machine

La traduction du latin principium par le terme nouveau Grundsatz n’est devenue usuelle qu’au début du XVIIIe siècle; c’est là, semble-t-il, un événement minime relevant de l’histoire de la langue allemande. D’autres mots devenus courants, par exemple Absicht pour intentio, Ausdruck pour expressio, Gegenstand pour objectum, Dasein pour praesentia n’ont été créés, eux aussi, qu’au XVIIIe siècle. Qui niera que ces mots allemands ne soient d’une bonne venue? Aujourd’hui plus rien ne vient ni ne se forme chez nous. Pourquoi? Parce que nous manquent les possibilités d’un commerce de pensée avec une tradition qui nous éveille et nous aide, parce qu’au lieu d’un pareil commerce nous livrons notre langage aux procédés des machines électroniques à penser et à calculer : ce dernier événement va conduire, la technique et la science contemporaines à des méthodes entièrement nouvelles et aussi à d’immenses succès, méthodes et succès qui vraisemblablement mettront fin à la pensée méditative, comme à une chose inutile et dont en conséquence on peut fort bien se passer. [GA10 65]

Ce serait ici le lieu d’examiner la définition que Hegel donne de la machine, à savoir un instrument indépendant. Du point de vue de l’instrument artisanal, cette caractérisation est exacte. Mais ainsi justement la machine n’est pas pensée à partir de l’essence de la technique, dont pourtant elle relève. Du point de vue du fonds, la machine est absolument dépendante; car elle tient son être uniquement d’une commission donnée à du commissible. [GA7, pag. 23]

Où nous voyons-nous maintenant conduits, si nous avançons d’un pas encore dans la méditation de ce qu’est l’Arraisonnement lui-même comme tel? Il n’est rien de technique, il n’a rien d’une machine. [GA7, pag. 32]

La fabrication et l’utilisation d’outils, d’instruments et de machines font partie de ce qu’est la technique. En font partie ces choses mêmes qui sont fabriquées et utilisées, et aussi les besoins et les fins auxquels elles servent. L’ensemble de ces dispositifs est la technique. Elle est elle-même un dispositif (Einrichtung), en latin un instrumentum. [GA7, pag. 10]

La menace qui pèse sur l’homme ne provient pas en premier lieu des machines et appareils de la technique, dont l’action peut éventuellement être mortelle. La menace véritable a déjà atteint l’homme dans son être. Le règne de l’Arraisonnement nous menace de l’éventualité qu’à l’homme puisse être refusé de revenir à un dévoilement plus originel et d’entendre ainsi l’appel d’une vérité plus initiale. [GA7, pag. 37]

Les machines et les appareils sont aussi peu des cas particuliers ou des espèces de l’Arraisonnement que le sont l’homme au tableau de commande ou l’ingénieur dans le bureau des constructions. Tout cela sans doute, chaque chose à sa façon, rentre dans l’Arraisonnement, soit comme partie intégrante d’un fonds, ou comme fonds, ou comme commettant, mais l’Arraisonnement n’est jamais l’essence de la technique au sens d’un genre. L’Arraisonnement est un mode « destinal » [NT: Geschickhaft, envoyé par le destin] du dévoilement, à savoir le mode provoquant. [GA7, pag. 40]