constitution existentiale de l’être-à

L’« être-auprès » du monde en tant qu’existential ne peut en aucun cas signifier de chose survenantes. Un « être-à-côté » d’un étant nommé Dasein et d’un autre étant nommé « monde », cela n’existe pas. D’ailleurs, nous avons coutume d’exprimer parfois l’être-ensemble de deux choses sous-la-main en disant : « La table est “auprès” de la porte », « la chaise “touche” le mur ». Mais de « contact », il ne saurait ici être question en toute rigueur, non seulement parce qu’un examen plus attentif finit toujours par constater l’existence d’un espace intermédiaire entre la chaise et le mur, mais plutôt parce que la chaise ne peut fondamentalement pas toucher le mur, quand bien même l’espace intermédiaire en question s’annulerait. Pour cela, en effet, il faudrait que le mur puisse faire encontre (begegnen) « à » la chaise. Un étant ne peut toucher un étant sous-la-main à l’intérieur du monde que s’il a nativement le mode d’être de l’être-à… – que si, avec son Da-sein, lui est déjà découvert quelque chose comme un monde à partir duquel de l’étant puisse se manifester dans le contact, pour ainsi devenir accessible en son être-sous-la-main. Deux étants qui sont sous-la-main à l’intérieur du monde et, qui plus est, sont en eux-mêmes sans-monde ne sauraient se « toucher », aucun des deux ne peut « être auprès de » l’autre. Notre ajout : « et qui de surcroît sont sans-monde » ne doit pas être omis, puisque même un étant qui n’est pas sans-monde – par exemple le Dasein lui-même – est sous-la-main « dans » le monde, plus exactement peut être appréhendé avec un certain droit et dans certaines limites comme seulement sous-la-main. Ce qui exige de faire totalement abstraction de, ou ne pas apercevoir du tout la constitution existentiale de l’être-à… Néanmoins, il n’est pas question de confondre cette appréhension possible du « Dasein » comme étant, ou n’étant plus que sous-la-main, avec certain mode d’« être-sous-la-main » propre au Dasein. Ce mode, en effet, n’est plus accessible à qui fait abstraction des structures spécifiques du Dasein, mais au contraire seulement à qui les comprend d’emblée. Le Dasein (56) comprend son être le plus propre au sens d’un certain « être-sous-la-main factuel » (NA: Cf. infra, §29 (EtreTemps29), p. 134-140). Et pourtant la « factualité » du fait du Dasein propre est ontologiquement sans commune mesure avec la survenance factuelle d’une espèce minérale. La factualité propre au fait du Dasein, ce mode en lequel tout Dasein est à chaque fois, nous l’appelons sa facticité. La structure compliquée de cette déterminité (Bestimmtheit) d’être ne peut elle-même être saisie comme problème qu’à la lumière d’une élaboration préalable des constituants existentiaux fondamentaux du Dasein. Le concept de facticité inclut ceci : l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) d’un étant « intramondain », mais d’un étant capable de se comprendre comme lié en son « destin » à l’être de l’étant qui lui fait encontre à l’intérieur de son propre monde. EtreTemps12

Le propos souvent cité aujourd’hui : « l’homme a son environnement » ne peut rien signifier ontologiquement tant que cet « avoir » reste indéterminé. L’« avoir » est fondé en sa possibilité dans la constitution existentiale de l’être-à… C’est en étant essentiellement en cette (58) guise que le Dasein peut découvrir expressément l’étant qui lui fait encontre sur le mode du monde ambiant, le connaître, en disposer, avoir le « monde ». Le propos ontiquement trivial : « avoir un environnement » pose un problème ontologique. Le résoudre ne réclame rien d’autre que de déterminer d’abord l’être du Dasein de manière ontologiquement satisfaisante. Que la biologie – surtout à nouveau depuis K. E. v. Baer fasse usage de cette constitution d’être, cela n’autorise pas à taxer son usage philosophique de « biologisme ». Car la biologie, en tant que science positive, n’est pas capable elle non plus de découvrir et de déterminer cette structure – elle est obligée de la présupposer et d’en faire constamment usage. Toutefois, la structure en question ne peut être elle-même explicitée philosophiquement en tant qu’a priori de l’objet thématique de la biologie que si elle est préalablement comprise comme structure du Dasein. C’est seulement en s’orientant sur la structure ontologique ainsi conçue qu’il est possible, par voie privative, de délimiter aprioriquement la constitution d’être de la « vie ». Aussi bien ontiquement qu’ontologiquement, c’est à l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) comme préoccupation (Besorgen) que revient la primauté. Cette structure reçoit de l’analytique du Dasein son interprétation fondamentale. EtreTemps12