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Heidegger. Pensée de l’être et origine de la subjectivité

Caron (2005:72-74): idem e ipse

Introduction générale

quarta-feira 16 de fevereiro de 2022, por Cardoso de Castro

CARON  , Maxence. Heidegger. Pensée de l’être et origine de la subjectivité. Paris: CERF, 2005, p. 72-74

Quand on dit « le moi », on parle d’un subjectum, d’un étant étalé dans toute sa visibilité et se prêtant aux prises de l’esprit. Mais quand on dit « le soi », on dit le moi = moi, totalité complexe, écart de soi à soi dans soi, dimension de temporalité, tension et mouvement au sein   d’un domaine d’extension. L’identité déployée par le soi est donc plus complexe que la simple coïncidence à soi ontique de tout étant pris en soi-même. Nous avons vu que « soi » pouvait se dire, de manière équivoque, à propos de tel ou tel étant déterminé comme de telle ou telle indétermination. Cette équivocité, P. Ricœur   également la relève et lui confère un domaine unique en lequel se distinguent deux modes de l’identité : l’identité au sens de idem, et l’identité au sens de ipse. Le soi peut s’entendre comme un idem ou comme un ipse, comme appliqué à un étant déterminé subsistant ou comme s’appliquant à un domaine d’indétermination ontique. L’identité au sens d’idem est ce « dont la permanence dans le temps constitue le degré le plus élevé, à quoi s’oppose le différent, au sens de changeant, variable » [1]. Cette identité est la traditionnelle substantialité, ou, comme le dit Heidegger, la jacence-au-fond de tout étant, qui lui donne d’être tel étant et pas un autre et le préserve du changement pour un temps qui est le temps de sa vie. Cet idem constitue l’intégrité physique de tout étant du monde ; il est le compte-rendu d’un présent qui se tient, se maintient et dure dans l’ouvert pendant un temps. Cette identité de l’idem est la modalité d’être qui quotidiennement nous concerne, s’offre à notre regard, et également la seule que nous ayons coutume de prendre en compte.

« L’idée d’être en général est donc expliquée au moyen de l’inesse en tant qu’idem esse. Ce qui fait d’un étant (ens) un étant, c’est l’« identité », l’unité exactement comprise qui, en tant que simple, unifie dès l’origine et en même temps, par cette unification, individualise. Opérant l’individualisation dans la simplicité et dès l’origine, anticipant donc, cette unification qui constitue l’essence de l’étant comme tel, c’est elle en outre qui forme l’être essentiel de la « subjectivité » du sujet, du subjectum (la substantialité de la substance) » [2] L’identité de l’idem demeure suffisante pour que nous puissions trouver nos marques dans la réalité intramondaine, elle permet à l’homme d’habiter parmi les étants, au milieu   de ces étants mêmes dont il fait ses objets, et qui ne cessent de s’imposer à sa vue (sans que la globalité de ce processus   vienne cependant à la pensée).

Si l’étant substantiel faisant encontre au sein du monde s’atteint selon la guise de l’idem, l’essence vraie et totale de l’homme, au contraire, se développe selon la guise de l’ipse. Ipse et idem sont les deux pôles constitutifs de l’équivocité de l’identité. D’une part, une différence fondamentale subsiste entre ce qui est simple coïncidence à soi et ce qui dans soi est rapport de soi à soi, mais, d’autre part, l’idem peut seulement être compris sur la base de l’ipse qui le rend possible alors que l’inverse est impossible. Car c’est bien une même identité qui s’exprime à chaque fois, mais seulement à des degrés divers de profondeur. Si l’idem est l’identité du présent comme présent, la durée sous-jacente à tout changement, la détermination de cet idem est une détermination temporelle (le présent), et se trouve alors d’emblée reliée à la plus ample temporalité de l’ipse (déployée ne serait-ce que dans l’intervalle du moi au moi dans le moi = moi) dont elle n’est qu’une figure apaisée et amoindrie : la manifestation manifeste quelque chose, le présent est présentifié.

Ainsi pouvons-nous annoncer de façon programmatique et avec Paul Ricœur : « Notre thèse constante sera que l’identité au sens d’ipse n’implique aucune assertion concernant un prétendu noyau non changeant de la personnalité. Et cela quand bien même l’ipséité apporterait des modalités propres d’identité» [3]. Le but de notre méditation est donc d’établir une pensée de l’essence du soi (qui ne suivra pas, précisons-le, l’itinéraire de Paul Ricœur, aux seules intuitions problématiques – et non aux réponses originales – duquel nous en appelons), afin de saisir la façon dont le soi, en déployant son être, développe par la même occasion un nouveau type d’identité (ipse), qui ne serait celle d’aucun objet, mais qui permettrait d’ouvrir quelque chose comme l’identité ontique (idem) d’un objet. Du moins est-il certain que le pôle d’un genre tout à fait singulier, qui porte cette ipséité, ne pourra pas être pensé comme un sujet, ce terme étant entendu dans sa signification traditionnelle, c’est-à-dire comme privilège cognitif de premier accès à soi. Le problème consiste donc à déterminer l’élément qui fait de l’ipse un ipse générateur d’idem, à déterminer la structure fondamentale, fondatrice et essentielle de l’ipséité pour que le soi puisse être le soi qu’il est..


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CARON, M. H. Pensée de l’être et origine de la subjectivité. Paris: CERF, 2005.


[1P. Ricœur, Soi-même comme un autre, p. 12-13

[2GA 9, p. 135 ; Q I et II, p. 102.

[3P. Ricœur, Soi-même comme un autre, p. 13