en-vue-de-quoi

Worum-willen [SZ]

La tournure [Bewandtnis], tel est l’être de l’étant intramondain, l’être vers lequel il est à chaque fois déjà de prime abord libéré. Avec lui, en tant qu’étant, il retourne à chaque fois de ceci ou de cela. Cela, avoir une tournure [Bewandtnis], est la détermination ontologique de l’être de cet étant, et non pas un énoncé ontique à son sujet. Ce dont il retourne, voilà le pour-quoi de l’utilité et le à-quoi de l’employabilité. Avec le pour-quoi de l’utilité, il peut derechef retourner de… ; par exemple, avec cet étant à-portée-de-la-main que nous appelons, et pour cause, un marteau, ce dont il retourne, c’est de marteler ; avec ce martèlement, il retourne de consolider une maison ; avec cette consolidation, de se protéger des intempéries ; cette protection « est » en vue de l’abritement du Dasein, autrement dit en vue d’une possibilité de son être. De quoi retourne-t-il avec un étant à-portée-de-la-main, cela est à chaque fois prétracé à partir de la totalité de tournure [Bewandtnis]. La totalité de tournure [Bewandtnis] qui, par exemple, constitue en son être-à-portée-de-la-main l’étant à portée de la main dans un atelier, est « antérieure » à l’outil [Zeug] singulier ; de même, autre exemple, celle d’une ferme, avec l’ensemble de son matériel et de ses bâtiments. Mais la totalité de tournure [Bewandtnis] renvoie elle-même en dernière instance à un pour-quoi avec lequel il ne retourne plus de rien – autrement dit qui n’est plus un étant sur le mode d’être de l’à-portée-de-la-main à l’intérieur d’un monde, mais un étant dont l’être est déterminé comme être-au-monde [In-der-Welt-sein], à la constitution d’être duquel la mondanéité [Weltlichkeit] elle-même appartient. Ce pour-quoi primaire n’est plus un pour-cela comme « de » possible d’une tournure [Bewandtnis]. Le « pour-quoi » primaire est un en-vue-de-quoi. Mais le en-vue-de concerne toujours l’être du DASEIN, pour lequel en son être il y va toujours essentiellement de cet être. Nous n’avons pas encore à poursuivre plus avant la connexion indiquée, conduisant de la structure de la tournure [Bewandtnis] à l’être du Dasein en tant que en-vue-de-quoi authentique et unique. Préalablement, le « laisser-retourner » exige d’être suffisamment clarifié pour que nous portions le phénomène de la mondanéité [Weltlichkeit] à la déterminité [Bestimmtheit] requise pour pouvoir en général soulever les problèmes qui la concernent. EtreTemps18

Le laisser-retourner préalable de… avec… se fonde dans un comprendre de quelque chose comme le laisser-retourner, le « de » de la tournure [Bewandtnis] et le « avec » de la tournure [Bewandtnis]. Ce dernier, et aussi ce qui est encore à son fondement – ainsi le pour-quoi dont il retourne, et le en-vue-de-quoi auquel tout pour-quoi reconduit à son tour en dernière instance -, tout cela doit préalablement être ouvert en une certaine compréhensibilité. Et qu’est-ce dont que cela «où» le Dasein comme être-au-monde [In-der-Welt-sein] se comprend préontologiquement ? Dans la compréhension du complexe de rapports cité, le Dasein, sur la base d’un pouvoir-être saisi expressément ou non, authentique ou non, en vue duquel il est lui-même, s’est assigné à un pour… Celui-ci pré-trace un pour-quoi en tant que « de » possible d’un laisser-retourner, lequel laisse également retourner, de par sa structure propre, « avec » quelque chose. À partir d’un en-vue-de-quoi, le Dasein se renvoie toujours déjà à l’« avec » d’une tournure [Bewandtnis], c’est-à-dire qu’il laisse à chaque fois déjà, pour autant qu’il est, de l’étant faire encontre [begegnen] comme à-portée-de-la-main. Ce dans quoi le Dasein se comprend préalablement sur le mode du se-renvoyer n’est pas autre chose que ce vers quoi il laisse préalablement de l’étant faire encontre [begegnen]. Le « où » du comprendre auto-renvoyant comme « vers » du faire-encontre de l’étant sur le mode de la tournure [Bewandtnis], tel est le phénomène du monde. Et la structure de ce vers quoi le Dasein se renvoie est ce qui constitue la mondanéité [Weltlichkeit] du monde. EtreTemps18

