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Fédier (2010:153-156) – tempo é a priori sem ser subjetivo

sábado 16 de dezembro de 2023, por Cardoso de Castro

destaque

"No que diz respeito ao a priori  , está implícito [entenda-se bem: implícito em todo o pensamento moderno desde Descartes  ] um princípio: o que é a priori pertence à subjetividade." [GA21  :289]

Ora, Heidegger questiona este princípio. Ele pensa: o a priori, aquilo que é anterior a toda a experiência, independente dela, e a condição de possibilidade da experiência, porque é que há-de estar no sujeito, no "eu penso", no nosso pensamento enquanto sujeitos conscientes? A fenomenologia, a começar pela de Husserl  , mostrou como toda a representação, embora tenha o momento essencial de retomada que é a própria consciência, não é menos dependente do seu objeto. Isto leva-nos a pensar o sujeito como intencional. O que é a intencionalidade é ilustrado pelo modo como a representação vai produzir o objeto.

Heidegger dá um exemplo:

"’Subjetivo’ pode ser em todo o caso — no sentido da pertença exclusiva ao Dasein   de um fato qualquer que seja — a descoberta do espaço puramente métrico [i.e. mensurável], a partir do espaço ambiente, e além disso a elaboração do espaço métrico assim descoberto em geometria."

Se lermos corretamente esta frase (ibid., 290), vemos diante dos nossos olhos algo como um espaço de medidas, proveniente do espaço ambiente, mas que não deriva dele, pois, pelo contrário, é o a priori do espaço ambiente. E o espaço geométrico é o a priori do espaço métrico.

Se virmos o fenômeno, torna-se claro que "subjetivo" adquiriu um outro significado. Este significado é dito "na pertença exclusiva de cada postura ao Dasein". Postura é Verhaltung   — comportamento seria mais exato, isto é, portar-se juntamente com. Cada ser humano, em cada momento, está numa relação múltipla com o que o rodeia. Estamos numa relação de percepção, por exemplo, mas também numa relação de memória, numa relação de tédio, numa relação de conhecimento… Este ser-em-relação está ele próprio em relação com o Dasein. Ser-em-relação é ek-sistir, estar fora de si mesmo. Acima de tudo, esta locução não deve ser entendida num sentido extático.

Original

La différence entre Kant   et Aristote   (nous l’avons déjà mentionnée plus haut), c’est que Kant, dans son analyse du temps, et avec elle, explique pourquoi et comment le temps est à la fois dans l’esprit et dans la nature.

«Esprit», c’est le nom nouveau de «l’âme» d’Aristote. L’âme nouvelle, c’est le cogito  . Le cogito est le point ultime de certitude, c’est-à-dire de vérité. Heidegger, dans un autre livre, Logik   (tome 21), sous-titré : «La question de la vérité », remarque et souligne page 289 :

« En ce qui concerne l’a priori, il y a sous-entendu [entendons bien : sous-entendu dans toute la pensée moderne depuis Descartes] un principe : ce qui est a priori appartient à la subjectivité. » [GA21:289]

Or, ce principe, Heidegger le met en doute. Il pense : l’a priori, ce qui est antérieur à toute expérience, indépendante d’elle, et condition de possibilité de l’expérience, pourquoi diable faudrait-il qu’il soit dans le sujet, dans le «je pense», dans notre pensée à nous sujets qui sommes conscients ? La phénoménologie, à commencer par celle de Husserl, a montré comment toute représentation, si elle a bien le moment essentiel de reprise qu’est la conscience [153] elle-même, a non moins un rapport de dépendance à son objet. Cela amène à penser le sujet comme intentionnel. Ce que c’est que l’intentionnalité s’illustre dans la façon dont la représentation va produire l’objet.

Heidegger donne un exemple :

« ‘Subjectif’ peut l’être en tout cas — au sens de l’appartenance exclusive au Dasein d’une tenue qu’elle qu’elle soit — la découverte de l’espace purement métrique , à partir de l’espace ambiant, et en plus l’élaboration de l’espace métrique ainsi découvert en géométrie. »

Si nous lisons bien cette phrase (ibid., 290), nous voyons naître sous nos yeux quelque chose comme un espace de mesures, provenant de l’espace ambiant, mais qui n’en découle pas, puisque au contraire, il est l’a priori de l’espace ambiant. Et l’espace géométrique est l’a priori de l’espace métrique.

