Heidegger, fenomenologia, hermenêutica, existência

Dasein descerra sua estrutura fundamental, ser-em-o-mundo, como uma clareira do AÍ, EM QUE coisas e outros comparecem, COM QUE são compreendidos, DE QUE são constituidos.

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Martineau: Gegenstand-Objekt

quarta-feira 27 de agosto de 2014

Extraits de l’Avertissement du Traducteur, du livre de Martin Heidegger, « Interprétation phénoménologique de la "Critique de la raison pure" »

IV — Il ne nous restera donc qu’à mentionner l’embarras classique créé par le doublet gegenstand  -objekt (l’un et l’autre mots très souvent associés, spécialement infra, pp. [64], [69], [99], [102], [137], [142-143], [145], [156-160], [177], [181], [190], [193], [199], [222], [241], [288], [299], [310-312], [314], [319-321], [327-330], [333], [339-340], [371], [383], [401], [427]), et à avouer que, là où mainte traduction de la « Critique » passe complètement sous silence cette différence, quitte à noter « Objekt » de temps en temps entre parenthèses, nous avons recouru aux deux graphies « objet » et « ob-jet ». Lâche expédient, qu’on aurait certes écarté si l’identification pure et simple des deux mots avait semblé possible. Mais trop nombreux étaient les textes (on vient d’en indiquer la liste) qui, pour le dire prudemment, faisaient sonner les deux termes en contraste, ou redoublaient (dans quelle intention  , s’il ne s’agissait pas d’une redondance?) le premier par le second. Plus lâche encore, insistera-t-on, si un simple tiret est chargé, en ce cas, d’exprimer une différence de sens. Mais, pour malheur, il s’en faut justement que, lisant et méditant les emplois cités, l’on parvienne à établir entre cet « objet » et cet « ob jet » une claire différence de cette sorte! Ajoutons que Heidegger, souvent consulté par Jean Beaufret   sur ces problèmes, se prononçait oralement pour l’égalité du terme allemand et du terme latin, ce que confirme d’ailleurs tel emploi écrit de l’expression «ob-jet ou objet» (’Objekt oder Gegenstand) dans La Thèse de Kant  …" Nous voilà donc ici dans une impasse, dont un seul texte, à notre connaissance, peut nous aider à sortir, au moins partiellement. Nous songeons à ce passage de ses notes de 1964 sur « le problème d’une pensée et d’un langage non-ob-jectivant dans la théologie d’aujourd’hui » où Heidegger atténue ainsi la synonymie:

« En conséquence de la transformation par Descartes   du concept de subjectum (Chemins, trad. revue déjà citée, pp. 137 sq.), le concept d’objectum. d’ob jet change également de signification. Pour Kant, objet signifie: l’objet existant [= sous-la-main] (der existierende Gegenstand) de l’expérience dans les sciences de la nature. Tout ob-jet est un objet, mais tout objet (par exemple la chose en soi) n’est pas un ob jet possible. L’impératif catégorique, le devoir moral  , l’obligation ne sont pas des ob jets de l’expérience propre aux sciences de la nature. Si on réfléchit à eux. si on les vise en agissant, on ne les objective pas de ce fait ».

Mais ce texte, du fait même qu’il nous ramène à la Vorhandenheit  , à l’être-sous-la-main (c’est bien elle que nomme ici le verbe existieren, employé au sens de l’exister selon l’attitude naturelle décrite par Husserl  ), creuse justement entre ob-jet et objet, si l’on y prend garde, une différence qui est beaucoup moins sémantique que « topique ». Oui, il existe une nuance entre les deux termes, non, cette nuance n’est pas exactement de sens, elle ne passe pas entre deux sens d’être, mais plutôt, dans la langue d’Etre et Temps, entre deux « modes d’être » (Seinsarten), plus précisément encore entre deux sous-modes d’être du mode essentiel qu’est la Vorhandenheit; l’objet, c’est la chose telle que représentée (posée devant) — ce que la chose en soi (objet plutôt qu’ob-jet transcendantal) est éminemment, en dépit d’un préjugé invétéré maintes fois dénoncé (notamment à Cerisy, en 1955) par Heidegger; l’ob-jet, c’est la chose telle que, en sus du fait qu’elle est représentée, elle « peut », à l’occasion de l’expérience non encore pensée elle-même en sa possibilisation, venir à ma rencontre, cette rencontre, au niveau du simple terme d’ob-jet, n’ayant précisément pas d’autre sens que celui d’un événement possible. Telle est la différence qu’illustre peut-être de manière exemplaire ce passage de B 873, A 845 cité par deux fois dans ce cours (Infra, pp. [64] et [199]):

« La philosophie   transcendantale ne considère que l’entendement et la raison même dans un système de tous les concepts et de tous les principes qui se rapportent à des objets (Gegenstände) en général, sans admettre d’ob-jets (Objekte) qui seraient donnés (ontologia) ».

C’était notre devoir d’insister sur cette citation, et de produire celle de 1964 — ce l’est aussi de maintenir le « peut-être » qui vient d’être prononcé: ce dont il y va n’est ni de le dissiper, ni même de « préciser » la nuance entre objet et ob-jet, mais, exclusivement, d’ouvrir une question de l’objet dont ce n’est pas le moindre apport de ce cours que de l’élaborer aussi finement et diversement que celle du temps, c’est-à-dire d’en laisser longtemps résonner tous les harmoniques littéraires et doctrinaux. C’est pourquoi nos remarques techniques peuvent ici s’interrompre. Que l’on veuille bien, enfin, en excuser le caractère fruste, inchoatif. Les développer davantage exigerait de lancer cette « attaque » dont parle le Kant de 1929:

« La construction fondamental-ontologique a ceci d’insigne qu’elle doit libérer la possibilité interne de quelque chose qui régit et transit tout Dasein   en prenant la forme de ce qui est le mieux connu du monde, mais qui n’en reste pas moins indéterminé et même ne va que trop de soi. Cette construction peut être comprise comme l’attaque (Angriff), née dans le Dasein lui-même et lancée contre le fait métaphysique originaire qui est en lui, lequel fait consiste en ceci que le plus fini de sa finitude, tout bien connu qu’il est, n’en reste pas moins incompris »

et dont l’initiative appartient donc au Dasein, s’il en est, du lecteur. «Attaque », encore un mot qui sonne   barbare, comme la «tempête » (Sturm) du Discours de Rectorat. Mais on verra par ce livre que le contraire est le vrai, et son traducteur aura tenu son rôle si, joignant ses efforts à ceux de l’éditrice, il a contribué, à son niveau, à suggérer justement que,

« par opposition à la barbarie qui aujourd’hui ne cesse de s’étendre, (…) étudier Kant signifie en même temps lutter pour la propreté intérieure du travail scientifique » (infra, p. [387]).


Ver online : Emmanuel Martineau