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Dastur (1998:122-123) – "mundo" logo após Ser e Tempo

segunda-feira 11 de dezembro de 2023, por Cardoso de Castro

detalhe

Em Sein und Zeit  , o mundo é, de facto, descoberto pela primeira vez apenas como Umwelt   quotidiano e no contexto de uma atitude específica em relação ao ente intramundano, a da preocupação (Besorgen  ), na qual Heidegger vê o conceito ontológico a partir do qual tanto o comportamento teórico como o prático podem ser compreendidos. É, no entanto, este último que constitui o modo primário de acesso ao ente intramundano, que não é, portanto, encontrado como algo meramente presente (bloss vorhanden  ), mas como uma ferramenta manejável (zuhandenes Zeug  ) que faz parte de um [121] conjunto de ferramentas do qual não pode ser separado. O que é assim primordialmente descoberto nunca é um ente isolado, mas um conjunto de ferramentas, cada uma das quais remete para todas as outras. É o conjunto destas estruturas de referência, das quais o Dasein   constitui a finalidade última, que forma a estrutura do mundo, nem objetivo nem subjetivo. O mundo não pode ser descoberto como um objeto, nem ser o resultado de uma projeção do sujeito, mas apenas constituir a significatividade [1] de uma existência que só se pode compreender a si mesma a partir da relação que mantém necessariamente com o seu Umwelt. É nesta transcendência do Dasein, que está sempre já num mundo a partir do qual só ele se pode compreender a si mesmo, que se funda toda a intencionalidade e todo a visada do ente intramundano.

original

Dans Sein   und Zeit  , un des objectifs premiers de Heidegger a été de prévenir la mésinterprétation du phénomène du monde qui a caractérisé dès son origine le monde occidental. Heidegger n’hésite pas en effet à déclarer alors que le phénomène du monde a été manqué (übersprungen) au début de la tradition   philosophique « explicitement avec Parménide   » [2], ce qui a donc conduit à comprendre le monde comme la simple somme des choses existantes. Dans Sein und Zeit, le monde n’est en réalité d’abord découvert que comme Umwelt quotidien et dans le cadre d’une attitude déterminée par rapport à l’étant intramondain, celle de la préoccupation (Besorgen), dans laquelle Heidegger voit le concept ontologique à partir duquel on peut comprendre aussi bien le comportement théorique que le comportement pratique. C’est pourtant ce dernier qui constitue le mode d’accès premier à l’étant intramondain qui n’est donc pas rencontré comme une chose simplement présente (bloss vorhanden), mais en tant qu’outil maniable (zuhandenes Zeug) faisant partie d’un [121] ensemble d’outils dont il n’est pas séparable. Ce qui est ainsi primordialement découvert n’est donc jamais un étant isolé, mais un ensemble d’outils dont chacun renvoie à tous les autres. C’est l’ensemble de ces structures de renvoi dont le Dasein constitue la finalité dernière qui forme la structure ni objective ni subjective du monde. Ce dernier ne peut en effet ni être découvert comme un objet, ni être le résultat d’une projection du sujet, mais seulement constituer la significativité [3] d’une existence qui ne peut se comprendre elle-même qu’à partir du rapport qu’elle entretient nécessairement avec son Umwelt. C’est sur cette transcendance du Dasein qui est toujours déjà dans un monde à partir duquel seul il peut se comprendre lui-même que se fonde toute intentionnalité et toute visée de l’étant intramondain.

