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Loreau (1989:266-269) – conceito de fenômeno (Phänomen)

quinta-feira 30 de novembro de 2023, por Cardoso de Castro

destaque

O ser é isto que é manifesto enquanto não se manifesta [268] como fenômeno. No entanto, o que a fenomenologia trata não é do ser em si, mas do fenômeno do ser. No fundo, tal fenômeno tem como condição o fenômeno empírico: ele é graças ao e no ente, mas não é o ente. Como fenômeno do ser, ele é sempre o fenômeno do ser. Enquanto fenômeno do ser, ele é sempre o fenômeno do Outro-que-o-ente. Ora, o que torna possível o acesso ao fenômeno do ser, e portanto ao ser, deve ser integrado na essência do ser. Assim, desde o início, entra de pronto em sua essência o Outro-que-o-ente, logo o ente em relação ao qual ele é Outro. É apenas através do ente - o fenômeno vulgar - que o ser (ou o a priori   que é ao mesmo tempo manifesto e oculto) pode vir à manifestação expressa. Enquanto fenômeno, o ser é visado desde o início a partir do ente e, portanto, a partir da antecipação do que torna o ente visível como tal: a Forma do Fenômeno. O ser como fenômeno é visado a partir da Forma do Fenômeno. Este fato terá consequências essenciais e inexpugnáveis para a abordagem, uma vez que a fenomenologia como método, para conduzir a qualquer coisa, toma necessariamente o caminho do fenômeno, que é o seu ponto de partida e o seu fundamento.

original

Le phénomène (Phänomen  ) est φαινόμενον   : ce qui se montre en lui-même et qui de soi vient à la clarté (φως). Il est donc aussitôt compris au sens positif et original de Sichzeigen   (SZ  :30) : il signifie à la fois l’acte de se montrer et ce qui, dans cet acte, se montre et se manifeste en soi-même ; comme tel, il ne montre ni n’indique rien d’autre qui serait derrière lui. Il se montre lui-même, ne montre que lui-même et se montre pleinement lui-même — pure position du Manifeste.

[267] Pris en ce sens, le phénomène peut désigner deux choses de façon adéquate à son concept. En premier lieu, il s’applique à ce qui tombe sous ce que Kant   nomme l’intuition empirique. Ce qu’il montre est alors un étant : c’est le phénomène en son acception vulgaire. Mais il désigne aussi ce qui de soi-même s’est toujours déjà montré (dans les phénomènes empiriques) sans pour autant s’être thématiquement montré (SZ:31). En tant qu’il s’est toujours déjà montré, ce type de phénomène peut être amené thématiquement au Manifeste. C’est le cas des formes de l’intuition chez Kant — l’espace, le temps. Le phénomène désigne alors un a priori implicite qui s’est positivement montré et que la pensée a pour tâche de porter à la manifestation expresse, il fait voir non plus un étant mais un caractère d’être de l’étant. Le phénomène pris en ce second sens est proprement ce que la phénoménologie vise sous le concept de phénomène. De la sorte, le concept s’applique à ce qui, bien que manifeste, demande à être expressément mis sous les yeux par explicitation.

Dans l’ontologie  , la chose même est l’être. C’est lui qui demande à être montré au sens phénoménologique du terme. Le phénomène est phénomène de l’être, en tant que l’être, d’une part, se manifeste toujours déjà en soi-même et, de l’autre, n’est pas un étant. Par ailleurs, les phénomènes de la phénoménologie sont ceux qui, tout en se montrant en soi, ont besoin d’être amenés au manifeste. Mais comme le propre de ce qui se montre alors en soi est de rester non-aperçu, il ne peut se montrer que dans ce qui se voit, à savoir dans le phénomène au sens vulgaire. Autrement dit, ce qui de prime abord est pleinement manifeste et permet dans un second temps de faire passer au manifeste les phénomènes de la phénoménologie est toujours le phénomène empirique ; pour la phénoménologie, le phénomène premier est toujours le phénomène de l’étant. Or, dans ce phénomène, qu’est-ce qui, bien qu’étant manifeste, demande à être manifesté ? Pas l’étant même. Reste ce qui permet au phénomène (vulgaire) de se montrer; une fois réduit l’étant, reste le « se-montrer » lui-même : le phénomène du phénomène. Le phénomène de la phénoménologie est donc le phénomène du phénomène — le pur et simple mouvement de la manifestation.

