Fink (1990) – egoidade

(EPOKHE1990)

<181>Nous abordons l’explication de la structure du Moi de l’être-là humain — et ceci à vrai dire en relation avec la question conductrice de l’essence de l’ipséité (Selbstheit). Derechef l’ipséité est un problème, dès lors qu’elle représente un moment fondamental dans la tension de l’arc (Bogenspannung) de l’exister humain ; c’est en nous le moment qui s’oppose à la nature panique. Au cours de la métaphysique moderne l’ipséité prend la forme de l’aspect fondateur du «moi» ; l’Être est interprété comme «être-conscient». La métaphysique de la conscience n’a pas seulement des formes multiples de niveaux différents, commençant par la simple description de phénomènes psychiques, jusqu’aux thèses spéculatives de l’idéalisme allemand, elle s’accomplit également à différents degrés de réflexion, de quoi relèvent différentes interprétations de l’égoïté. Le Moi sera pris tantôt comme l’«absolu» lui-même, tantôt comme un être de chaque fois (Jeweiligkeit) fini, on l’oppose au «nous» ou on le comprend comme moment d’une intersubjectivité originelle. Pour tenter d’échapper à la question de savoir qui du «moi» ou du «nous» doit prévaloir, nous nous sommes rapporté au langage. Même la réflexion la plus solitaire est déjà dans l’élément de compréhension qu’est le langage, c’est une adresse à soi-même dans le dire du Moi (Ich-Sagen) ; le monologue est dès toujours dialogue d’une âme avec soi-même. Dans l’archi-phénomène (Urphänomen) du langage, pour peu qu’on ne le fausse pas par une interprétation instrumentale qui n’y verrait qu’un «moyen d’expression» humain, il s’y montre une dimension originelle précédant toutes les distinctions et divisions en «sujet» et «objet» ; la métaphysique de la conscience se trouve dès toujours sous le règne du langage, c’est en lui qu’elle opère ses distinctions conceptuelles, elle demeure dans l’espacé du langage lorsqu’elle institue le «Moi», le sujet, comme principe, comme «commencement» de son philosopher. <182> La vision suivant laquelle le langage constitue la présupposition fondamentale opératoire, même de la philosophie de la subjectivité la plus accomplie, à savoir que le langage est encore antérieur à tous les «commencements» posés, cette vision, Hegel l’a atteinte en passant de la «Phénoménologie de l’Esprit» à la «Science de la Logique». Sa «logique» n’est point l’instrument de l’homme, elle est la totalité de la pensée de l’être qui règne parmi le monde ; c’est la lumière de l’être, dans la clarté de quoi l’homme habite, ou, suivant les mots de Hegel : «La logique doit donc être prise comme le système de la raison pure, le royaume de la pure pensée. Ce royaume est la vérité, telle qu’elle est en soi et pour soi, sans masque. C’est pourquoi on peut dire que ce contenu est la représentation de Dieu, tel qu’il est en son essence éternelle avant la création de la nature et d’un esprit fini». Aussi longtemps qu’on ne croit devoir entendre dans ces mots qu’une pure hubris, comme une chimérique ressemblance malvenue de l’homme à Dieu, on ne comprend pas l’intention intime de l’œuvre. Le Dieu du monde est le Logos, il assujettit la Nature en la marquant et l’organisant — et il s’est voué à être le langage de l’esprit humain fini. Si l’on tente de comprendre comme égoïté la finitude de cet esprit fini, son individuation et son ipséité, l’interprétation du principe du Moi non seulement s’accomplit dans le langage, mais bien plus : le savoir que le Moi a de lui-même est par essence langagier, c’est un dire du moi. La dicibilité (Säglichkeit) est un moment constitutif de l’égoïté. Au demeurant on méconnaît souvent ce point.

Excertos de

Heidegger – Fenomenologia e Hermenêutica

Responsáveis: João e Murilo Cardoso de Castro

Twenty Twenty-Five

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