L’espace ainsi ouvert avec la mondanéité [Weltlichkeit] du monde n’a encore rien à voir avec la pure multiplicité des trois dimensions. Dans cette ouverture prochaine, l’espace demeure encore en retrait en tant que pur « où » de toute ordination métrique d’emplacements ou détermination métrique de situations. Ce vers-quoi l’espace est d’emblée découvert dans le Dasein, nous l’avons déjà indiqué avec le phénomène de la contrée. Nous comprenons celle-ci comme le vers-où de la destination possible du complexe à-portée-de-la-main d’outils, lequel doit pouvoir faire encontre [begegnen] en tant qu’orienté-é-loigné, c’est-à-dire placé. La destination se [111] détermine à partir de la significativité [Bedeutsamkeit] constitutive du monde et articule, à l’intérieur du vers-où possible, le vers-ici et le vers-là-bas. Le vers-où en général est pré-dessiné par la totalité de renvois fixée dans un en-vue-de-quoi de la préoccupation [Besorgen], totalité à l’intérieur de laquelle le laisser-retourner libérant se renvoie. Avec ce qui fait encontre comme à-portée-de-la-main, il retourne à chaque fois d’une contrée. À la totalité de tournure [Bewandtnis], qui constitue l’être de l’à-portée-de-la-main intramondain, appartient une tournure [Bewandtnis] spatiale « en-contrée ». Sur sa base, l’à-portée-de-la-main devient trouvable et déterminable selon la forme et la direction. Selon la transparence à chaque fois possible de la circon-spection préoccupée, l’à-portée-de-la-main intramondain est é-loigné et orienté avec l’être factice du Dasein. EtreTemps24

Le monde ne libère pas seulement l’à-portée-de-la-main comme étant rencontré à l’intérieur du monde, mais aussi le Dasein, les autres dans leur être-Là-avec [Mitdasein]. Mais cet étant libéré dans le monde ambiant est, conformément à son sens d’être le plus propre, un être-à dans le même monde où, faisant encontre à d’autres, il est Là avec… La mondanéité [Weltlichkeit] a été interprétée (§18 [EtreTemps18]) comme la totalité de renvois de la significativité [Bedeutsamkeit]. Dans la familiarité immédiatement compréhensive avec cette mondanéité [Weltlichkeit], le Dasein laisse de l’à-portée-de-la-main faire encontre [begegnen] comme découvert en sa tournure [Bewandtnis]. Le complexe de renvois de la significativité [Bedeutsamkeit] trouve son point d’ancrage dans l’être du Dasein pour son être le plus propre – être avec lequel il ne peut plus retourner de rien puisqu’il est bien plutôt l’être en-vue-de-quoi le Dasein est lui-même comme il est [NT: Cf. supra, p. [84].]. EtreTemps26

En tant qu’ouvrir, le comprendre concerne toujours la constitution fondamentale totale de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. En tant que pouvoir-être, l’être-à est à chaque fois pouvoir-être-au-monde [In-der-Welt-sein]. Celui-ci n’est pas seulement ouvert, en tant que monde, comme significativité [Bedeutsamkeit] possible, mais encore la libération de l’étant intramondain lui-même libère cet étant vers ses possibilités. L’à-portée-de-la-main est comme tel découvert dans son utilité, son employabilité, son importunité. La totalité de tournure [Bewandtnis] se dévoile comme le tout catégorial d’une possibilité de complexion d’étant à-portée-de-la-main. Même l’« unité » du [145] sous-la-main en sa diversité, la nature, ne devient découvrable que sur la base de l’ouverture d’une possibilité à elle propre. Est-ce un hasard si la question de l’être de la nature vise les « conditions de sa possibilité » ? Or où un tel questionnement se fonde-t-il ? Face à lui, une autre question ne peut pas ne pas s’élever : pour-quoi, en-vue-de-quoi l’étant qui n’est pas à la mesure du Dasein [Daseinsmässig] est-il compris en son être lorsqu’il est ouvert vers ses conditions de possibilité ? Cette compréhension, Kant la présuppose peut-être à bon droit. Cependant, ce présupposé même ne saurait, à tout le moins, rester sans légitimation. EtreTemps31

