projet

Entwurf [SZ] entwerfen, Entwurf : projeter, projet. – D’abord 145 sq. [ETEM] Entwerfen (das) – Entwurf (der) : Projection (avec P majuscule) – projection. [ETJA] Sichentwerfen (das) : auto-Projection. [ETJA]

Pourquoi le comprendre, selon toutes les dimensions essentielles de ce qui peut être ouvert en lui, perce-t-il toujours jusqu’aux possibilités ? Parce que le comprendre a en lui-même la structure existentiale que nous appelons le projet. Il projette l’être du Dasein vers son en-vue-de-quoi tout aussi originairement que vers la significativité en tant que mondanéité de ce qui lui est à chaque fois monde. Le caractère de projet du comprendre constitue l’être-au-monde du point de vue de l’ouverture de son Là comme Là d’un pouvoir-être. Le projet est la constitution existentiale d’être de l’espace de jeu du pouvoir-être factice. Et en tant que jeté, le Dasein est jeté dans le mode d’être du projeter. Le projeter n’a rien à voir avec l’observation d’un plan conçu conformément auquel le Dasein aménagerait son être : au contraire, en tant que Dasein, il s’est à chaque fois déjà projeté et, aussi longtemps qu’il est, il est projetant. Le Dasein se comprend toujours déjà et toujours encore, aussi longtemps qu’il est, à partir de possibilités. EtreTemps31

En outre, le caractère de projet du comprendre signifie que celui-ci ne saisit pas lui-même thématiquement ce vers quoi il projette – les possibilités. Une telle saisie ôte justement au projeté son caractère de possibilité, elle le ravale au rang d’une réalité donnée, visée, alors que le projet ne s’ob-jette, et ainsi ne fait être la possibilité comme possibilité qu’autant qu’il la jette. Le comprendre est, en tant que projeter, le mode d’être du Dasein où il est ses possibilités comme possibilités. EtreTemps31

Sur le fondement du mode d’être qui est constitué par l’existential du projet, le Dasein est constamment « plus » qu’il n’est factuellement, à supposer que l’on veuille et que l’on puisse l’enregistrer en sa réalité en tant qu’étant sous-la-main. En revanche, il n’est jamais plus qu’il n’est facticement, parce que le pouvoir-être appartient essentiellement à sa facticité. Mais le Dasein, en tant qu’être-possible, n’est jamais non plus moins, s’il est vrai qu’il est existentialement ce qu’il n’est pas encore en son pouvoir-être. Et c’est seulement parce que l’être du Là reçoit sa constitution du comprendre et de son caractère de projet, parce qu’il est ce qu’il sera ou ne sera pas, qu’il peut se dire à lui-même compréhensivement : « Deviens ce que tu es ! » EtreTemps31

[146] Le projet concerne toujours la pleine ouverture de l’être-au-monde ; le comprendre, en tant que pouvoir-être, a lui-même des possibilités qui sont pré-dessinées par l’orbe de ce qui est essentiellement ouvrable en lui. Le comprendre peut se placer primairement dans l’ouverture du monde, c’est-à-dire que le Dasein peut de prime abord et le plus souvent se comprendre à partir de son monde. À moins que le comprendre ne se jette primairement dans le en-vue-de-quoi, autrement dit que le Dasein n’existe en tant que lui-même. Le comprendre est soit authentique – jaillissant du Soi-même propre comme tel – soit inauthentique. Le préfixe « in-» ne signifie pas que le Dasein se détache de son Soi-même et comprenne « seulement » le monde. Le monde appartient à son être-Soi-même en tant qu’être-au-monde. EtreTemps31

D’autre part, le comprendre authentique aussi bien qu’inauthentique peuvent derechef être véridiques ou fallacieux. Le comprendre, en tant que pouvoir-être, est radicalement transi de possibilité. Mais se transporter dans l’une de ces possibilités fondamentales du comprendre ne signifie pas dépouiller l’autre. Comme le comprendre concerne bien plutôt à chaque fois la pleine ouverture du Dasein comme être-au-monde, le fait de se transporter, pour le comprendre, est une modification existentiale du projet en son tout. Dans le comprendre du monde, l’être-à est toujours co-compris, et le comprendre de l’existence comme telle est toujours un comprendre du monde. EtreTemps31

Le comprendre, en son caractère de projet, constitue existentialement ce que nous appelons la vue du Dasein. Cette vue existentialement coprésente à l’ouverture du Là, le Dasein l’est cooriginairement selon les guises fondamentales de son être qu’on a caractérisées, c’est-à-dire la circon-spection de la préoccupation, l’égard de la sollicitude, et il l’est en tant que vue sur l’être même en-vue-de-quoi le Dasein est chaque fois comme il est (NT: La syntaxe de la phrase est délicate, mais le sens me paraît prescrire de construire ainsi : « le Dasein est la vue… en tant que vue sur l’être… » (la deuxième occurrence de « vue » fonctionnant comme attribut de la première) – autrement dit de ne pas coordonner, comme BW, « vue sur l’être » à « circon-spection » et « égard ». Bref : que ce soit selon la guise de la circon-spection ou de l’égard, le Dasein est vue, à savoir vue sur son être possible. ). La vue qui se rapporte primairement et en totalité à l’existence, nous l’appelons la translucidité. Nous choisissons ce terme pour désigner la « connaissance de soi » bien comprise, c’est-à-dire pour indiquer qu’il ne s’agit pas dans celle-ci d’une détection et d’une contemplation perceptives d’un point fixe du Soi-même, mais d’une saisie compréhensive de l’ouverture pleine de l’être-au-monde à travers ses moments constitutifs essentiels. L’existant ne « se » voit que pour autant qu’il est devenu pour soi cooriginairement translucide dans son être auprès du monde et dans l’être-avec autrui comme moments constitutifs de son existence. EtreTemps31

L’ouverture du Là dans le comprendre est elle-même une guise du pouvoir-être du Dasein. Dans l’être-projeté de son être vers le en-vue-de-quoi et, indissociablement, vers la significativité (monde), est incluse une ouverture de l’être en général. Dans le projeter vers des possibilités, la compréhension de l’être est déjà anticipée. L’être est compris dans le projet, non pas conçu ontologiquement. L’étant qui a le mode d’être du projet essentiel de l’être-au-monde a pour constituant de son être la compréhension d’être. Ce qui avait auparavant [NA: Cf. supra, §4 [EtreTemps4], p. [117] sq.] été établi dogmatiquement reçoit maintenant sa mise en lumière à partir de la constitution de l’être où le Dasein comme comprendre est son Là. Un éclaircissement satisfaisant, et conforme aux limites de toute la présente recherche, du sens existential de cette compréhension d’être ne pourra être atteint que sur la base de l’interprétation temporale de l’être. EtreTemps31

[148] Affection et comprendre caractérisent, en tant qu’existentiaux, l’ouverture originaire de l’être-au-monde. Selon la guise de l’être-intoné, le Dasein « voit » des possibilités à partir desquelles il est. C’est dans l’ouvrir projetant de telles possibilités qu’il est à chaque fois déjà intoné. Le projet du pouvoir-être le plus propre est remis au fait de l’être-jeté dans le Là. Une telle explication de la constitution existentiale de l’être du Là au sens du projet jeté ne contribue-t-elle pas à rendre l’être du Dasein énigmatique ? Assurément. Mais nous sommes tenus de laisser ressortir en sa plénitude le caractère énigmatique de cet être, ne serait-ce que pour pouvoir échouer comme il faut à le « résoudre », et réussir à poser à neuf la question de l’être de l’être-au-monde jeté-projetant. EtreTemps31

