Hartmut Rosa (Resonance) – sujeito e mundo

Sacha Zilberfarb

(…) comment définir adéquatement et séparer analytiquement le « sujet » et le « monde » ? Qu’entend-elle par sujet et qu’entend-elle par monde ? Allons plus loin : une telle sociologie n’opère-t-elle pas nécessairement, entre le monde et le sujet, une dichotomie reproduisant les pires péchés du dualisme cartésien, en ceci qu’elle oppose – à l’instar de la philosophie de la conscience – un sujet supposé donné et clos et un monde (lui-même donné et clos) dont il peut faire l’expérience et dans lequel il peut agir ? Le fait est, à y regarder de plus près, que le problème du sujet, auquel se heurte la philosophie sociale depuis les Lumières, et le problème du monde – qui lui résiste tout autant alors même qu’il lui est constitutif – sont étroitement corrélés. La critique de la notion de sujet et la « mort du sujet » proclamée dans le sillage de Nietzsche et du poststructuralisme trouvent leur principal ancrage dans l’idée que rien ne vérifie l’hypothèse d’une conscience ou d’une faculté d’agir donnée avant toute « mondanité », avant toute relationalité et intersubjectivité. Mais la philosophie du sujet ne se laisse pas si simplement réduire au silence, tant il est vrai que la position contraire, qui fait de la subjectivité le simple artefact de rapports objectifs – c’est-à-dire de la pratique linguistique (la subjectivité serait le point nodal de systèmes discursifs ou l’épiphénomène d’une injonction performative) ou du câblage neuronal formé au cours de l’évolution biologique – a des difficultés à expliquer la capacité humaine à agir, la créativité et le changement social. À l’inverse, les débats qui se poursuivent depuis Kant sur la question de la réalité et de la totalité du monde, et de la possibilité de le connaître, semblent s’enliser dans la querelle qui oppose une conception réaliste, ou positiviste, qui veut que le cosmos soit donné et existe indépendamment de l’homme, et le point de vue contraire selon lequel les formes de manifestation du monde sont toujours socialement construites, autrement dit doivent se comprendre comme le résultat de productions (inter)subjectives. Il y a là une contradiction apparemment insoluble entre une théorie qui pose le sujet et fait apparaître le monde comme « construit », et la théorie inverse qui pose le monde du discours ou des dispositifs comme réalité et postule le sujet comme son résultat – ou épiphénomène – illusoire. Bien sûr, face à cela, il existe des tentatives de conceptualiser l’un et l’autre – le sujet expérimentant et le monde objectif – comme deux données ultimes, mais elles butent sur une difficulté notoire qui traverse toute l’histoire de la philosophie moderne : l’impossibilité de définir précisément ce qui les lie. Comment le sujet reconnaît-il le monde, comment procède-t-il du monde – et comment et à quoi reconnaissons-nous cela ?

[ROSA, Hartmut. Résonance. Une sociologie de la relation au monde. Tr. Sacha Zilberfarb. Paris: Éditions La Découverte, 2018, 2021]

James C. Wagner

Excertos de

Heidegger – Fenomenologia e Hermenêutica

Responsáveis: João e Murilo Cardoso de Castro

Twenty Twenty-Five

Designed with WordPress