Pourquoi le comprendre, selon toutes les dimensions essentielles de ce qui peut être ouvert en lui, perce-t-il toujours jusqu’aux possibilités ? Parce que le comprendre a en lui-même la structure existentiale que nous appelons le projet. Il projette l’être du Dasein vers son en-vue-de-quoi tout aussi originairement que vers la significativité [Bedeutsamkeit] en tant que mondanéité [Weltlichkeit] de ce qui lui est à chaque fois monde. Le caractère de projet du comprendre constitue l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] du point de vue de l’ouverture de son Là comme Là d’un pouvoir-être. Le projet est la constitution existentiale d’être de l’espace de jeu du pouvoir-être factice. Et en tant que jeté, le Dasein est jeté dans le mode d’être du projeter. Le projeter n’a rien à voir avec l’observation d’un plan conçu conformément auquel le Dasein aménagerait son être : au contraire, en tant que Dasein, il s’est à chaque fois déjà projeté et, aussi longtemps qu’il est, il est projetant. Le Dasein se comprend toujours déjà et toujours encore, aussi longtemps qu’il est, à partir de possibilités. EtreTemps31

[146] Le projet concerne toujours la pleine ouverture de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] ; le comprendre, en tant que pouvoir-être, a lui-même des possibilités qui sont pré-dessinées par l’orbe de ce qui est essentiellement ouvrable en lui. Le comprendre peut se placer primairement dans l’ouverture du monde, c’est-à-dire que le Dasein peut de prime abord et le plus souvent se comprendre à partir de son monde. À moins que le comprendre ne se jette primairement dans le en-vue-de-quoi, autrement dit que le Dasein n’existe en tant que lui-même. Le comprendre est soit authentique – jaillissant du Soi-même propre comme tel – soit inauthentique. Le préfixe « in-» ne signifie pas que le Dasein se détache de son Soi-même et comprenne « seulement » le monde. Le monde appartient à son être-Soi-même en tant qu’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. EtreTemps31

Le comprendre, en son caractère de projet, constitue existentialement ce que nous appelons la vue du Dasein. Cette vue existentialement coprésente à l’ouverture du Là, le Dasein l’est cooriginairement selon les guises fondamentales de son être qu’on a caractérisées, c’est-à-dire la circon-spection de la préoccupation [Besorgen], l’égard de la sollicitude [Fürsorge], et il l’est en tant que vue sur l’être même en-vue-de-quoi le Dasein est chaque fois comme il est (NT: La syntaxe de la phrase est délicate, mais le sens me paraît prescrire de construire ainsi : « le Dasein est la vue… en tant que vue sur l’être… » (la deuxième occurrence de « vue » fonctionnant comme attribut de la première) – autrement dit de ne pas coordonner, comme BW, « vue sur l’être » à « circon-spection » et « égard ». Bref : que ce soit selon la guise de la circon-spection ou de l’égard, le Dasein est vue, à savoir vue sur son être possible. ). La vue qui se rapporte primairement et en totalité à l’existence, nous l’appelons la translucidité. Nous choisissons ce terme pour désigner la « connaissance de soi » bien comprise, c’est-à-dire pour indiquer qu’il ne s’agit pas dans celle-ci d’une détection et d’une contemplation perceptives d’un point fixe du Soi-même, mais d’une saisie compréhensive de l’ouverture pleine de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] à travers ses moments constitutifs essentiels. L’existant ne « se » voit que pour autant qu’il est devenu pour soi cooriginairement translucide dans son être auprès du monde et dans l’être-avec [Mitsein] autrui comme moments constitutifs de son existence. EtreTemps31