L’être est ce qui est manifeste tout en n’étant pas manifeste [268] comme phénomène. Cependant ce à quoi la phénoménologie a affaire n’est pas l’être lui-même, mais bien le phénomène de l’être. Par essence, un tel phénomène a pour condition le phénomène empirique : il est grâce à et dans l’étant mais n’y est pas l’étant. En tant que phénomène de l’être, il est toujours le phénomène de l’Autre-que-l’étant. Or, ce qui rend possible l’accès au phénomène de l’être et donc à l’être, doit être intégré dans l’essence de l’être. Dès lors, entre d’emblée dans son essence l’Autre-que-l’étant, donc l’étant par rapport auquel il est Autre. Ce n’est que par l’étant — le phénomène vulgaire — que l’être (ou l’a priori à la fois manifeste et caché) peut venir à la manifestation expresse. En tant que phénomène, l’être est d’emblée visé à partir de l’étant, donc de l’anticipation de ce qui rend l’étant visible comme tel : la Forme du Phénomène. L’être comme phénomène est visé à partir de la Forme du Phénomène. Ce fait aura, sur la démarche, des conséquences essentielles et inexpulsables puisque la phénoménologie comme méthode, pour mener à quoi que ce soit, emprunte nécessairement la voie du phénomène, lequel est son point de départ et son assise.

De là se dégage une corrélation qu’il suffit pour l’instant de constater. Le phénomène que vise en propre la phénoménologie n’est pas thématiquement offert ; il est inséparable de la notion d’implicite. D’autre part, il est étroitement lié au phénomène vulgaire. Il existe, par conséquent, de fait, à l’intérieur du phénomène de l’être, qui est la visée primordiale de la phénoménologie, une connexion énigmatique de la notion d’implicite, d’un côté, et du phénomène de l’étant, de l’autre. Par suite, il faut s’attendre que l’explicitation du sens de l’être soit et demeure intrinsèquement liée au phénomène empirique — à l’étant. C’est une constatation dont la portée ne se révélera que plus tard.

L’être se montre et est compris : il se donne en une vue (Einsicht, SZ:31) inexplicite. L’objet est de l’amener à se montrer expressément. Mais que veut dire en ce cas « se montrer » (Sichzeigen) à propos de ce qui n’a ni concept ni apparence mais est simplement aperçu, vaguement « compris » ? La question est de savoir comment aborder un tel « objet ». Car il ne suffit pas de s’en tenir au pur et simple phénomène; encore faut-il l’expliciter, par suite pouvoir le faire. Comment y arriver?

[269] Comment amener au phénomène ce qui s’est déjà montré en lui-même et est donc toujours déjà phénomène ? Et comment ce phénomène pourrait-il venir à être distingué du phénomène ordinaire de l’étant, de même qu’à être maintenu dans cette différence ? Certainement pas par le voir pur et simple, puisque celui-ci se limite à voir le phénomène (de l’être) et qu’il le voit depuis toujours. Reste qu’une telle possibilité d’instaurer, au sein   du voir, la différence entre le phénomène de l’être et celui de l’étant repose sur l’autre composant du mot « phénoménologie », à savoir le logos  . Reste qu’il appartienne à sa mise en action de faire venir au phénomène — et par là même à la question — l’être vaguement compris, inapparent et inconçu.


Ver online : Max Loreau


LOREAU, M. La genèse du phénomène. Paris: Editions de Minuit, 1989.