Mais comment faut-il concevoir le caractère de ce « préalable » ? Suffit-il de parler formellement d’« a priori » ? Pourquoi cette structure s’attache-t-elle au comprendre que nous [151] avons manifesté comme un existential fondamental du Dasein ? Et comment la structure de « comme », qui échoit à l’explicité comme tel, se rapporte-t-elle à elle ? De toute évidence, il est exclu de dissoudre le phénomène en « parcelles ». Mais cela revient-il à en exclure aussi toute analytique originaire ? Devons-nous nous borner à accueillir de tels phénomènes en les considérant comme des « faits derniers » ? Mais même dans ce cas, la question demeurerait de savoir : pourquoi ? Ou bien la structure de préalable du comprendre et la structure de « comme » de l’explicitation manifestent-elles une connexion ontologico-existentiale avec le phénomène du projet ? Et celui-ci même renvoie-t-il à une constitution originaire d’être du Dasein ? EtreTemps32

Dans le projet du comprendre, de l’étant est ouvert en sa possibilité. Le caractère de possibilité correspond à chaque fois au mode d’être de l’étant compris. L’étant intramondain en général est projeté vers le monde, c’est-à-dire vers un tout de significativité, dans les rapports de renvoi de laquelle la préoccupation comme être-au-monde s’est d’entrée de jeu fixée. Lorsque de l’étant intramondain est découvert avec l’être du Dasein, autrement dit lorsqu’il est venu à compréhension, nous disons qu’il a du sens. Cependant, ce qui est compris, ce n’est pas en toute rigueur le sens, mais l’étant – ou l’être. Le sens est ce en quoi la compréhensibilité de quelque chose se tient. Ce qui est articulable dans l’ouvrir compréhensif, nous l’appelons le sens. Le concept de sens embrasse la structure formelle de ce qui appartient nécessairement à ce que l’explicitation compréhensive articule. Le sens est le vers-quoi, tel que structuré par la pré-acquisition, la pré-vision et l’anti-cipation, du projet à partir duquel quelque chose devient compréhensible comme quelque chose. Dans la mesure où comprendre et explicitation forment la constitution existentiale de l’être du Là, le sens doit être conçu comme la structure formelle-existentiale de l’ouverture qui appartient au comprendre. Le sens est un existential du Dasein, non pas une propriété qui s’attache à l’étant, est « derrière » lui ou flotte quelque part comme « règne intermédiaire ». De sens, le Dasein n’en « a » que pour autant que l’ouverture de l’être-au-monde est « remplissable » par l’étant découvrable en elle. Seul le Dasein, par suite, peut être sensé ou in-sensé. Ce qui veut dire que son être propre et l’étant ouvert avec lui peut être approprié dans la compréhension ou rester interdit à l’in-compréhension. EtreTemps32

Tout a l’air d’être véritablement compris, saisi, dit, et au fond ne l’est pas – à moins qu’il n’ait l’air de ne pas l’être et qu’au fond il le soit. L’équivoque ne concerne pas seulement le mode ontique sur lequel nous disposons de l’étant accessible dans l’usage et la jouissance, mais elle s’est déjà établie dans le comprendre comme pouvoir-être, dans le mode du projet et la prédonation de possibilités du Dasein. Non seulement chacun connaît et discute ce qui est là et survient, mais encore chacun s’entend d’ores et déjà à parler de ce qui doit seulement arriver, de ce qui n’est pas là mais devrait « évidemment » être fait. D’avance, chacun a toujours déjà pressenti et senti ce que d’autres ont aussi pressenti et flairé. Cet être-sur-la-trace, et encore par ouï-dire – celui qui est « sur la trace » de quelque chose de manière authentique n’en parle pas -, est la guise la plus insidieuse en laquelle l’équivoque prédonne des possibilités du Dasein, non sans en même temps les étouffer dans l’oeuf. EtreTemps37

L’être-en-avant-de-soi comme être pour le pouvoir-être le plus propre contient la condition ontologico-existentiale de possibilité de l’être-libre vers des possibilités existentielles authentiques. C’est en vue du pouvoir-être que le Dasein est à chaque fois comme il est facticement. Mais dans la mesure où cet être pour le pouvoir-être est lui-même déterminé par la liberté, le Dasein peut aussi se comporter velléitairement vis-à-vis de ses possibilités, il peut être inauthentique, et il est de prime abord et le plus souvent facticement selon cette guise. Le en-vue-de-quoi authentique reste non-saisi, le projet du pouvoir-être de soi-même est laissé à la disposition du On. Dans l’être-en-avant-de-soi, le « soi » désigne donc à chaque fois le Soi-même au sens du On-même. Même dans l’inauthenticité, le Dasein reste essentiellement en-avant-de-soi, tout de même que la fuite échéante du Dasein devant lui-même manifeste encore la constitution d’être selon laquelle, pour cet étant, il y va de son être. EtreTemps41

La perfectio de l’homme, autrement dit le fait qu’il devienne ce qu’il peut être en son être-libre pour ses possibilités les plus propres (dans le projet), est un « achèvement » du « souci ». Mais celui-ci détermine cooriginairement le mode fondamental de cet étant, conformément auquel il est livré au monde de la préoccupation (être-jeté). L’« équivoque » de cura vise une seule constitution fondamentale selon la structure essentiellement duelle du projet jeté. EtreTemps42

3. À la constitution d’être du Dasein appartient le projet : l’être ouvrant pour son pouvoir-être. Le Dasein peut, en tant que compréhensif, se comprendre à partir du « monde » et des autres ou à partir de son pouvoir-être le plus propre. Cette dernière possibilité signifie ceci : le Dasein s’ouvre à lui-même dans et comme son pouvoir-être le plus propre. Cette ouverture authentique manifeste le phénomène de la vérité la plus originaire dans le mode de l’authenticité. L’ouverture la plus originaire et aussi la plus authentique où puisse être le Dasein comme pouvoir-être est la vérité de l’existence. C’est seulement dans le contexte d’une analyse de l’authenticité du Dasein que cette vérité recevra sa déterminité ontologico-existentiale. EtreTemps44

4. À la constitution d’être du Dasein appartient l’échéance. De prime abord et le plus souvent, le Dasein est perdu dans son « monde ». Le comprendre, en tant que projet vers les [222] possibilités d’être, s’est déporté dans cette direction. L’identification au On signifie la souveraineté de l’être-explicité public. Le découvert, l’ouvert est soumis à la dissimulation et à la fermeture du bavardage, de la curiosité et de l’équivoque. L’être pour l’étant n’est pas éteint, mais il est déraciné. L’étant n’est pas complètement retiré – il est précisément découvert, mais en même temps dissimulé ; il se montre – mais sur le mode de l’apparence. De même, ce qui avait été auparavant découvert sombre à nouveau dans la dissimulation et le retrait. Le Dasein, parce qu’il est essentiellement échéant, est, selon sa constitution d’être, dans la « non-vérité ». Ce dernier titre, tout comme l’expression d’« échéance », est ici utilisé ontologiquement. Toute « valorisation » ontiquement négative doit être tenue à l’écart de son usage analytico-existential. C’est à la facticité du Dasein qu’appartiennent la fermeture et le recouvrement. Le sens ontologico-existential plein de la proposition : « Le Dasein est dans la vérité » dit en même temps, et cooriginairement : « Le Dasein est dans la non-vérité. » Mais c’est seulement dans la mesure où le Dasein est ouvert qu’il est également fermé ; et ce n’est que pour autant qu’avec le Dasein est déjà à chaque fois découvert de l’étant intramondain que ce type d’étant est recouvert (retiré) et dissimulé dans sa possibilité d’encontre intramondaine. EtreTemps44