L’ouverture du Là dans le comprendre est elle-même une guise du pouvoir-être du Dasein. Dans l’être-projeté de son être vers le en-vue-de-quoi et, indissociablement, vers la significativité [Bedeutsamkeit] (monde), est incluse une ouverture de l’être en général. Dans le projeter vers des possibilités, la compréhension de l’être est déjà anticipée. L’être est compris dans le projet, non pas conçu ontologiquement. L’étant qui a le mode d’être du projet essentiel de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] a pour constituant de son être la compréhension d’être. Ce qui avait auparavant [NA: Cf. supra, §4, p. [117] sq.] été établi dogmatiquement reçoit maintenant sa mise en lumière à partir de la constitution de l’être où le Dasein comme comprendre est son Là. Un éclaircissement satisfaisant, et conforme aux limites de toute la présente recherche, du sens existential de cette compréhension d’être ne pourra être atteint que sur la base de l’interprétation temporale de l’être. EtreTemps31

Pour saisir ontologiquement la totalité du tout structurel du Dasein, nous devons d’abord poser la question suivante : le phénomène de l’angoisse, avec ce qui s’ouvre en lui, est-il capable de nous donner phénoménalement le tout du Dasein de manière suffisamment cooriginaire pour que le regard qui en cherche la totalité puisse se remplir dans cette donnée ? La réalité globale de ce que cette donnée inclut peut être enregistrée dans l’énumération formelle suivante : le s’angoisser est, en tant qu’affection, une guise de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] ; le devant-quoi de l’angoisse est l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] jeté; le en-vue-de-quoi de l’angoisse est le pouvoir-être-au-monde [In-der-Welt-sein]. Par suite, le phénomène plein de l’angoisse manifeste le Dasein comme être-au-monde [In-der-Welt-sein] existant facticement. Les caractères ontologiques fondamentaux de cet étant sont l’existentialité, la facticité et l’être-échu. Ces déterminations existentiales n’appartiennent pas comme des morceaux à une totalité à laquelle l’un d’entre eux pourrait parfois faire défaut, mais en elles règne une connexion originaire qui constitue la totalité cherchée du tout structurel. Dans l’unité des déterminations d’être citées du Dasein, l’être de celui-ci devient comme tel ontologiquement saisissable. Comment cette unité elle-même doit-elle être caractérisée ? EtreTemps41

Mais cette structure concerne le tout de la constitution du Dasein. L’être-en-avant-de-soi ne signifie pas quelque chose comme une tendance isolée d’un « sujet » sans monde, elle caractérise l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. Mais à celui-ci il appartient d’être remis à lui-même, d’être à chaque fois déjà jeté dans un monde. L’abandon du Dasein à lui-même se manifeste de manière originairement concrète dans l’angoisse. Saisi plus pleinement, l’être-en-avant-de-soi signifie donc : être-en-avant-de-soi-dans-l’être-déjà-dans-un-monde. Dès l’instant que cette structure essentiellement unitaire est phénoménalement aperçue, se clarifie également ce que notre analyse antérieure de la mondanéité [Weltlichkeit] avait dégagé, à savoir que le tout de renvois de la significativité [Bedeutsamkeit] en laquelle se constitue la mondanéité [Weltlichkeit] est « fixé » en un en-vue-de. Cette solidarité du tout de renvois, des rapports multiples du pour… avec ce dont il y va pour le Dasein, son en-vue-de-quoi, n’a pas le sens d’une fusion d’un « monde » sous-la-main d’objets avec un sujet. Elle est bien plutôt l’expression phénoménale de la constitution originairement totale du Dasein, dont la totalité est désormais explicitement dégagée comme être-en-avant-de-soi-dans-l’être-déjà-dans… En d’autres termes : l’exister est toujours factice. L’existentialité est essentiellement déterminée par la facticité. EtreTemps41

