pouvoir-être-en-dette

La conscience (Gewissen) est l’appel du souci, venu de l’étrang(èr)eté de l’être-au-monde (In-der-Welt-sein), qui con-voque le Dasein à son pouvoir-être-en-dette le plus propre. Le comprendre correspondant de l’ad-vocation (An-ruf) est, ainsi qu’on l’a établi, le vouloir-avoir-conscience (Gewissen). Il est exclu de mettre sans autre forme de procès l’une et l’autre de ces déterminations en harmonie avec l’explicitation vulgaire de la conscience (Gewissen). Bien plutôt semblent-elles y contredire directement. Nous qualifions l’explicitation de la conscience (Gewissen) de vulgaire, parce qu’elle s’en tient, en caractérisant le phénomène et en assignant sa « fonction », à ce que l’on connaît au titre de conscience (Gewissen), à la manière dont on la suit ou ne la suit pas. EtreTemps59

Résolution veut dire : se-laisser-pro-voquer à l’être-en-dette le plus propre. L’être-en-dette appartient à l’être du Dasein lui-même, que nous avons primairement déterminé comme (306) pouvoir-être. Le Dasein « est » constamment en-dette, cela ne peut signifier que ceci : il se tient à chaque fois dans cet être en tant qu’exister authentique ou inauthentique. L’être-en-dette n’est pas seulement une propriété permanente d’un sous-la-main constant, mais la possibilité existentielle d’être authentiquement ou inauthentiquement en-dette. Le « en-dette » n’est jamais que dans un pouvoir-être factice déterminé. Par suite, l’être-en-dette, parce qu’il appartient à l’être du Dasein, doit être conçu comme pouvoir-être-en-dette. La résolution se projette vers ce pouvoir-être, c’est-à-dire se comprend en lui. Ce comprendre, par suite, se tient dans une possibilité originaire du Dasein, et il se tient authentiquement en elle si la résolution est originairement ce qu’elle tend à être. Or nous avons dévoilé l’être originaire du Dasein pour son pouvoir-être comme être pour la mort, c’est-à-dire pour la possibilité insigne du Dasein qui a été caractérisée. Le devancement ouvre cette possibilité comme possibilité. La résolution, par conséquent, ne devient un être originaire pour le pouvoir-être le plus propre du Dasein qu’en tant que devançante. Le « pouvoir » du pouvoir-être-en-dette, la résolution ne le comprend que si elle se « qualifie » comme être pour la mort. EtreTemps62

Résolu, le Dasein assume authentiquement dans son existence le fait qu’il est le rien nul de sa nullité (Nichtigkeit). Nous avons conçu existentialement la mort comme la possibilité – plus haut caractérisée – de l’impossibilité de l’existence, c’est-à-dire comme pure et simple nullité (Nichtigkeit) du Dasein. La mort n’est pas surajoutée au Dasein lors de sa « fin », mais, en tant que souci, le Dasein est le fondement jeté (c’est-à-dire nul) de sa mort. La nullité (Nichtigkeit) qui transit originairement l’être du Dasein se dévoile à lui-même dans l’être pour la mort authentique. C’est le devancement qui rend pour la première fois l’être-en-dette manifeste à partir du fondement de l’être total du Dasein. Le souci abrite cooriginairement en soi la mort et la dette. La résolution devançante comprend pour la première fois le pouvoir-être-en-dette authentiquement et totalement, c’est-à-dire originairement (NA: L’être-en-dette appartenant originairement à la constitution d’être du Dasein doit être soigneusement distingué du status corruptionis au sens théologique. Certes, la théologie peut trouver dans l’être-en-dette existentialement déterminé une condition ontologique de sa possibilité factice. Cependant, la dette contenue dans l’idée de ce status est un endettement factice absolument spécifique. Il a son attestation propre, qui demeure fondamentalement fermée à toute expérience philosophique. L’analyse existentiale de l’être-en-dette ne prouve rien, ni pour, ni contre la possibilité du péché. En toute rigueur, on ne peut même pas dire que l’ontologie du Dasein laisse par elle-même cette possibilité en général ouverte, dans la mesure où, en tant que questionner philosophique, elle ne « sait » fondamentalement rien du péché.). EtreTemps62

Dans son ad-vocation (An-ruf), l’appel de la conscience (Gewissen) passe toute considération et tout pouvoir « mondains » du Dasein. Sans égards, il isole le Dasein sur son pouvoir-être-en-dette, qu’il lui intime d’être authentiquement. L’acuité intacte de l’isolement essentiel sur le pouvoir-être le plus propre ouvre le devancement vers la mort comme possibilité absolue. La résolution devançante prend totalement conscience (Gewissen) du pouvoir-être-en-dette en tant qu’absolu et le plus propre. EtreTemps62