La condition ontologico-existentiale requise pour que l’être-au-monde soit déterminé par la « vérité » et la « non-vérité » réside dans la constitution d’être du Dasein que nous avons caractérisée comme projet jeté. Elle est un constituant de la structure du souci. EtreTemps44

La mise au jour de l’origine du « temps » « où » fait encontre l’étant intramondain, du temps comme intratemporalité, manifeste une possibilité essentielle de temporalisation de la temporalité. Ainsi se prépare la compréhension d’une temporalisation encore plus originaire de la temporalité. C’est en elle que se fonde la compréhension d’être constitutive pour l’être du Dasein. Le projet d’un sens de l’être en général peut s’accomplir dans l’horizon du temps. EtreTemps45

Il s’impose de répondre à ces questions avant de déclarer nul et non avenu, et de mettre comme tel hors circuit le problème de la totalité du Dasein. La question de la totalité du Dasein, aussi bien celle, existentielle, d’un pouvoir-être-tout possible que celle, existentiale, de la constitution d’être de la « fin » et de la « totalité » implique la tâche d’une analyse positive de phénomènes de l’existence qui ont été jusqu’ici tenus à l’écart. Au centre de telles considérations se tient la caractérisation ontologique de l’être-à-la-fin propre au Dasein et l’obtention d’un concept existential de la mort. Les recherches relatives à ce sujet se distribueront de la manière suivante : l’expérimentabilité de la mort des autres et la possibilité de saisie d’un Dasein en son tout (§47 [EtreTemps47]) ; excédent, fin et totalité (§48 [EtreTemps48]) ; la délimitation de l’analyse existentiale de la mort par rapport à des interprétations possibles du phénomène (§49 [EtreTemps49]) ; la pré-esquisse de la structure ontologico-existentiale de la mort (§50 [EtreTemps50]) ; l’être pour la mort et la quotidienneté du Dasein (§51 [EtreTemps51]) ; l’être pour la mort quotidien et le concept existential plein de la mort (§52 [EtreTemps52]) ; projet existential d’un être pour la mort authentique (§53 [EtreTemps53]). EtreTemps46

Facticement, le Dasein se tient de prime abord et le plus souvent dans un être pour la mort inauthentique. Comment la possibilité ontologique d’un être authentique pour la mort doit-elle être « objectivement » caractérisée si le Dasein, en fin de compte, ne se rapporte jamais authentiquement à sa fin, ou bien si cet être authentique, de par son sens propre, doit demeurer retiré aux autres ? Le projet d’une possibilité existentiale d’un pouvoir-être existentiel aussi problématique ne constitue-t-il pas une entreprise fantastique ? De quoi est-il besoin pour qu’un tel projet dépasse une simple construction fictive, arbitraire ? Le Dasein donne-t-il lui-même à ce projet les indications nécessaires ? Est-il possible d’emprunter au Dasein lui-même des fondements de sa légitimité phénoménale ? Et la tâche ontologique que nous énonçons maintenant peut-elle recevoir de l’analyse antérieure du Dasein des prescriptions propres à placer son propos sur une voie sûre ? EtreTemps53

Le Dasein est constitué par l’ouverture, c’est-à-dire par un comprendre affecté. Un être pour la mort authentique ne peut pas reculer devant la possibilité la plus propre, absolue, ni la recouvrir dans cette fuite, ni la ré-interpréter dans le sens de la compréhensivité du On. Par suite, le projet existential d’un être pour la mort authentique doit nécessairement dégager les moments d’un tel être qui le constituent en tant que comprendre de la mort au sens d’un être non-fuyant et non-recouvrant pour la possibilité qu’on a caractérisée. EtreTemps53

L’être pour la mort est devancement dans un pouvoir-être de l’étant dont le mode d’être est le devancement même. Dans le dévoilement devançant de ce pouvoir-être, le Dasein s’ouvre à lui-même quant à sa possibilité extrême. Mais se projeter vers son pouvoir-être le plus propre veut dire : pouvoir se comprendre soi-même dans l’être de l’étant ainsi dévoilé : [263] exister. Le devancement se manifeste comme possibilité du comprendre du pouvoir-être extrême le plus propre, c’est-à-dire comme possibilité d’existence authentique. La constitution ontologique de celle-ci doit être rendue visible grâce au dégagement de la structure concrète du devancement dans la mort. Comment s’accomplit la délimitation phénoménale de cette structure ? Manifestement, en déterminant les caractères de l’ouvrir devançant qui doivent nécessairement lui appartenir pour qu’il puisse devenir le pur comprendre de la possibilité la plus propre, absolue, indépassable, certaine et comme telle indéterminée. Mais il reste ici à considérer que le comprendre ne signifie pas primairement : fixer du regard un sens, mais se comprendre dans le pouvoir-être qui se dévoile dans le projet [NA: Cf. supra, §31 [EtreTemps31], p. [142] sq.]. EtreTemps53

Tous ces rapports, propres à l’être pour la mort, à la teneur pleine de la possibilité extrême du Dasein qui a été caractérisée trouvent leur convergence dans le fait qu’ils dévoilent, déploient et maintiennent le devancement constitué par eux en tant que possibilisation de cette possibilité. La délimitation existentialement projetante du devancement a rendu visible la possibilité ontologique d’un être existentiel authentique pour la mort. Mais du même coup, ce qui surgit, c’est la possibilité d’un pouvoir-être-tout authentique du Dasein – néanmoins seulement à titre de possibilité ontologique. Certes, notre projet existential du devancement s’en est tenu aux structures du Dasein auparavant conquises, et il a laissé, pour ainsi dire, le Dasein se projeter lui-même vers cette possibilité, sans lui représenter ou lui imposer « de l’extérieur » un idéal « concret » d’existence. Et pourtant, cet être existentialement « possible » pour la mort demeure existentiellement une suggestion fantastique. La possibilité ontologique d’un pouvoir-être-tout authentique du Dasein ne signifie rien tant que le pouvoir-être ontique correspondant n’a pas été assigné à partir du Dasein lui-même. Le Dasein se jette-t-il à chaque fois facticement dans un tel être pour la mort ? Exige-t-il, ne serait-ce que sur la base de son être le plus propre, un pouvoir-être authentique qui soit déterminé par le devancement ? EtreTemps53

L’étrang(èr)eté est le mode fondamental – cependant quotidiennement recouvert – de l’être-au-monde. Le Dasein appelle lui-même, en tant que conscience, du fond de cet être. Le « ça m’appelle » est un parler insigne du Dasein. L’appel in-toné par l’angoisse rend tout d’abord possible pour le Dasein le projet de lui-même vers son pouvoir-être le plus propre. L’appel de la conscience existentialement compris atteste pour la première fois ce qui auparavant [NA: Cf. supra, §40 [EtreTemps40], p. [189].] avait été simplement affirmé : l’étrang(èr)eté traque le Dasein et menace sa perte oublieuse d’elle-même. EtreTemps57

