On se souviendra que, dès 1919, Heidegger avait mis l’accent sur la structure intentionnelle spécifique du « vécu du questionnement » (Frageerlebnis). Même si entre-temps sa terminologie a changé — de l’analyse d’un vécu nous passons à l’analyse d’un comportement (Verhalten) — l’exigence d’une analyse phénoménologique, c’est-à-dire intentionnelle, demeure. Aux yeux du phénoménologue, le comportement questionnant dans le domaine de la recherche théorique — le seul domaine qui nous intéresse ici — s’avère posséder une triple dimension intentionnelle.
En tant que comportement intentionnel d’un sujet, toute question est à la recherche de quelque chose, elle s’enquiert de (Fragen nach) quelque chose. Les questions ne tombent pas du ciel, elles sont motivées ou déclenchées par un questionné (Gefragtes) . D’autre part, la question porte sur quelque chose, un domaine qu’on interroge, (Befragtes : l’interrogé) auprès duquel on s’enquiert (Anfragen bei). Ainsi par exemple, une question de biologie s’enquiert auprès du vivant, afin d’y trouver une réponse. Enfin, ce n’est que par l’effectuation concrète du questionnement, par l’expérience vive de la question, que celle-ci se transforme pour atteindre son but, là où elle voulait en venir réellement, son intenté (Erfragtes : le demandé).