Par sa problématique de la Lebenswelt  , Husserl   visait lui aussi à rendre compte du commerce quotidien que nous entretenons avec les choses, mais il le faisait encore avec des moyens théoriques, ce qui explique que, malgré la conception concrète qu’il se faisait de la perception, il ait continué à donner unilatéralement un primat à l’appréhension de la chose isolée. La perception ne reçoit en effet chez lui un rôle directeur que parce qu’elle livre la pure présence « sensible » de la chose, seule susceptible d’être prise en vue par le regard théorique, alors qu’elle échappe au comportement pratique qui n’est attentif qu’à la maniabilité de l’étant. Cela n’implique pas pour autant que la praxis   soit aveugle : elle possède au contraire une « vue » qui lui est propre et qui se distingue radicalement du savoir théorique qui n’est que la saisie thématique d’une présence donnée, d’une Vorhandenheit. Heidegger nomme une telle vue Umsicht  , circonspection [4], et entend par là la compréhension non thématique de la structure de renvoi qui définit la maniabilité, au sens où c’est précisément le propre de l’étant maniable que de s’effacer pour ainsi dire derrière sa maniabilité. Il y a cependant des modes de la préoccupation quotidienne dans lesquels l’étant maniable s’impose à l’attention, lorsque par exemple l’outil s’avère inutilisable, qu’il est manquant ou qu’il dérange. Ces modes déficients de la préoccupation quotidienne mettent en évidence la condition de possibilité d’un regard théorique, à savoir la dé-mondanéisation de l’étant maniable par laquelle il peut apparaître comme une chose simplement donnée, ein Nur-Vorhandenes. Car dans la perspective heideggérienne, on ne peut définir l’attitude théorique que d’un point de vue génétique à partir du commerce premier que le Dasein entretient avec le [122] monde dans la préoccupation quotidienne et on ne peut voir dans la connaissance qu’un mode du Dasein fondé sur l’être dans le monde. Il faut donc, pour passer de la Zuhandenheit, de la maniabilité, à la Vorhandenheit, à la pure pré-sence, une mutation de la compréhension de l’être de l’étant qui équivaut à une dé-mondanéisation, plus précisément à une levée des bornes de l’Umwelt (Entschränkung   der Umwelt [5]) par laquelle c’est le tout de l’étant pré-sent qui devient alors thème.

Il n’y a donc pas de possibilité de faire l’expérience du monde dans l’existence quotidienne. Le monde en tant que tel ne peut être découvert que dans ce mode fondamental de la disposition qu’est l’angoisse et sous la forme de ce qui n’est précisément pas un étant maniable et se donne sous l’aspect du néant [6]. Dans Sein und Zeit, nous ne trouvons donc qu’une analyse du monde humain : rien n’est dit sur la nature en tant que telle. C’est d’ailleurs ce que reconnaît Heidegger lui-même en 1929 dans une note de De l’essence du fondement, dans laquelle il souligne que l’analyse de l’Umwelt dans Sein und Zeit, est seulement une première détermination du phénomène du monde et n’a qu’une valeur préparatoire [7]. Le problème du monde devient à cette époque un thème capital, comme le montre le cours que Heidegger consacre en 1929-1930 aux Concepts fondamentaux de la métaphysique : Monde, finitude, solitude qui développe la thèse de l’homme comme configurateur du monde (weltbildend). Mais cette thèse de la Weltbildung par l’homme peut au premier abord être prise pour la thèse la plus subjectiviste qui soit, au sens où il semble que le monde ne soit plus alors que le produit de l’activité configuratrice de l’homme. Ce fut en effet là l’opinion   de Fink  , qui assista à ce cours, et auquel Heidegger, apprenant sa mort en 1975, dédia par avance ce volume 29-30 de l’édition complète de ses œuvres (Gesamte Ausgabe) qui ne devait paraître qu’en 1989. Fink a repris en effet à son compte, et de manière originale, la tâche que Heidegger s’était assigné en 1929, à savoir celle d’une exposition du problème du monde, dans le cadre d’un cours qu’il fit à deux reprises, en 1949, puis en 1966, sous le même titre de « Monde et finitude », cours qui ne fut lui aussi publié que de manière posthume en 1990. Dans ce cours, Fink, rappelant que Heidegger tente dans Vom Wesen   des Grundes d’élucider la projection transcendantale du monde [123] en montrant qu’elle trouve son origine dans la liberté finie de l’homme, déclare que « pour le problème du monde, cet essai de Heidegger constitue le sommet d’une conception subjectiviste du monde » [8].


Ver online : Françoise Dastur


DASTUR, Françoise. "Le concept de monde chez Heidegger après Être et temps", in Natalie Depraz (ed.). Monde(s). Fontenay-aux-Roses: Éd. Alter, 1998.


[1SZ, § 18, p. 83 ss

[2M. Heidegger, Sein und Zeit, Tübingen, Niemeyer, 1963, p. 100 (noté par la suite SZ).

[3SZ, § 18, p. 83 sq.

[4Ibid., p. 69.

[5Ibid., p. 362.

[6SuZ, p. 187 ; cf. également p. 276 et 343, où l’on trouve l’expression « le rien du monde » (das Nichts der Welt).

[7Vom Wesen des Grundes, Frankfurt am Main, Klostermann, 1955, p. 36, note 55 ; trad. in Questions I, op. eit., p. 130.

[8Eugen Fink, Welt und Endlichkeit, Würzburg, Königshausen & Neumann, 1990, p. 171.