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Vallin (EI:57-61) – o conceito na constituição objetivante

sábado 23 de dezembro de 2023, por Cardoso de Castro

destaque

1° O conceito não é o que constitui o próprio ser da experiência, mas uma projeção mental (cuja origem não temos de procurar aqui, mas que nos limitamos a descrever) que permite desvendar o real segundo a modalidade objectivante que caracteriza a subjetividade lógica. Na estrutura objectivante, recordemos que a subjetividade, longe de se encerrar em si mesma, se transcende para o mundo existente, que ela apreende ou pretende apreender como ser e não como fenômeno ou manifestação de uma coisa inacessível em si mesma. O conceito, enquanto projeção mental da subjetividade, é o que permite revelar a essência objetiva.

2° O conceito visa esta essência não apenas como uma lei de sucessão dos fenômenos (sendo este último termo despojado do seu sentido idealista e conservando apenas o seu sentido "mecanicista") mas como uma estrutura orgânica objetivamente realizada no existente para a qual a subjetividade transcende. Numa palavra, a finalidade não é objeto de um simples juízo reflexivo; ela pertence efetivamente à estrutura objetiva da realidade a um certo nível da experiência total que se oferece à subjetividade lógica.

original

Après avoir mis en évidence le phénomène très général de l’incarnation abstraite qui caractérise la subjectivité objectivante, nous pouvons saisir plus aisément la nature des relations entre l’essence et l’existence aussi bien du point de vue de la subjectivité connaissante que du point de vue de la réalité objectivée qu’elle vise.

La subjectivité logique saisit, du côté du réel qu’elle objective — et qui ne mérite le nom d’objet que dans cette seule perspective — des essences qui ne sont pas « séparées » mais immergées dans l’existence, au moyen de concepts qui ne sont pas « purs » mais unis à la sensibilité et à l’imagination  . Nous n’examinerons [58] pas dans le détail les modalités de l’aspect subjectif de cette « impureté » de l’essence, nous contentant de renvoyer à l’analyse kantienne des concepts de l’entendement dans leurs rapports avec l’intuition sensible, qui s’applique bien au mode de connaissance caractérisant la subjectivité objectivante [1]. Toutefois cette analyse serait ici à rectifier sur deux points essentiels :

1° Le concept n’est pas ce qui constitue l’être même de l’expérience mais une projection mentale (dont nous n’avons pas à chercher ici l’origine, mais que nous essayons simplement de décrire) qui nous permet de dévoiler le réel selon la modalité objectivante qui caractérise la subjectivité logique. Dans la structure objectivante, rappelons que la subjectivité, loin d’être enfermée en elle-même, se transcende vers le monde existant qu’elle saisit ou prétend saisir comme être et non comme phénomène ou manifestation d’une inaccessible chose en soi. Le concept en tant que projection mentale de la subjectivité est ce qui permet de dévoiler l’essence objective.

2° Le concept vise cette essence non seulement en tant que loi de succession des phénomènes (ce dernier terme étant ici dépouillé de sa signification idéaliste et ne gardant que son sens « mécaniste ») mais en tant que structure organique objectivement réalisée dans l’existant vers lequel se transcende la subjectivité. En un mot la finalité n’est pas l’objet d’un simple jugement réfléchissant, elle appartient effectivement à la structure objective du réel à un certain niveau de l’expérience totale qui s’offre à la subjectivité logique.

Précisons d’abord notre définition du concept comme projection mentale permettant de dévoiler l’essence objective.

Le concept, produit d’une activité de la subjectivité ne doit pas être envisagé comme une projection gratuite de la subjectivité sur l’existant brut que cette projection laisserait intouché en lui-même. Une telle projection correspond d’ailleurs à l’une des structures temporelles que nous aurons à examiner plus tard (celle de la sphère négative) mais non à la structure logique ou objectivante que nous envisageons en ce moment.

Il est à noter toutefois que le concept tel que nous l’avons envisagé jusqu’à présent est le signe d’une activité du sujet que nous avons définie comme volonté de puissance. Le concept ne correspond donc pas à une attitude d’abandon ou de pur détachement devant le réel qui serait à accueillir. Il implique [59] au contraire une sorte de violence faite au réel, un refus de tout ce qui pourrait faire obstacle au désir d’intelligibilité rationalisante et objectivante.

Mais cette activité — du moins au niveau psychologico-empirique qui est celui de la projection et non, il est vrai, sur le plan transcendantal de la constitution, est essentiellement négative. Elle ne consiste pas à informer un réel préalablement dépouillé de forme ou de structure, tel un Démiurge informant le chaos   d’une matière donnée, mais à découvrir, par la projection mentale du concept, ou à dévoiler grâce à la projection du concept ce qui dans le réel correspond précisément à son désir d’intelligibilité rationnelle.

