Heidegger, fenomenologia, hermenêutica, existência

Dasein descerra sua estrutura fundamental, ser-em-o-mundo, como uma clareira do AÍ, EM QUE coisas e outros comparecem, COM QUE são compreendidos, DE QUE são constituidos.

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Marquet (1995:217-218) – o corpo

segunda-feira 8 de janeiro de 2024

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O meu corpo só é meu na medida em que é adequado ao imperativo da minha singularidade: é enquanto tal que entra no campo dos fenômenos da consciência, daí a ilusão habitual de que esta mobilização é total e definitiva. De fato, o corpo não fornece à minha história mais do que um fundamento incuravelmente anônimo, impessoal, incontrolável; em si mesmo, ele permanece estranho à minha consciência — introduz no seu fluxo as suspensões, as ausências, os espaços em branco que são o sono, o desmaio, até à evasão última da morte. A estranheza fundamental do corpo é o que dá a qualquer fenomenologia o seu limite intransponível, na medida em que só o alcança, na melhor das hipóteses, sob a forma superficial do organismo domesticado, daquele pelo qual me torno presente ao mundo e capaz de intervir nele através dos meus esforços. O corpo profundo, o corpo autêntico, não tem nada a ver com a presença; ele permanece, no fundo de mim, o núcleo inquebrável da noite, o monstro adormecido cuja revolta, insidiosa ou catastrófica, perturba periodicamente (e uma vez, definitivamente) o edifício da consciência, impedindo o sujeito de coincidir com o acontecimento da sua história, tal como esta o impede de coincidir com a vida.

original

5 — Mon corps n’est mien que pour ce qui, de lui, est approprié à l’impératif de ma singularité: c’est comme tel qu’il entre dans le champ des phénomènes de la conscience, d’où l’illusion   habituelle qui croit cette mobilisation totale et définitive. En fait, le corps ne fournit à mon histoire qu’un fondement incurablement anonyme, im-personnel, im-maîtrisable ; en lui-même, il reste étranger à ma conscience — il introduit dans son flux ces suspensions, ces absences, ces blancs que sont le sommeil, l’évanouissement, jusqu’à la dérobade ultime de la mort. L’étrangeté foncière du corps est ce qui donne sa limite infranchissable à toute phénoménologie, dans la mesure où celle-ci ne l’atteint au mieux que sous la forme superficielle de l’organisme domestiqué, de ce par quoi je suis rendu présent au monde et susceptible d’y intervenir par mes efforts. Le corps profond, le corps authentique, n’a rien à voir avec la présence ; il demeure, au fond de moi, l’infracassable noyau de nuit, le monstre assoupi dont la révolte, insidieuse ou catastrophique, [218] bouleverse périodiquement (et, une fois, définitivement) l’édifice de la conscience, interdisant au sujet de coïncider avec l’événement de son histoire, comme celui-ci lui interdit par ailleurs de coïncider avec la vie; il est le ce sans quoi (ἄνευ ού), la nécessité sur la base de laquelle se joue ma liberté, sans arriver jamais à s’en déraciner tout à fait (à moins que la mort ne soit que cet ultime coup de serpe par lequel je suis mis en demeure de subsister seul — en abîme?). Ce qui s’annonce  , à travers cette altérité déterminée (concrète) de «ma» chair, c’est l’altérité plus profonde encore de la matière indéterminée, de ce qui est, pour la singularité, son passé absolu et chaotique, dont tout le «cours» de la nature semble avoir voulu l’absoudre au maximum (mais nous arrivons tout aussi peu à nous représenter une matière qui serait extériorité pure qu’une idée qui serait intériorité pure: l’être se présente toujours à nous avec un recto et un verso, un intérieur et un extérieur — comme chair ou langage).

[MARQUET  , Jean-François. Singularité et événement. Grenoble: J. Millon, 1995]


Ver online : Jean-François Marquet