel étant; la crainte au contraire craint toujours un étant, qu’elle connaît comme menaçant, qu’elle peut identifier et sait éventuellement combattre face à face. L’angoisse ignore qui ou quoi menace; elle ne sait pas même avec certitude si une menace effectivement menace, ou s’il ne s’agit que d’imagination  ; mais, précisément parce que rien n’est sûrement menaçant, tout peut le devenir, donc l’est; aucun étant ne se distingue comme menaçant, donc la menace peut venir de partout. L’indétermination de ce devant quoi je m’angoisse ne marque pas un défaut d’information  , mais bien la définition propre de l’angoisse : l’angoisse m’assaille non pas malgré son indétermination, mais bien à cause d’elle. Ce qui m’angoisse n’est pas un étant défini, mais tout étant, donc tout l’étant dans la mesure même où il demeure indistinct — comme dans l’ennui. Mais ici tout s’inverse par rapport à l’ennui. Au lieu que dans l’ennui, même profond, l’étant en totalité s’enfonce dans l’indifférence et donc s’éloigne, s’évanouisse comme dans un brouillard d’inintérêt et me laisse absolument libre à moi-même, dans l’angoisse l’étant dans son ensemble ne glisse et ne recule dans l’indifférenciation que pour me menacer par cette indifférenciation même : l’étant en totalité se retourne pour m’étreindre, me serrer la gorge — littéralement m’angoisser — dans le mouvement précis de son retrait, dans l’indétermination qui fait toute la menace. Loin que, comme dans l’ennui, je demeure l’intact spectateur du naufrage ontique, ici, angoissé, j’endure le siège de l’indétermination même de l’étant. L’indétermination, désormais, ne fait pas tant disparaître l’étant, qu’elle ne me fait disparaître aussi avec lui : en effet, l’étant ne me menace qu’autant qu’il disparaît dans l’indétermination elle-même. Je m’angoisse donc de nul étant, mais du mouvement même de recul des étants dans l’indifférenciation. Je m’angoisse du retrait, de l’absence, du Rien de l’étant. L’angoisse n’a certes peur de rien, mais c’est parce qu’elle s’angoisse du Rien. Et quand cesse la « crise d’angoisse », j’ai raison de dire que « ce n’était rien », puisque, de fait, c’était le Rien en personne.

Le phénomène fondamental a donc été acquis : comme tonalité fondamentale « l’angoisse manifeste le Rien »; donc, lors de la crise d’angoisse, « le Rien lui-même — comme tel — était là »  [2] . Désormais « la question sur le Rien reste effectivement construite (gestellt bleibt) »  [3]  Mais que manifeste le Rien, qui est là, à l’être-là ?

MARION  , Jean-Luc. Réduction et donation: Recherches sur Husserl  , Heidegger et la phénoménologie. Paris: PUF, 1989.


Ver online : Jean-Luc Marion


[1Sein und Zeit, § 39, p. 182, 31. Voir aussi « Grundbefindlichkeit des Daseins », § 29, p. 140, 6; et § 39, p. 182, 22 et 184, 2; § 40, p. 184, 9 et 188, 24; 189, 30; 190, 20; § 50, p. 251, 21; § 53, p. 266, 7; § 62, p. 310, 17; § 68, p. 342, 32, etc. De même Kant und das Problem der Metaphysik se propose bien d’élaborer — à la même époque — « die “Angst” als eine “entscheidende Grundbefindlichkeit” », puisque cette Grundbefindlichkeit est censée « … vor das Nichts [stellen] » (§ 43, Bonn, 1929, p. 228). — La conférence de 1929 parle de la « Grundstimmung der Angst » (GA, 9, p. 111). On entendra Grundstimmung (tonalité affective fondamentale), d’après cette remarque de 1934/1935 : « Par tonalité fondamentale nous voulons dire non quelque tonalité sentimentale qui flotte et disparaît, et accompagne seulement le dire, mais la tonalité fondamentale (Grundstimmung) ouvre le monde, tel qu’il reçoit dans le dire poétique la marque de l’être (Seyn) » (Hölderlins Hymnen « Germanien » und « Der Rhein », GA, 39, p. 79). C’est donc doublement que le monde s’ouvre dans l’angoisse : parce qu’il s’agit de l’angoisse, mais aussi parce qu’il s’agit d’une tonalité fondamentale.

[2Was ist Metaphysik ?, GA, 9, p. 112, tr. fr. p. 51.

[3Was ist Metaphysik ?, p. 113, tr. fr. p. 52. Sur cette construction de la question, voir supra, chap. II, § 6, p. 104 sq.