L’être du Dasein est le souci. Il comprend en soi la facticité (être-jeté), l’existence (projet) et l’échéance. Étant, le Dasein est jeté – il n’est pas porté à son Là par lui-même. Étant, il est déterminé comme un pouvoir-être qui s’appartient à lui-même, et qui pourtant ne s’est pas remis en propre comme lui-même. Existant, le Dasein ne passe jamais derrière son être-jeté, de telle manière qu’il puisse ne libérer à chaque fois proprement qu’à partir de son être-Soi-même et conduire au Là ce « qu’il est et a à être ». Toutefois, l’être-jeté ne se trouve pas derrière lui comme un événement factuellement arrivé et à nouveau ranimé par le Dasein – se produisant, donc, en même temps que lui -, mais le DASEIN est constamment, aussi longtemps qu’il est, en tant que souci son « que ». C’est en tant que cet étant, par la remise à qui seulement il peut exister comme l’étant qu’il est, qu’il est, en existant, le fondement de son pouvoir-être. Bien qu’il n’ait pas posé lui-même le fondement, il repose dans sa gravité, que la tonalité comme charge lui rend manifeste. EtreTemps58

Étant-fondement, c’est-à-dire existant comme jeté, le Dasein reste constamment en deçà de ses possibilités. Il n’est jamais existant avant son fondement, mais toujours seulement à partir de lui et comme tel. Être-fondement signifie par conséquent fondamentalement, n’être jamais en possession de son être le plus propre. Ce ne-pas appartient au sens existential de l’être-jeté. Étant-fondement, il est lui-même une nullité de lui-même. La nullité ne signifie nullement le ne-pas-être-sous-la-main, la non-subsistance, mais elle désigne un ne-pas qui constitue cet être du Dasein, son être-jeté. Le caractère de ne-pas de ce ne-pas se détermine existentialement : étant Soi-même, le Dasein est l’étant jeté en tant que Soi-même. Dé-laissé non pas par soi-même, mais à soi-même à partir du fondement, pour être comme tel. Si le [285] Dasein est lui-même le fondement de son être, ce n’est pas pour autant que celui-ci provient seulement d’un projet propre – mais c’est en tant qu’être-Soi-même qu’il est l’être du fondement. Celui-ci est toujours seulement fondement d’un étant dont l’être a à assumer l’être-fondement. EtreTemps58

Le Dasein est en existant son fondement, c’est-à-dire de telle manière qu’il se comprend à partir de possibilités, et, se comprenant ainsi, est l’étant jeté. Or cela implique que, pouvant-être, il se tient à chaque fois dans l’une ou l’autre possibilité, que constamment il n’est pas une autre, et qu’il a renoncé à elle dans le projet existentiel. Le projet n’est pas seulement déterminé, en tant qu’à chaque fois jeté, par la nullité de l’être-fondement, mais, en tant que projet, il est lui-même essentiellement nul. Cette détermination, derechef, ne désigne nullement la propriété ontique du « sans succès » ou « sans valeur », mais un constitutif existential de la structure d’être du projeter. La nullité visée appartient à l’être-libre du Dasein pour ses possibilités existentielles. Seulement, la liberté n’est que dans le choix de l’une, autrement dit dans l’assomption du n’avoir-pas-choisi et du ne-pas-non-plus-pouvoir-avoir-choisi l’autre. EtreTemps58

Dans la structure de l’être-jeté aussi bien que dans celle du projet est essentiellement contenue une nullité, et c’est elle qui est le fondement de la possibilité de la nullité du Dasein inauthentique dans l’échéance où il se trouve à chaque fois et toujours facticement. En son essence, le souci lui-même est transi de part en part de nullité. Le souci – l’être du Dasein – signifie ainsi, en tant que projet jeté : l’être-fondement (nul) d’une nullité. Autrement dit : le Dasein est comme tel en-dette, si tant est que demeure la détermination existentiale formelle de la dette comme être-fondement d’une nullité. EtreTemps58

L’appel est appel du souci. L’être-en-dette constitue l’être que nous appelons souci. Dans l’étrang(èr)eté, le Dasein se rassemble originairement avec lui-même. Elle transporte cet [287] étant devant sa nullité non-dissimulée, laquelle appartient à la possibilité de son pouvoir-être le plus propre. Dans la mesure où il y va pour le Dasein – comme souci – de son être, il se convoque lui-même – en tant que On factice-écheant – à son pouvoir-être depuis l’étrang(èr)eté. L’appel est rappel qui pro-voque ; qui pro-voque : à la possibilité d’assumer soi-même en existant l’étant jeté qu’il est ; il est rappel : à l’être-jeté, afin de comprendre celui-ci comme le fondement nul qu’il a à assumer dans l’existence. Le rappel pro-vocant de la conscience donne au Dasein à comprendre qu’il doit – à titre de fondement nul de son projet nul se tenant dans la possibilité de son être – se ramener de la perte dans le On vers lui-même, autrement dit qu’il est en-dette. EtreTemps58

Avec l’élaboration de la résolution comme un se-projeter ré-ticent, prêt à l’angoisse, vers l’être-en-dette le plus propre, notre recherche est devenue capable de délimiter le sens ontologique de ce pouvoir-être-tout authentique du Dasein dont elle était en quête. Désormais, l’authenticité du Dasein n’est ni un titre vide, ni une idée fictive. Néanmoins, l’être pour la mort authentique que nous avons existentialement déduit en le manifestant comme pouvoir-être-tout authentique demeure encore un projet purement existential, auquel l’attestation propre du Dasein fait défaut. C’est seulement si celle-ci est trouvée que la recherche peut satisfaire à la tâche exigée par sa problématique, d’une mise en lumière d’un pouvoir-être-tout du Dasein existentialement confirmé et clarifié ; comme c’est seulement si cet étant est devenu phénoménalement accessible en son authenticité et totalité que la question du sens de l’être de cet étant à l’existence duquel appartient la compréhension de l’être en général aura atteint un sol ferme. EtreTemps60

Un pouvoir-être-tout authentique du Dasein a été existentialement projeté. L’explicitation [302] du phénomène a dévoilé l’être authentique pour la mort comme devancement [NA: Cf. supra, §58 [EtreTemps58], p. [280] sq.]. Dans son attestation existentielle, le pouvoir-être authentique du Dasein a été mis au jour comme résolution et en même temps interprété existentialement. Comment l’un et l’autre phénomènes doivent-ils être rapprochés ? Le projet ontologique du pouvoir-être-tout authentique n’a-t-il pas conduit dans une dimension du Dasein qui est fort éloignée du phénomène de la résolution ? Qu’est-ce que la mort doit avoir de commun avec la « situation concrète » de l’agir ? La tentative d’accoupler à toute force la résolution et le devancement ne nous égare-t-elle pas dans une construction insoutenable, absolument non-phénoménologique, qui ne peut même plus revendiquer le caractère d’un projet ontologique phénoménalement fondé ? EtreTemps61

