Zeitlichkeit
C’est la temporalité qui sera mise en lumière comme le sens de l’étant que nous appelons Dasein. Cette mise en évidence doit se confirmer dans la ré-interprétation des structures du Dasein provisoirement mises en évidence comme modes de la temporalité. Toutefois, avec cette interprétation du Dasein comme temporalité, n’est pas apportée déjà et du même coup la réponse à la question directrice, laquelle porte sur le sens de l’êtrêtre en général. En revanche, le sol est posé pour l’obtention de cette réponse.
On l’a montré de manière sommaire : au Dasein appartient à titre de constitution ontique un être préontologique. Le Dasein est selon une guise telle que, étant, il comprend quelque chose comme l’être. Cette relation étant maintenue, il faut montrer que ce à partir de quoi le Dasein en général comprend et explicite silencieusement quelque chose comme l’être est le temps. Celui-ci doit être mis en lumière et originairement conçu comme l’horizon de toute compréhension et explicitation de l’être. Et pour faire apercevoir cela, il est besoin d’une explication originelle du temps comme horizon de la compréhension de l’être à partir de la temporalité comme être du Dasein qui comprend l’être. En même temps, la totalité de cette tâche inclut l’exigence de délimiter le concept du temps ainsi obtenu par rapport à la (18) compréhension vulgaire du temps telle qu’elle est devenue explicite dans l’interprétation déposée dans le concept traditionnel du temps, lequel se maintient d’Aristote jusqu’à Bergson et au-delà. Ce qui implique de montrer clairement que et comment ce concept du temps et la compréhension vulgaire du temps en général jaillissent de la temporalité. Ainsi son droit autonome sera-t-il restitué au concept vulgaire du temps — en opposition à la thèse de Bergson qui veut que le temps visé par là soit de l’espace. (EtreTemps5)
Temporalität
Conformément à la tendance positive de la destruction, il convient de poser d’abord la question de savoir si et dans quelle mesure, dans le cours de l’histoire de l’ontologie en général, l’interprétation de l’être a été thématiquement mise en rapport avec le phénomène du temps, et si la problématique de la temporalité nécessaire à cet effet a été — pouvait être — fondamentalement élaborée. Le premier et le seul penseur qui, durant une étape de son chemin de recherche, se soit mû dans la direction de la dimension de la temporalité, ou qui se soit laissé pousser dans cette direction par la contrainte des phénomènes, est Kant. C’est seulement si la problématique de la temporalité est fixée que l’on peut réussir à jeter la lumière dans l’obscurité de sa doctrine du schématisme. Mais sur cette voie, il est également possible de montrer pourquoi ce domaine, en ses dimensions authentiques et sa fonction ontologique centrale, devait rester fermé à Kant. Kant lui-même était tout à fait conscient de se risquer dans un domaine obscur : « Ce schématisme de notre entendement, par rapport aux phénomènes et à leur simple forme, est un art retiré dans les profondeurs de l’âme humaine, et dont il sera difficile d’arracher jamais le vrai mécanisme à la nature pour l’exposer à découvert devant les yeux » (NA: KANT, Kritik der reinen Vernunft, B 180 sq.). Ce devant quoi Kant, pour ainsi dire, recule ici, voilà ce qui doit thématiquement et fondamentalement être mis en lumière si tant est que l’expression « être » doive avoir un sens assignable. Et en fin de compte ce sont justement les phénomènes dégagés dans l’analyse suivante sous le titre de « temporalité » qui apparaîtront comme ces jugements les plus secrets de la « raison commune » dont l’analytique constitue, aux yeux de Kant, l’« affaire du philosophe ». (EtreTemps6)