L’être-en-avant-de-soi comme être pour le pouvoir-être le plus propre contient la condition ontologico-existentiale de possibilité de l’être-libre vers des possibilités existentielles authentiques. C’est en vue du pouvoir-être que le Dasein est à chaque fois comme il est facticement. Mais dans la mesure où cet être pour le pouvoir-être est lui-même déterminé par la liberté, le Dasein peut aussi se comporter velléitairement vis-à-vis de ses possibilités, il peut être inauthentique, et il est de prime abord et le plus souvent facticement selon cette guise. Le en-vue-de-quoi authentique reste non-saisi, le projet du pouvoir-être de soi-même est laissé à la disposition du On. Dans l’être-en-avant-de-soi, le « soi » désigne donc à chaque fois le Soi-même au sens du On-même. Même dans l’inauthenticité, le Dasein reste essentiellement en-avant-de-soi, tout de même que la fuite échéante du Dasein devant lui-même manifeste encore la constitution d’être selon laquelle, pour cet étant, il y va de son être. EtreTemps41

Le pouvoir-être en-vue duquel le Dasein est a lui-même le mode d’être de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. Il implique donc ontologiquement le rapport à de l’étant intramondain. Le souci est toujours, même s’il n’est que privativement, préoccupation [Besorgen] et sollicitude [Fürsorge]. Dans le vouloir, un étant compris, c’est-à-dire projeté vers sa possibilité, est saisi concrètement comme quelque chose dont il faut se préoccuper ou qu’il faut porter à son être par la sollicitude [Fürsorge]. C’est pourquoi au vouloir appartient à chaque fois un voulu, qui s’est déjà déterminé à partir d’un en-vue-de-quoi. La possibilité ontologique du vouloir a donc pour constituants : l’ouverture préalable de l’en-vue-de-quoi en général (être-en-avant-de-soi), l’ouverture de l’objet possible de préoccupation [Besorgen] (le monde comme le « où » de l’être-déjà) et le se-projeter compréhensif du Dasein vers un pouvoir-être pour une possibilité de l’étant « voulu ». Dans le phénomène du vouloir perce la totalité sous-jacente du souci. EtreTemps41

Désormais, ce qui est conquis avec la résolution, c’est la vérité la plus originaire, parce qu’authentique du Dasein. L’ouverture du Là ouvre cooriginairement l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] à chaque fois total, c’est-à-dire le monde, l’être-à et le Soi-même que cet étant est en tant que « Je suis ». Avec l’ouverture du monde, de l’étant intramondain est à chaque fois déjà découvert. L’être-découvert de l’à-portée-de-la-main et du sous-la-main se fonde dans l’ouverture du monde (NA: Cf. supra, §18 [EtreTemps18], p. [83] sq.) ; car la libération de toute totalité de tournure [Bewandtnis] de l’à-portée-de-la-main requiert une pré-compréhension de la significativité [Bedeutsamkeit]. Comprenant celle-ci, le Dasein préoccupé s’assigne circon-spectivement à l’à-portée-de-la-main qui lui fait encontre. Le comprendre de la significativité [Bedeutsamkeit] comme ouverture de tout monde se fonde derechef dans le comprendre du en-vue-de-quoi auquel se rapporte toute découverte de la totalité de tournure [Bewandtnis]. EtreTemps60

À partir du en-vue-de-quoi du pouvoir-être choisi par lui-même, le Dasein résolu se rend libre pour son monde. La résolution à soi-même place pour la première fois le Dasein dans la possibilité de laisser « être » les autres dans leur pouvoir-être le plus propre et d’ouvrir conjointement celui-ci dans la sollicitude [Fürsorge] qui devance et libère. Le Dasein résolu peut devenir « conscience [Gewissen] » d’autrui. C’est de l’être-Soi-même authentique de la résolution que jaillit pour la première fois l’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] authentique – et non pas des ententes équivoques et jalouses ou des fraternisations verbeuses dans le On [das Man] et dans ce que l’on veut entreprendre. EtreTemps60

