Wirklichkeit [GA7 55] Realität, Sachheit [SZ] realidade [GA7 43]
Wirklichkeit
[…] La “réalité” pensée d’une manière suffisamment large, veut dire alors: être là devant nous, avoir été pro-duit dans la présence en elle-même achevée de ce qui se pro-duit. […] [GA7 54]
Le terme aristotélicien fondamental pour la présence, energeia, n’est traduit correctement par notre mot Wirklichkeit (réalité) que si, de notre côté, nous pensons wirken (oeuvrer) à la grecque, au sens de : amener – dans le non-caché, pro-duire – dans la présence [GA5er ‑ ins Unverborgene, vor – ins Anwesen bringen. D’où le verbe hervorbringen, « pro-duire ». Cf. pp. 17 et 190]. […] [GA7 55]
Realität
On répond : les choses. Mais il se pourrait que cette réponse si évidente menace déjà de nous faire manquer le sol préphénoménal que nous cherchons. En effet, l’advocation de l’étant comme « chose » (res) suppose déjà une caractérisation ontologique anticipée et [68] implicite. L’analyse qui, partant d’un tel étant, pousse jusqu’à son être rencontre les concepts de choséité [Dinglichkeit] et de réalité, puis l’explication ontologique de celles-ci s’achemine jusqu’à des caractères d’être comme la substantialité, la matérialité, l’extension, la juxtaposition… Mais l’étant tel qu’il fait encontre dans la préoccupation [Besorgen] demeure de prime abord en retrait, même préontologiquement, sous cette figure d’être [NT: La phrase est assez resserrée. Comprenons : même omis cette figure « évidente » de l’être qu’est la choséité [Dinglichkeit], l’étant tel qu’il est accessible à la préoccupation [Besorgen] refuse de se manifester comme ce qu’il est : il échappe à la choséité [Dinglichkeit].]. En appelant les choses de l’étant « de prime abord donné », on se méprend ontologiquement, même si ontiquement on a autre chose à l’esprit. Ce que l’on vise proprement demeure indéterminé. Ou alors l’on caractérisera ces « choses » comme des choses « douées de valeur ». Mais que veut dire ontologiquement « valeur » ? Comment faut-il saisir catégorialement cette « dotation » et le fait d’en être doué ? Abstraction faite de l’obscurité de cette structure de la « valeur », le caractère phénoménal d’être de ce qui fait encontre dans l’usage préoccupé est-il par là atteint ? [EtreTemps15]
Sachheit
Le titre de phénoménologie présente donc un sens autre que les désignations comme théologie, etc. Celles-ci nomment les objets de la science considérée selon leur teneur réale propre. Mais « phénoménologie » ne nomme point l’objet de ses recherches, ni ne caractérise leur teneur réale. Le mot ne révèle que le comment de la mise en lumière et du mode de traitement de ce qui doit être traité dans cette science. Science « des » phénomènes veut dire : [35] une saisie telle de ses objets que tout ce qui est soumis à élucidation à leur propos doit nécessairement être traité dans une mise en lumière et une légitimation directes. L’expression tautologique de « phénoménologie descriptive » n’a pas au fond d’autre sens. Description ne signifie pas ici un procédé comparable — par exemple — à celui de la morphologie botanique ; bien plutôt ce titre a-t-il à nouveau un sens prohibitif : tenir éloignée toute détermination non légitimatrice. Quant au caractère de la description elle-même, c’est-à-dire au sens spécifique du logos, il ne peut être fixé qu’à partir de la « réalité » de ce qui doit être « décrit », c’est-à-dire porté à une déterminité [Bestimmtheit] scientifique conforme au mode d’encontre de phénomènes. Formellement, la signification du concept formel et vulgaire de phénomène autorise à appeler phénoménologie toute mise en lumière de l’étant tel qu’il se montre en lui-même. [EtreTemps7]