Il y a évidemment aussi activité en ce sens que le concept n’est pas engendré passivement dans l’esprit sous l’action de l’expérience, mais ce n’est pas tant la genèse du concept qui nous intéresse ici que son déploiement à l’intérieur de la transcendance de la subjectivité vers le monde. L’activité projetante du concept consiste essentiellement dans le refus de dévoiler dans le réel existant ce qui ne correspond pas à l’impérialisme de son désir d’intelligibilité objectivante.

Mais il est clair que cette activité en tant que projection mentale n’est pas créatrice : c’est parce que le réel ou plus précisément la réalité « objectivée » est déjà implicitement dévoilée devant la subjectivité objectivante que celle-ci peut exercer son activité de projection conceptuelle qui permettra à l’essence de se dévoiler de façon explicite.

C’est dans ce dévoilement implicite de l’essence objective immergée dans le réel existant que consiste à vrai dire le rôle de l’ « expérience » dans la projection du concept. La projection du concept au contact de l’expérience, c’est-à-dire de l’essence engagée dans l’existence spatio-temporelle, est assez semblable au processus   d’abstraction métaphysique qu’on rencontre dans la noétique aristotélico-thomiste. Cette projection en tant qu’acte mental subjectif — qui constitue la nature des êtres aussi bien que celle d’une loi régissant la succession des phénomènes — vise l’universalité rationnelle immanente à l’expérience à l’exclusion des déterminations proprement individuelles dans lesquelles cette universalité se réalise. Le concept n’est donc pas tant une création de l’esprit qu’un acte spirituel qui, au contact d’une expérience avec laquelle la subjectivité objectivante se veut en accord, vise précisément dans l’expérience ce qui correspond à ce dernier. Le concept est d’autant plus profondément engagé dans le jeu des puissances sensibles (imagination et sensibilité) [60] que l’essence objective qu’il vise et permet de dévoiler de façon explicite n’existe elle aussi qu’en tant qu’engagée dans l’immanence de l’expérience sensible. La projection des relations universelles, en quoi consiste l’essence même de son activité est toujours centrée sur les données sensibles qui, comme Kant   l’a bien montré, confèrent au concept son contenu et sa valeur. Mais il importe de préciser que ces « données sensibles » qui ne sont pas posées ici comme un résidu opaque et par nature rebelle à la projection d’intelligibilité émanant du sujet, mais comme de l’intelligible en puissance et pour ainsi dire exemplifié, concrétisé et individualisé, interviennent ici d’une double manière :

1) Ce sont elles qui « réveillent » pour ainsi dire l’activité de projection intelligible du sujet : elles sont pour le sujet comme une invitation à tisser de façon plus complète et plus cohérente le réseau de relations intelligibles qu’elles lui font seulement entrevoir dans ce que nous avons appelé le dévoilement implicite. L’expérience est dès l’abord intelligible, mais de façon souvent « confuse et mutilée ». Le moment du concept proprement dit ou de la projection conceptuelle en tant que distincte du dévoilement de l’essence objective — et qui trouve évidemment dans l’activité de la science son illustration la plus valable — consiste précisément dans l’effort incessant de tisser maille à maille le réseau des relations coordonnées ou hiérarchisées dans lesquelles viennent s’insérer la totalité des êtres ou des phénomènes du monde existant.

2) Les « données sensibles » interviennent aussi, et c’est alors le moment de ce que nous appelons le dévoilement « explicite » de l’essence objective, dans la confirmation de la projection conceptuelle (cf. par exemple la vérification expérimentale qui fait suite à l’hypothèse dans le travail du savant). La subjectivité perçoit alors l’essence dans l’expérience elle-même, elle ne projette plus un concept à l’occasion de l’expérience. Le processus créateur et discursif fait alors place à une activité apparemment plus passive où l’intelligence saisit intuitivement une essence qui appartient au réel, qui est explicitement posée comme immanente à l’expérience objective. L’intuition cartésienne des natures simples correspond assez exactement à ce moment capital, logiquement distinct de celui de la projection conceptuelle dont la description semble avoir pesé d’un poids un peu trop lourd sur l’analyse kantienne de l’entendement humain, exclusivement axée sur l’aspect discursif et créateur de la subjectivité logique.

Il est à noter toutefois — pour être tout à fait exact — que l’aspect « créateur » ne disparaît pas entièrement dans le moment [61] « intuitif » du dévoilement explicite de l’essence objective, car il importe de ne pas oublier que, si l’essence objective se dévoile devant la subjectivité qui l’accueille intuitivement ou « passivement », pour ainsi dire, ce dévoilement est conditionné par la projection conceptuelle et subjective qui est elle-même déterminée, tout autant que par le contact avec « l’expérience », par la décision préalable de ne découvrir dans cette dernière que ce qui cadrera avec l’impérialisme de sa volonté de puissance.


Ver online : Georges Vallin


VALLIN, Georges. Être et individualité. Éléments pour une phénoménologie de l’homme moderne. Paris: PUF, 1959


[1Cf. Kant, Critique de la raison pure, ΙΙe Partie : Analytique transcendantale.