Mais à l’inverse, c’est seulement l’interprétation de la « connexion » entre résolution et devancement qui a pu atteindre la pleine compréhension existentiale du devancement lui-même. Jusqu’alors, celui-ci ne pouvait valoir que comme projet ontologique. Maintenant, il est apparu au contraire que le devancement n’est pas une possibilité inventée et imposée au Dasein, mais le mode d’un pouvoir-être existentiel attesté dans le Dasein, mode qu’il s’intime pour autant que, en tant que résolu, il se comprend authentiquement. Le devancement n’« est » pas en tant que comportement flottant en l’air, mais il doit nécessairement être conçu comme la possibilité, abritée dans la résolution existentiellement attestée, et ainsi co-attestée, de son authenticité. L’authentique « pensée de la mort » est le vouloir-avoir-conscience qui s’est rendu existentiellement translucide. EtreTemps62

Par suite, le mode d’être du Dasein requiert d’une interprétation ontologique qui s’est donné pour but l’originarité de la mise en lumière phénoménale qu’elle conquière l’être de cet étant contre sa propre tendance au recouvrement. Selon les prétentions, ou plus précisément selon la suffisance de l’« évidence » rassurée de l’explicitation quotidienne, l’analyse existentiale a donc constamment un caractère de violence, caractère qui, s’il marque de façon privilégiée l’ontologie du Dasein, ne s’en attache pas moins à toute interprétation dans la [312] mesure où la compréhension qui se configure en elle a la structure du projeter. Seulement, celui-ci n’exige-t-il pas un guidage et une régulation propre ? Où donc les projets ontologiques prendront-ils l’évidence de l’adéquation phénoménale de leur « données » ? L’interprétation ontologique projette un étant prédonné vers l’être qui lui est propre, afin de le porter au concept en sa structure. Mais où se trouvent les indicateurs de la direction du projet, pourtant nécessaires pour qu’elle atteigne en général l’être ? Où sont-ils, si l’étant qui devient thématique pour l’analytique existentiale va même jusqu’à retirer, dans sa guise d’être, l’être qui lui appartient ? Le traitement de ces questions devra d’abord se restreindre à la clarification – par elles exigée – de l’analytique du Dasein. EtreTemps63

Certes, mais où faut-il aller chercher ce qui constitue l’existence « authentique » du Dasein ? Sans une compréhension existentielle, toute analyse de l’existentialité demeure bel et bien dépourvue de sol. N’y a-t-il pas, à la base de l’interprétation exposée de l’authenticité et de la totalité du Dasein, une conception ontique de l’existence, qui, en tout état de cause, ne saurait être obligatoire pour tout un chacun ? Jamais l’interprétation existentiale ne prétendra faire acte d’autorité sur des possibilités et des obligations existentielles – mais n’est-elle pas quand même tenue de se justifier quant aux possibilités existentielles qui lui servent à fournir à l’interprétation ontologique son sol ontique ? Si l’être du Dasein est essentiellement pouvoir-être et être-libre pour ses possibilités les plus propres, et s’il n’existe jamais que dans la liberté pour elles – ou dans la non-liberté vis-à-vis d’elles -, l’interprétation ontologique peut-elle faire autrement que de poser à son fondement des possibilités ontiques (des guises du pouvoir-être) et de projeter celles-ci vers leur possibilité ontologique ? Et s’il est vrai que le Dasein, le plus souvent, s’explicite à partir de sa perte dans la préoccupation pour le « monde », la détermination des possibilités ontico-existentielles conquise à contre-courant de cette tendance et l’analyse existentiale fondée sur cette détermination n’est-elle pas la seule [313] manière d’ouvrir cet étant qui lui soit adéquate ? La violence du projet ne devient-elle pas alors libération de la réalité phénoménale non-déguisée du Dasein ? EtreTemps63

Mais d’autre part, même si le projet ontico-ontologique du Dasein vers son pouvoir-être-tout authentique n’a rien de quelconque, suffit-il déjà à justifier l’interprétation existentiale qui a pris ce phénomène pour base ? Où cette interprétation prend-elle son fil conducteur, sinon dans une idée « présupposée » de l’existence en général ? Comment les démarches de l’analyse de la quotidienneté inauthentique se réglaient-elles, sinon sur ce concept préalable de l’existence ? Et quand nous disons que le Dasein « échoit », et qu’il faut par conséquent lui disputer, contre cette tendance d’être, l’authenticité de son pouvoir-être, dans quelle perspective parlons-nous ? Tout n’est-il pas d’ores et déjà éclairé, quoique de manière crépusculaire, par la lumière de l’idée « présupposée » d’existence ? Mais d’où celle-ci tire-t-elle sa légitimité ? Le premier projet qui l’indiquait était-il dépourvu de tout guide ? Nullement. EtreTemps63

Certes nous avions montré, dès notre analyse de la structure du comprendre en général, que ce qui est couramment blâmé sous le titre impropre de « cercle » appartient en réalité à l’essence et au privilège du comprendre lui-même [NA: Cf. supra, §32 [EtreTemps32], p. [152] sq.]. Néanmoins, la recherche se doit désormais, dans la perspective de la clarification de la situation herméneutique de la problématique fondamental-ontologique, d’en revenir explicitement à l’« argument du cercle » en effet, « l’objection du cercle » opposée à l’interprétation existentiale veut dire ceci : l’idée de l’existence et de l’être en général est « présupposée », et c’est « d’après » elle que le Dasein est interprété, afin d’obtenir par là l’idée de l’être. Seulement, que veut dire « présupposer » ? Est-ce qu’avec cette idée de l’existence une proposition de base est posée, à partir de laquelle nous déduirions, conformément aux règles formelles du raisonnement, d’autres propositions relatives à l’être du Dasein ? Ou bien ce pré-supposer n’a-t-il pas plutôt le caractère du projeter compréhensif, de telle sorte que l’interprétation qui configure ce [315] comprendre donne justement pour la première fois la parole à l’étant à expliciter lui-même, afin qu’il décide de lui-même s’il fournira, en tant que cet étant, la constitution d’être en direction de laquelle il fut ouvert, de manière formelle-indicative, dans le projet ? Un étant peut-il en général venir autrement à la parole quant à son être ? S’il est impossible d’« éviter », dans l’analytique existentiale, un « cercle » dans la preuve, c’est parce qu’elle ne prouve absolument pas d’après les règles de la « logique de la conséquence ». Ce que l’entendement, s’imaginant ainsi satisfaire à la suprême rigueur de la recherche scientifique, souhaite éliminer en évitant le « cercle », n’est rien moins que la structure fondamentale du souci. Originairement constitué par celui-ci, le Dasein est à chaque fois déjà en-avant-de-soi-même. Étant, il s’est à chaque fois déjà projeté vers des possibilités déterminées de son existence, et, dans de tels projets existentiels, il a déjà co-projeté préontologiquement quelque chose comme l’existence et l’être. Est-il alors possible de refuser ce projeter essentiel au Dasein à la recherche qui, étant comme toute recherche elle-même un mode d’être du Dasein ouvrant, cherche à configurer et à porter au concept la compréhension d’être qui appartient à l’existence ? EtreTemps63

Qu’est-ce qui est ontologiquement cherché sous le nom de sens du souci ? Que signifie [324] sens ? La recherche a déjà rencontré ce phénomène dans le cadre de l’analyse du comprendre et de l’explicitation [NA: Cf. supra, §32 [EtreTemps32], p. [148] sq. notamment p. [151] sq.]. D’après cette analyse, le sens est ce où se tient la compréhensibilité de quelque chose, sans que cette chose vienne elle-même expressément et thématiquement au regard. Le sens signifie le vers-où du projet primaire à partir duquel quelque chose peut être conçu comme ce qu’il est en sa possibilité. Le projeter ouvre des possibilités, autrement dit quelque chose qui rend possible. EtreTemps65