Si nous voyons le phénomène, alors il devient clair que «subjectif» a pris un autre sens. Ce sens est dit «en l’appartenance exclusive de chaque tenue au Dasein». Tenue, c’est Verhaltung — comportement serait plus fidèle, c’est-à-dire portement ensemble-avec. Chaque homme, à chaque instant, se tient en rapport multiplement à ce qui l’entoure. Nous sommes en rapport de perception, par exemple, mais aussi en rapport de souvenir, en rapport d’ennui, en rapport de savoir… Cet être-en-rapport est lui-même en rapport au Dasein. Être-en-rapport c’est ek-sister, être hors de soi. Ne surtout pas entendre cette locution dans un sens extatique. Exemple (Corneille, Imitation de Jésus-Christ) :

Que dans ces transports extatiques
Où seul tu me feras la loi, [154]
Tout hors de moi, mais tout en toi,
Je te chante mille cantiques.

Ek-sister, au sens de Heidegger, c’est simplement être de telle sorte que cet être aille jusqu’à l’être de chaque chose. Ainsi s’amplifiant, l’ek-sistence va bien jusqu’à l’être — reconnu comme l’autre par rapport à la pensée, l’autre qui est autre que la pensée, et pourtant incitation, source — a priori de la pensée.

Le Dasein — être-le-là humain pour que se manifeste l’être de toutes choses, pour que soit manifestée l’ouvertude même (ἀλήθεια  ) au cœur de laquelle l’être de quoi que ce soit fasse apparition —, le Dasein ne doit pouvoir être que si cette ouvertude se manifeste d’elle-même, phénomène que le Dasein reconnaît comme a priori.

Or, le sens de cet a priori, c’est une détermination temporelle : avant.

Avant l’expérience, cela ne peut être tiré de l’expérience. Mais quel est le sens d’avant ? Par rapport à ce qui était avant, la distance est non seulement infranchissable, mais croissante. Par rapport à ce qui sera après, la distance est franchissable, puisqu’elle diminue jusqu’à disparaître. Le présent est le moment où la distance bascule de franchissable-diminuante à infranchissable-croissante. Cette description grossière fait cependant paraître le phénomène du temps.

Et le temps est a priori, sans être subjectif. Voilà une des structures les plus étonnantes que Heidegger a mises au jour. Celle qu’il décrit dans un autre des volumes de l’édition intégrale (tome 33 : Aristote, Métaphysique Θ I-III, p. 202) :

« L’indépendance des choses par rapport à nous autres hommes n’est pas touchée par le fait que cette indépendance comme telle n’est possible que si des hommes existent. » [155]

Que les choses soient indépendantes de nous, c’est dans l’histoire de la métaphysique la doctrine du matérialisme, autrefois doctrine de la Création divine (chez saint Thomas, par exemple). Ici Heidegger métamorphose entièrement le problème : au lieu de considérer les choses et les hommes, comme autant de choses, il faut considérer les hommes comme quelque chose d’absolument différent d’une chose. Même absolument différent d’un animal, en ceci qu’un être humain ek-siste, c’est-à-dire est temporel, c’est-à-dire perçoit le temps comme quelque chose de réel, parce que le temps est condition de possibilité du réel. Le temps n’est pas plus réel que le réel. Il n’est tout simplement pas du tout du même ordre que le réel. Il n’y a de temps que pour le Dasein. Dans le tome 20 (Prolégomènes à l’histoire du concept de temps, semestre d’été 1925), p. 442, nous lisons :

« Non pas le temps est [entendons : non pas le temps est comme sont les choses], mais : le Dasein tempore en tant que temps son être. »


Ver online : François Fédier


[FÉDIER, François. Le temps et le monde: de Heidegger à Aristote. Paris: Pocket, 2010]