Heidegger, fenomenologia, hermenêutica, existência

Dasein descerra sua estrutura fundamental, ser-em-o-mundo, como uma clareira do AÍ, EM QUE coisas e outros comparecem, COM QUE são compreendidos, DE QUE são constituidos.

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Barbaras (1998:194-195) – o fenômeno da expressão

quarta-feira 10 de janeiro de 2024

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A expressão não conduz à dissolução da Natureza na transparência do Espírito, mas escava novas dimensões no mundo, fazendo recuar um pouco mais a sua opacidade e profundidade constitutivas: porque nasce de uma palavra, o sentido está ainda envolvido por aquilo que pretende envolver. Não podemos, portanto, subordinar a expressão a uma consciência que, nela, visa os significados: isso seria confundir o esforço expressivo com o seu resultado. Longe de a consciência preexistir à expressão, ela nasce nela, junta-se a ela deixando-se despojar pelo discurso e, por conseguinte, nunca se junta a si mesma: "não há diferença para a consciência entre o ato de se alcançar e o ato de se exprimir". Longe de a expressão ser obra da consciência, esta aparece antes como o horizonte de uma expressão inicialmente anônima e, em última análise, mais obra do mundo do que da mente: ao deixar-se capturar por um fragmento de si mesmo, o mundo ganha acesso a um novo modo de manifestação. Como diz Merleau-Ponty  , "não somos nós que falamos, é a verdade que é dita nas profundezas da fala".

original

Cette analyse permet de lever définitivement l’ambiguité que nous évoquions en commençant. Le monde de la perception ne peut plus apparaître comme un moment provisoire destiné à être dépassé dans la transparence de l’Esprit, puisque l’Esprit lui-même se confond finalement avec le devenir de la vie expressive et ne peut donc se clore sur lui-même, puisque le sens exprimé demeure, comme l’objet perçu, opaque, transcendant, inépuisable. Loin que la facticité du monde puisse être résorbée dans l’unité du sens, c’est-à-dire constituée par la conscience, l’émergence du sens est inséparable de la facticité d’une parole qui ne surmonte jamais le silence de la perception. L’expression ne conduit pas à dissoudre la Nature dans la transparence de l’Esprit mais vient creuser dans le monde des dimensions nouvelles, repoussant ainsi un peu plus loin son opacité et sa profondeur constitutives : parce qu’elle naît d’une parole, la signification est encore enveloppée par ce qu’elle prétend envelopper. On ne peut alors subordonner l’expression à une conscience qui, en elle, viserait des significations: ce serait confondre l’effort expressif avec son résultat. Loin que la conscience préexiste à l’expression, elle naît plutôt en elle, se rejoint en se laissant [195] déposséder par la parole et, par conséquent, ne se rejoint jamais tout à fait: «il n’y a pas de différence pour la conscience entre l’acte de s’atteindre et l’acte de s’exprimer» [1]. Loin que l’expression soit l’œuvre de la conscience, celle-ci apparaît plutôt comme l’horizon   d’une expression qui est d’abord anonyme et est finalement le fait du monde plutôt que de l’esprit: en se laissant capter par un fragment de lui-même, le monde accède à un nouveau mode de manifestation. Comme le dit Merleau-Ponty, «ce n’est pas nous qui parlons, c’est la vérité qui se parle au fond de la parole» [2].

L’ontologie   de Merleau-Ponty procède tout entière du nouvel éclairage sur le monde qu’apporte le phénomène de l’expression, du «changement de signe» dont le monde se trouve affecté dès lors que l’univers de la signification apparaît comme s’enracinant en lui. En effet, si le sens est caractérisé par l’historicité, le monde dans lequel il s’inscrit recule vers une profondeur qui n’est plus celle de l’objet présent. L’infinité du telos   expressif implique le reflux du monde vers la profondeur infinie d’une archè. L’historicité essentielle de la vérité a pour corrélât la détermination du monde comme sol et source de cette historicité plutôt que comme étant présent à une conscience. La perspective ontologique correspond bien à la découverte d’un monde qui porte en lui le destin tout entier de l’expression et dont la transcendance est irréductible car ce destin est sans terme. Le monde perceptif, dit Merleau-Ponty, «est au fond l’Être au sens de […] (ce) qui est plus que toute peinture, que toute parole, que toute attitude, et qui, saisi par la philosophie   dans son universalité, apparaît comme contenant tout ce qui sera jamais dit, et nous laissant pourtant à le créer» [3]. L’Universel n’est plus du côté du sens mais du côté de la facticité du monde: il est ce qui nourrit toute expression, tout en demeurant toujours en-deçà de ce qui le révèle en le portant à la signification. L’Être, c’est ce qui reste à dire au sein   de ce qui vise à l’exprimer et demeure donc en retrait sur ce qui le dit. Ainsi, alors que l’approche du monde selon le présupposé de la possibilité d’une mise en présence déterminait une problématique de la perception, la découverte de l’expression comme historicité infinie entraîne au contraire une approche du monde comme ce dont l’être excède toute présence. En abordant le sens à partir de l’expression, on est conduit à ressaisir le monde à partir de l’Être et non plus d’une conscience dont il ne serait que le vis-à-vis ou le corrélât.

[BARBARAS  , Renaud. De l’être du phénomène. Grenoble: Jérôme Millon, 1991]


Ver online : Renaud Barbaras


[1La prose du monde, p.26.

[2Visible et lnvisible, p.239.

[3V.l., p.223-224.