Libérer le vers-où d’un projet signifie ouvrir ce qui rend possible le projeté. Cette libération exige méthodiquement d’accompagner le projet qui est sous-jacent – le plus souvent implicitement – à une explicitation de telle manière que ce qui est projeté dans le projet devienne ouvert et saisissable en son vers-quoi. Dégager le sens du souci, cela signifiera donc : accompagner le projet qui est à la base de, et qui guide l’interprétation existentiale originaire du Dasein, de telle manière que le vers-quoi de son projeté devienne visible. Le projeté est l’être du Dasein, à savoir en tant qu’ouvert en ce qui le constitue comme pouvoir-être-tout authentique. Le vers-quoi de ce projeté, de l’être ouvert ainsi constitué, est ce qui possibilise cette constitution même de l’être comme souci. Avec la question du sens du souci, il est donc demandé ceci : qu’est-ce qui possibilise la totalité du tout structurel articulé du souci en l’unité de son articulation déployée ? EtreTemps65

Le sens, entendu rigoureusement, signifie le vers-quoi du projet primaire de la compréhension de l’être. L’être-au-monde ouvert pour lui-même comprend, cooriginairement à l’être de l’étant qu’il est lui-même, l’être de l’étant découvert à l’intérieur du monde, même si c’est encore de manière non thématique et sans différenciation de ses modes primaires, qui sont l’existence et la réalité. Toute expérience ontique de l’étant, le calcul circon-spect de l’à-portée-de-la-main aussi bien que le connaître positivement scientifique du sous-la-main, se fondent dans des projets à chaque fois plus ou moins transparents de l’être de l’étant considéré. Mais ces projets abritent en eux un vers-quoi, dont le comprendre de l’être se nourrit pour ainsi dire. EtreTemps65

Lorsque nous disons : l’étant « a du sens », cela signifie : il est devenu accessible dans son être, lequel n’a « à proprement parler » de sens que projeté vers son vers-quoi. Si l’étant « a » du sens, c’est seulement parce que, d’emblée ouvert en tant qu’être, il devient compréhensible dans le projet de l’être, c’est-à-dire à partir du vers-quoi de celui-ci. C’est le [325] projet primaire du comprendre de l’être qui « donne » le sens. La question du sens de l’être d’un étant fait du vers-quoi du comprendre d’être sous-jacent à tout être de l’étant son thème propre. EtreTemps65

Le projeté du projet existential originaire de l’existence s’est dévoilé comme résolution devançante. Qu’est-ce qui rend possible cet être-tout authentique du Dasein quant à l’unité de son tout structurel articulé ? Si on la saisit de manière formellement existentiale, et sans désigner maintenant constamment sa teneur structurelle pleine, la résolution devançante est l’être pour le pouvoir-être insigne le plus propre. Or cela n’est possible qu’autant que le Dasein peut en général advenir à soi en sa possibilité la plus propre, et que, en ce se-laisser-advenir-à-soi, il soutient la possibilité comme possibilité – c’est-à-dire existe. Or le se-laisser-advenir-à-soi dans la possibilité qui soutient celle-ci est le phénomène originaire de l’avenir. Si à l’être du Dasein appartient l’être authentique ou inauthentique pour la mort, celui-ci n’est possible que comme avenant au sens qu’on vient d’indiquer, et qui reste à déterminer de plus près. L’« avenir », ici, ne désigne pas un « maintenant » qui n’est pas encore devenu « effectif » et qui ne le sera qu’un jour, mais la venue en laquelle le Dasein advient à soi en son pouvoir-être le plus propre. Le devancement rend le Dasein authentiquement avenant, de telle manière cependant que le devancement n’est lui-même possible que pour autant que le Dasein en tant qu’étant advient en général toujours déjà à soi, c’est-à-dire est en général avenant en son être. EtreTemps65

À ces questions, il faut répondre par l’affirmative. Et pourtant, elles ne contiennent aucune objection contre la finitude de la temporalité originaire – pour la bonne raison qu’elles ne parlent absolument plus de celle-ci. La question n’est point de savoir ce qui peut encore se produire « dans la suite du temps » et quelle sorte de laisser-advenir-à-soi-même peut encore faire encontre « depuis ce temps », mais de savoir comment l’advenir-à-soi est lui-même originairement déterminé en tant que tel. Sa finitude ne signifie pas primairement une cessation, mais elle est un caractère de la temporalisation elle-même. L’avenir originaire et authentique est le à-soi – à soi qui existe comme la possibilité indépassable de la nullité. Le caractère ekstatique de l’avenir originaire réside précisément en ce qu’il clôt le pouvoir-être, autrement dit est lui-même clos, et, comme tel, rend possible le comprendre existentiel dé-clos [résolu] de la nullité. L’advenir-à-soi originaire et authentique est le sens de l’exister dans la nullité le plus propre. Énonçant la thèse de la finitude originaire de la temporalité, on ne conteste nullement que « le temps continue », mais l’on cherche uniquement à maintenir ce caractère phénoménal de la temporalité originaire, qui se manifeste dans le projeté du projet existential originaire du Dasein lui-même. EtreTemps65

L’enracinement du présent dans l’avenir et l’être-été est la condition temporalo-existentiale de possibilité permettant à ce qui est projeté dans le comprendre de la compréhension circon-specte d’être rapproché dans un présentifier, mais cela de telle sorte que le présent doit alors se rendre adéquat à ce qui fait encontre dans l’horizon du conserver attentif, c’est-à-dire l’expliciter dans le schème de la structure de comme. Ainsi la réponse est-elle apportée à la question posée antérieurement, de savoir si la structure de comme se tient dans une connexion ontologico-existentiale avec le phénomène du projet [NA: Cf. supra, §32 [EtreTemps32], p. [151]]. Tout comme le comprendre et l’expliciter en général, le « comme » se fonde dans l’unité ekstatico-horizontale de la temporalité. Lors de notre analyse fondamentale de l’être, qui sera conduite en liaison avec l’interprétation du « est » « exprimant » en tant que copule l’advocation de quelque chose comme quelque chose, nous devrons prendre à nouveaux frais le phénomène du « comme » pour thème et délimiter existentialement le concept de « schème ». EtreTemps69

L’exemple classique du développement historique d’une science, mais en même temps aussi de sa genèse ontologique, est la formation de la physique mathématique. Ce qui est décisif dans sa formation ne réside ni dans le prix plus élevé attaché à l’observation des « faits », ni dans l’« application » de la mathématique dans la détermination des processus naturels – mais dans le projet mathématique de la nature elle-même. Ce projet découvre préalablement un étant constamment sous-la-main (matière) et ouvre l’horizon requis pour la considération directrice de ses moments constitutifs quantitativement déterminables (mouvement, force, lieu et temps). C’est seulement « à la lumière » d’une nature ainsi projetée que quelque chose comme un « fait » peut être trouvé et pris pour base d’une tentative régulativement délimitée par le projet. La « fondation » de la « science des faits » n’est devenue possible que pour autant que les chercheurs ont compris qu’il n’y a fondamentalement pas de « simples faits ». Derechef, dans le projet mathématique de la nature, ce qui est primairement décisif n’est point le mathématique comme tel, mais le fait que ce projet ouvre un a priori. Aussi bien, le caractère paradigmatique de la science mathématique de la nature ne consiste-t-il pas non plus dans son exactitude spécifique et son caractère obligatoire pour « tous », mais dans le fait que l’étant thématique y est découvert comme de l’étant peut être seulement découvert : dans le projet préalable de sa constitution d’être. Avec l’élaboration conceptuelle fondamentale de la compréhension directrice d’être se déterminent les fils conducteurs des méthodes, la structure de la conceptualité, la possibilité spécifique de vérité et de certitude, le type de fondation et de preuve, le mode d’obligation et [363] le type de communication. Le tout de ces moments constitue le concept existential plein de la science. EtreTemps69