Pour ramener sous le regard phénoménologique les phénomènes conquis dans l’analyse préparatoire, un renvoi aux stades parcourus par celle-ci sera ici suffisant. La délimitation du souci a résulté de l’analyse de l’ouverture qui constitue l’être du « Là ». La clarification de ce phénomène signifiait l’interprétation provisoire de la constitution fondamentale du Dasein, l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. C’est par la caractérisation de celui-ci que la recherche s’était engagée, afin d’assurer dès le départ, à l’encontre des pré-déterminations ontologiques inadéquates, quoique le plus souvent implicites, du Dasein, un horizon phénoménal suffisant. De prime abord, l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] a été caractérisé par rapport au phénomène du monde, ce qui n’empêche que l’explication est partie de la caractérisation ontico-ontologique de l’étant à-portée-de-la-main et sous-la-main « dans » le monde ambiant pour s’acheminer jusqu’au dégagement de l’intramondanéité [Weltlichkeit], afin de rendre visible en celle-ci le phénomène de la mondanéité [Weltlichkeit] en général. Cependant, la structure de la mondanéité [Weltlichkeit] – la significativité [Bedeutsamkeit] – s’est révélée solidaire de ce vers-quoi le comprendre appartenant essentiellement à l’ouverture se projette – du pouvoir-être du Dasein, en-vue-de-quoi il existe. EtreTemps67

La datation du « alors » qui s’explicite dans le s’attendre préoccupé implique ceci lorsqu’il fait jour, il est temps de se mettre au travail du jour. Le temps explicité dans la préoccupation [Besorgen] est à chaque fois déjà compris comme temps de…, pour… Le « maintenant que ceci et cela » est à chaque fois comme tel approprié et inapproprié. Le « maintenant » – et ainsi tout mode du temps explicité – n’est pas seulement un « maintenant que… », mais, en tant que ce maintenant essentiellement datable, il est en même temps essentiellement déterminé par la structure de l’appropriement ou du non-appropriement. Le temps explicité a nativement le caractère du « temps pour… », ou du « ce n’est pas le temps pour… » Le présentifier s’attendant-conservant de la préoccupation [Besorgen] comprend le temps dans un rapport à un pour-quoi, qui, à son tour, est en dernière instance ancré dans un en-vue-de-quoi du pouvoir-être du Dasein. Avec ce rapport de pour…, le temps publié manifeste la structure où nous avions reconnu antérieurement [NA: Cf. supra, p. [83] sq., et §69 [EtreTemps69] c, p. [364] sq.] la significativité [Bedeutsamkeit]. Celle-ci constitue la mondanéité [Weltlichkeit] du monde. Le temps publié a, en tant que temps de…, essentiellement un caractère mondain, et c’est pourquoi nous nommons le temps qui se publie dans la temporalisation de la temporalité le temps du monde – non point certes parce qu’il serait sous-la-main comme étant intramondain (il ne peut jamais être tel), mais parce qu’il appartient au monde dans le sens que nous avons interprété ontologico-existentialement. Comment les rapports essentiels de la structure du monde, par exemple le « pour… », sont liés, sur la base de la constitution ekstatico-horizontale de la temporalité, avec le temps public, par exemple le « alors que… », c’est ce qui doit nous apparaître dans la suite. En tout état de cause, c’est maintenant seulement que le temps de la préoccupation [Besorgen] se laisse complètement caractériser en sa structure : il est datable, tendu, public, et il appartient, en tant qu’ainsi structuré, au monde lui-même. Tout « maintenant » ex-primé naturellement-quotidienne [alltäglich]ment, par exemple, a cette [415] structure, et, comme tel, il est compris – quoique non thématiquement et préconceptuellement – dans le se-laisser-le-temps préoccupé du Dasein. EtreTemps80