À partir du en-vue-de-quoi du pouvoir-être choisi par lui-même, le Dasein résolu se rend libre pour son monde. La résolution à soi-même place pour la première fois le Dasein dans la possibilité de laisser « être » les autres dans leur pouvoir-être le plus propre et d’ouvrir conjointement celui-ci dans la sollicitude [Fürsorge] qui devance et libère. Le Dasein résolu peut devenir « conscience [Gewissen] » d’autrui. C’est de l’être-Soi-même authentique de la résolution que jaillit pour la première fois l’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] authentique – et non pas des ententes équivoques et jalouses ou des fraternisations verbeuses dans le On [das Man] et dans ce que l’on veut entreprendre. EtreTemps60
Le pour-quoi de la résolution est ontologiquement pré-dessiné dans l’existentialité du Dasein en général comme pouvoir-être selon la guise de la sollicitude [Fürsorge] préoccupée. Mais en tant que souci, le Dasein est déterminé par la facticité et par l’échéance. Ouvert en son « Là », il se tient cooriginairement dans la vérité et la non-vérité [NA: Cf. supra, §44 [EtreTemps44], p. [222].]. Or autant vaut justement « à [299] proprement parler » de la résolution comme vérité authentique. Elle s’approprie authentiquement la non-vérité. Le Dasein est à chaque fois déjà, et par suite il est peut-être de nouveau dans l’ir-résolution. Ce dernier titre exprime seulement le phénomène qui a été auparavant interprété comme être-livré à l’explicitation régnante du On. Le Dasein en tant que On-même est « porté » par l’équivoque d’entendement de la publicité, où personne ne se résout, et qui pourtant a toujours déjà tranché. La résolution veut dire : se-laisser-con-voquer hors de la perte dans le On [das Man]. L’ir-résolution du On, néanmoins, demeure souveraine – à ceci près qu’elle ne peut plus entamer l’existence résolue. L’ir-résolution, en tant que contre-concept de la résolution comprise existentialement, ne désigne pas une propriété ontico-psychique, une charge d’inhibitions par exemple. Même la décision demeure assignée au On et à son monde. Comprendre cela appartient également à ce qu’elle ouvre, dans la mesure où la résolution est ce qui donne pour la première fois au Dasein sa translucidité authentique. Dans la résolution, il y va pour le Dasein de son pouvoir-être le plus propre, lequel, en tant que jeté, ne peut se projeter que vers des possibilités factices déterminées. La décision ne se soustrait pas à l’« effectivité », mais découvre pour la première fois le possible factice, et cela en s’en emparant de la manière dont elle le peut en tant que pouvoir-être le plus propre dans le On [das Man]. La déterminité [Bestimmtheit] existentiale du Dasein résolu à chaque fois possible embrasse les moments constitutifs de ce phénomène existential – omis jusqu’ici – que nous appelons la situation. EtreTemps60
Cependant, l’une et l’autre tonalités, la peur et l’angoisse, ne « surviennent » jamais isolément dans un « courant de vécus », mais elles in-tonent, et ainsi déterminent, à chaque fois un comprendre – ou se déterminent à partir de lui. La peur a son occasion dans l’étant offert dans le monde ambiant à la préoccupation [Besorgen]. L’angoisse, au contraire, jaillit du Dasein même. La peur assaille à partir de l’intramondain. L’angoisse s’élève à partir de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] comme être pour la mort jeté. Comprise temporellement, cette « montée » de l’angoisse signifie ceci : l’avenir et le présent de l’angoisse se temporalisent à partir d’un être-été originaire au sens du re-porter vers la répétabilité. Mais à proprement parler, l’angoisse ne peut monter que dans un Dasein résolu. Celui qui est résolu ne connaît aucune peur, mais il comprend justement la possibilité de l’angoisse comme de cette tonalité qui ne l’inhibe ni ne l’égare. Elle libère de possibilités « nulles » et laisse devenir libre pour des possibilités authentiques. EtreTemps68