Le projet scientifique de l’étant qui fait à chaque fois déjà encontre d’une manière ou d’une autre fait comprendre son mode d’être expressément, et cela de telle sorte que du même coup deviennent manifestes les voies possibles conduisant à la pure découverte de l’étant intramondain. Le tout de ce projeter, auquel appartiennent l’articulation de la compréhension d’être, la délimitation – guidée par elle – du domaine réal et la pré-esquisse de la conceptualité adéquate à l’étant, nous le nommons la thématisation. Elle vise à une libération de l’étant rencontré à l’intérieur du monde permettant à celui-ci de s’« ob-jeter » à un pur découvrir, c’est-à-dire de devenir objet. La thématisation objective. Elle ne « pose » pas tout d’abord l’étant, mais le libère de telle manière qu’il devient « objectivement » interrogeable et déterminable. L’être objectivant auprès du sous-la-main intramondain a le caractère d’une présentification privilégiée [NA: La thèse selon laquelle toute connaissance tend à l’« intuition » a le sens temporel suivant : tout connaître est présentifier. Toute science, ou même toute connaissance philosophique tend-elle à un présentifier ? La question doit demeurer encore indécise. – HUSSERL utilise l’expression « présentifier » pour caractériser la perception sensible : cf. Recherches logiques, 1ère éd., 1901, t. II, p. 588 et 620. Une telle détermination « temporelle » du phénomène ne pouvait pas ne pas s’imposer à l’analyse intentionnelle de la perception et de l’intuition. Que et comment l’intentionnalité de la « conscience » se fonde sinon à son tour dans la temporalité ekstatique du Dasein, c’est ce que montrera notre prochaine section.]. Celle-ci se distingue avant tout du présent de la circon-spection en ceci que la découverte de la science concernée est uniquement attentive à l’être-découvert du sous-la-main. Ce s’attendre à l’être-découvert se fonde existentiellement en une résolution du Dasein par laquelle il se projette vers le pouvoir-être dans la « vérité ». Ce projet est possible parce que l’être-dans-la-vérité constitue une détermination d’existence du Dasein. Nous n’avons pas à poursuivre ici plus avant l’origine de la science à partir de l’existence authentique. Tout ce qu’il convient actuellement de comprendre, c’est que, et comment la thématisation de l’étant intramondain a pour présupposition la constitution fondamentale du Dasein, l’être-au-monde. EtreTemps69

Pour que devienne possible la thématisation du sous-la-main, le projet scientifique de la nature, le Dasein doit nécessairement transcender l’étant thématisé. La transcendance ne consiste pas dans l’objectivation, c’est celle-ci qui présuppose celle-là. Mais si la [364] thématisation du sous-la-main intramondain est un virage de la préoccupation circon-spectivement découvrante, alors il faut qu’une transcendance du Dasein se trouve déjà au fondement de l’être « pratique » auprès de l’à-portée-de-la-main. EtreTemps69

Même si de multiples structures du Dasein demeurent encore obscures dans leur détail, il semble bien qu’avec la mise au jour de la temporalité comme condition originaire de possibilité du souci, l’interprétation originaire requise du Dasein soit atteinte. La temporalité a été dégagée par rapport au pouvoir-être-tout authentique du Dasein ; après quoi, l’interpréta-tion temporelle du souci s’est confirmée grâce à la monstration de la temporalité de l’être-au-monde préoccupé. L’analyse du pouvoir-être-tout authentique a dévoilé la connexion cooriginaire – enracinée dans le souci – entre mort, dette et conscience. Le Dasein peut-il être compris encore plus originairement que dans le projet de son existence authentique ? EtreTemps72

Le fil conducteur pour la construction existentiale de l’historialité nous est offert par l’interprétation précédemment accomplie du pouvoir-être-tout authentique du Dasein et par l’analyse, qui en était issue, du souci comme temporalité. Le projet existential de l’historialité du Dasein porte simplement au dévoilement ce qui se trouve déjà à l’état voilé dans la temporalisation de la temporalité. Conformément à l’enracinement de l’historialité dans le souci, le Dasein existe à chaque fois en tant qu’authentiquement ou inauthentiquement historial. Ce qui était pris en vue comme horizon prochain par l’analytique existentiale du Dasein sous le titre de quotidienneté se clarifie comme historialité inauthentique du Dasein. EtreTemps72

La résolution a été déterminée comme le se-projeter ré-ticent, prêt à l’angoisse, vers l’être-en-dette propre [NA: Cf. supra, §60 [EtreTemps60], p. [295] sq.]. Elle conquiert son authenticité en tant que résolution devançante [NA: Cf. supra, §62 [EtreTemps62], p. [305]]. Dans celle-ci, le Dasein se comprend de telle sorte quant à son pouvoir-être qu’il comparait devant la mort, afin d’assumer ainsi totalement l’étant qu’il est lui-même en son être-jeté. L’assomption résolue du « Là » propre factice signifie en même temps la décision pour la situation. Ce pour quoi le Dasein se décide à chaque fois facticement, l’analyse existentiale [383] est fondamentalement incapable de l’élucider, aussi bien la présente recherche n’exclut-elle pas moins de son champ le projet existential de possibilités factices de l’existence. Néanmoins, nous devons nous demander d’où en général peuvent être puisées les possibilités vers lesquelles le Dasein se projette facticement. Le se-projeter devançant vers la possibilité indépassable de l’existence, la mort, garantit seulement la totalité et l’authenticité de la résolution. Cependant, les possibilités facticement ouvertes de l’existence ne sauraient être empruntées à la mort, et cela d’autant moins que le devancement vers la possibilité ne signifie point une spéculation sur celle-ci, mais justement un retour vers le Là factice. Serait-ce alors que l’assomption de l’être-jeté du Soi-même dans son monde ouvrirait un horizon auquel l’existence arrache ses possibilités factices ? Et n’avons-nous pas dit, de surcroît, que le Dasein ne pouvait revenir en deçà de son être-jeté ? [Cf. supra, p. [284]] Mais avant de décider précipitamment si le Dasein puise ou non ses possibilités authentiques d’existence dans l’être-jeté, nous devons nous assurer du concept plein de cette déterminité fondamentale du souci. EtreTemps74

L’interprétation existentiale de l’historialité du Dasein ne cesse, insensiblement, de s’enfoncer dans l’ombre. De telles obscurités peuvent d’autant moins être éliminées que les dimensions possibles d’un questionner authentique ne sont elles-mêmes déjà pas débrouillées, et que, en elles, c’est l’énigme de l’être et (comme il est maintenant devenu clair) du mouvement qui est à l’oeuvre. Néanmoins, un projet de la genèse ontologique de l’histoire comme science à partir de l’historialité du Dasein peut être risqué. Il servira de préparation à la clarification – que nous aurons à accomplir dans la suite – de la tâche d’une destruction historique de l’histoire de la philosophie [NA: Cf. supra, §6 [EtreTemps6], p. [19] sq.]. EtreTemps75

