objet de préoccupation

Quant à ses modes positifs, la sollicitude [Fürsorge] offre deux possibilités extrêmes. Elle peut ôter pour ainsi dire le « souci » à l’autre, et, dans la préoccupation [Besorgen], se mettre à sa place, se substituer à lui. Cette sollicitude [Fürsorge] assume pour l’autre ce dont il y a à se préoccuper. L’autre est alors expulsé de sa place, il se retire, pour recevoir après coup l’objet de préoccupation [Besorgen] comme quelque chose de prêt et de disponible, ou pour s’en décharger complètement. Dans une telle sollicitude [Fürsorge], l’autre peut devenir dépendant et assujetti, cette domination demeurerait-elle même silencieuse au point de lui rester voilée. Cette sollicitude [Fürsorge] qui se substitue, qui ôte le « souci » détermine l’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] dans la plus large mesure, et elle concerne le plus souvent la préoccupation [Besorgen] pour l’à-portée-de-la-main. EtreTemps26

Mais, en vertu de la présente analyse, appartient également à l’être du Dasein, dont il y va pour lui en son être même, l’être-avec [Mitsein] autrui. Comme être-avec [Mitsein], le Dasein « est » donc essentiellement en-vue-d’autrui. Cet énoncé doit être compris comme énoncé d’essence. Même lorsque le Dasein factice ne se tourne pas vers d’autres, qu’il croit pouvoir se passer d’eux ou s’en passe effectivement, il est selon la guise de l’être-avec [Mitsein]. Dans l’être-avec [Mitsein] en tant que en-vue-des-autres existential, ceux-ci sont déjà ouverts en leur Dasein. Cette ouverture des autres, d’emblée constituée avec l’être-avec [Mitsein], contribue donc à la constitution de la significativité [Bedeutsamkeit], c’est-à-dire de la mondanéité [Weltlichkeit] où celle-ci est ancrée dans le en-vue-de existential. C’est pourquoi la mondanéité [Weltlichkeit] du monde ainsi constituée, où le Dasein est essentiellement à chaque fois déjà, laisse l’à-portée-de-la-main intramondain faire encontre [begegnen] de telle manière que, en même temps que lui en tant qu’objet de préoccupation [Besorgen] circon-specte, l’être-Là-avec [Mitdasein] d’autrui fait encontre. La structure de la mondanéité [Weltlichkeit] du monde implique que les autres ne soient pas de prime abord sous-la-main comme des sujets flottant en l’air juxtaposés à d’autres choses, mais qu’ils se manifestent, en leur être spécifique au sein du monde ambiant, dans le monde à partir de ce qui est à-portée-de-la-main en celui-ci. EtreTemps26

Le Dasein propre aussi bien que l’être-Là-avec [Mitdasein] d’autrui fait encontre de prime abord et le plus souvent à partir du monde commun [Mitwelt] tel qu’il est objet de préoccupation [Besorgen] dans le monde ambiant. Dans son identification au monde de la préoccupation [Besorgen], autrement dit en même temps à l’être-avec [Mitsein] pour les autres, le Dasein n’est pas lui-même. Qui est-ce alors qui a assumé l’être en tant qu’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] quotidien [alltäglich] ? EtreTemps26

Le comprendre inauthentique se temporalise comme ce s’attendre présentifiant à l’unité [339] ekstatique duquel doit nécessairement appartenir un être-été correspondant. L’ad-venir à soi authentique de la résolution devançante est en même temps un re-venir au Soi-même le plus propre, jeté dans son isolement. C’est cette ekstase qui rend possible que le Dasein, en se résolvant, assume l’étant qu’il est déjà. Dans le devancement, le Dasein se ramène et se reconduit devant le pouvoir-être le plus propre. Nous appelons l’être-été authentique la répétition. Mais le se-projeter inauthentique vers les possibilités puisées dans l’objet de préoccupation [Besorgen] tandis que celui-ci est présentifié n’est possible qu’autant que le Dasein s’est oublié en son pouvoir-être jeté le plus propre. Un tel oubli n’est pas rien, ni seulement le défaut du souvenir, mais un mode ekstatique propre, « positif » de l’être-été. L’ekstase (échappée) de l’oubli a le caractère d’un désengagement fermé à soi-même devant l’«été » le plus propre, de telle sorte que ce désengagement devant… referme ekstatiquement le devant-quoi et, avec lui, soi-même. L’oubli comme être-été inauthentique se rapporte ainsi à l’être jeté et propre ; il est le sens temporel du mode d’être conformément auquel je suis été de prime abord et le plus souvent. Et c’est seulement sur la base de cet oubli que le présentifier qui se préoccupe et s’attend peut conserver – à savoir conserver l’étant qui n’est pas à la mesure du Dasein [Daseinsmässig], mais fait encontre dans le monde ambiant. À ce conserver correspond une non-conservation, qui représente un « oubli » au sens dérivé. EtreTemps68