L’idée de l’enquête historique comme science implique qu’elle se soit saisie de l’ouverture de l’étant historial comme d’une tâche propre. Toute science se constitue primairement par la thématisation. Ce qui, dans le Dasein comme être-au-monde ouvert, est connu préscientifiquement est projeté vers son être spécifique. Avec un tel projet se délimite la région de l’étant considéré. Les accès à lui reçoivent ainsi leur « direction » méthodique, la structure de la conceptualité de l’explicitation obtient ainsi sa pré-esquisse. Si, réservant la question de la possibilité d’une « histoire du présent », nous assignons pour tâche à l’enquête historique l’ouverture du « passé », la thématisation historique de l’histoire n’est alors possible que si en général du « passé » est à chaque fois déjà ouvert. Même abstraction faite de la question de savoir si sont disponibles des sources suffisantes pour une re-présentation du passé, il faut bel et bien qu’en général le chemin vers lui soit en général ouvert pour que le retour historique vers lui soit possible. Or le sens de telles requêtes et la possibilité d’y satisfaire sont rien moins qu’évidents. EtreTemps76

Le Dasein existe comme un étant pour lequel, en son être, il y va de cet être même. Essentiellement « en-avant-de soi » il s’est projeté, avant toute simple considération après coup de soi-même, vers son pouvoir-être. Dans le projet, il est dévoilé comme jeté. Remis par le jet au « monde », il échoit contre lui dans la préoccupation. En tant que souci, c’est-à-dire existant dans l’unité du projet échéant-jeté, cet étant est ouvert comme Là. Étant-avec autrui, il se tient dans un être-explicité médiocre qui est articulé dans le parler et ex-primé dans la parole. L’être-au-monde s’est toujours déjà ex-primé, et, en tant qu’être auprès de l’étant qui lui fait encontre à l’intérieur du monde, il s’ex-prime constamment dans l’advocation et la discussion de l’étant même dont il se préoccupe. La préoccupation circon-spectivement compréhensive se fonde dans la temporalité, et cela sur le mode du présentifier qui s’attend et conserve. En tant que, dans sa préoccupation, il calcule, planifie, pourvoit et prévient, il dit toujours déjà, que ce soit à haute voix ou non : « alors », cela doit arriver ; « d’abord », ceci doit être réglé ; « maintenant », il faut rattraper ce qui « alors » avait échoué et échappé. EtreTemps79

Qu’est-ce donc qui appartient essentiellement à une telle databilité, et où se fonde celle-ci ? Mais, dira-t-on, est-il possible de poser une question plus superflue que celle-là ? Car avec le « maintenant que », nous visons bel et bien « notoirement » un « point temporel » ! Le « maintenant » est temps. Incontestablement, nous comprenons non seulement le « maintenant que » et les « alors que », mais encore nous comprenons qu’ils sont liés « au temps ». Oui, mais qu’ils désignent le « temps » « lui-même » comment cela est possible et ce que « temps » veut dire, tout cela, pour autant, n’est point déjà conçu avec la compréhension « naturelle » du « maintenant », etc. Et même, est-il donc si « évident » que nous « comprenions sans autre forme de procès » et ex-primions si « naturellement » quelque chose comme le « maintenant », le « alors » (futur) et le « alors » (passé) ? D’où prenons-nous ces « maintenant, que… » ? Les aurions-nous trouvés parmi l’étant intramondain, parmi le sous-la-main ? Manifestement non. Et les avons-nous même en général trouvés ? Avons-nous formé le projet de les chercher et de les constater ? « En tous temps » nous en disposons, sans les avoir expressément faits nôtres, constamment nous en faisons usage, quoique non toujours à haute voix. La plus triviale et quotidienne des expressions, par exemple : « il fait froid » vise conjointement un « maintenant que… ». Or pourquoi le Dasein, dans l’advocation de ce dont il se préoccupe, ex-prime-t-il conjointement, quoique le plus souvent en silence, un « maintenant que… » ou un « alors que… » ? Réponse : parce que l’advocation explicitante de… s’ex-prime conjointement elle-même, c’est-à-dire l’être circon-spectivement [408] compréhensif auprès de l’à-portée-de-la-main qui laisse faire encontre celui-ci en le découvrant, et parce que cet advoquer et ce discuter qui se co-explicite se fonde dans un présentifier et n’est possible que comme tel [NA: Cf. supra, §33 [EtreTemps33], p. [154] sq.]. EtreTemps79

Si le s’attendre, se comprenant dans le « alors » (futur), s’explicite, et, en tant que présentifier de ce à quoi il s’attend, se comprend à partir de son « maintenant », cela signifie que l’« indication » du « alors » (futur) contient déjà le « et maintenant pas encore ». Le s’attendre présentifiant comprend le « jusque là ». L’expliciter articule ce « jusque » (à savoir : « jusqu’à ce qu’il y ait le temps ») comme l’entre-temps, lequel a lui-même aussi bien son rapport de datation : car ce rapport vient à l’expression dans le « pendant ce temps ». Derechef, la préoccupation peut articuler attentivement le « pendant » en fournissant de nouvelles indications d’« alors » (futurs). Le « jusque » est subdivisé par un certain nombre de « depuis tel moment – jusqu’à tel moment », qui cependant sont « enveloppés » dans le projet attentif du « alors » primaire. Avec le comprendre attentif-présentifiant du « pendant », c’est le « durant » qui est articulé. Et cette « durée », à nouveau, est le temps manifeste dans le s’expliciter de la temporalité, temps qui est ainsi à chaque fois compris non-thématiquement dans la préoccupation comme « laps de temps ». Mais si le présentifier attentif-conservant « ex »-plicite un « durant » é-tendu, c’est uniquement parce qu’il est alors ouvert à soi comme l’être-é-tendu ekstatique de la temporalité historiale (quoique non connue comme telle). Or ici, justement, se manifeste une nouvelle spécificité du temps « indiqué » : non seulement le « durant » est tendu, mais encore tout « maintenant » et tout « alors » (futur ou passé) possède à chaque fois, avec la structure de databilité, une é-tendue d’« étendue » variable : « maintenant » : à la pause, au repas, le soir, en été ; « alors » (futur) : au petit déjeuner, lors d’une ascension, etc. EtreTemps79

Quelque chose comme l’« être » est ouvert dans la compréhension de l’être, qui, en tant que comprendre, appartient au Dasein existant. L’ouverture préalable, quoique non conceptuelle, de l’être rend possible que le Dasein, en tant qu’être-au-monde existant, se rapporte à de l’étant – aussi bien à celui qui lui fait encontre à l’intérieur du monde qu’à lui-même, qui existe. Comment un comprendre ouvrant de l’être est-il en général possible à la mesure du Dasein ? La question peut-elle trouver sa réponse grâce à un retour à la constitution d’être originaire du Dasein qui comprend l’être ? La constitution ontologico-existentiale de la totalité du Dasein se fonde dans la temporalité. Par suite, il faut qu’une guise de temporalisation originaire de la temporalité ekstatique possibilise elle-même le projet ekstatique de l’être en général. Comment ce mode de temporalisation de la temporalité doit-il être interprété ? Un chemin conduit-il du temps originaire au sens de l’être ? Le temps lui-même se manifeste-t-il comme horizon de l’être ? EtreTemps83