vereinzeln, isolieren [SZ]
vereinzeln
L’angoisse n’est pas seulement angoisse devant…, mais, en tant qu’affection, angoisse en-vue-de [NT: Angst um… Sur la préposition um, même remarque que supra, p. [141] et N.d.T.]… Ce en-vue-de, ce pour-quoi l’angoisse s’angoisse n’est pas un mode d’être déterminé, une possibilité déterminée du Dasein. Car la menace, étant elle-même indéterminée, ne peut donc pas percer — en le menaçant — jusqu’à tel ou tel pouvoir-être facticement concret. Ce pour-quoi l’angoisse s’angoisse est l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] lui-même. Dans l’angoisse, l’à-portée-de-la-main intramondain, et en général l’étant intramondain, sombre. Le « monde » ne peut plus rien offrir, et tout aussi peu l’être-Là-avec [Mitdasein] d’autrui. L’angoisse ôte ainsi au Dasein la possibilité de se comprendre de manière échéante à partir du « monde » et de l’être-explicité public. Elle rejette le Dasein vers ce pour-quoi il s’angoisse, vers son pouvoir-être-au-monde [In-der-Welt-sein] authentique. L’angoisse isole le Dasein vers son être-au-monde [In-der-Welt-sein] le plus propre, qui, en tant que compréhensif, se projette essentiellement vers des possibilités. Par [188] suite, avec le pour-quoi [en-vue-de-quoi] du s’angoisser, l’angoisse ouvre le Dasein comme être-possible, plus précisément comme ce qu’il ne peut être qu’à partir de lui-même, seul, dans l’isolement.
L’angoisse manifeste dans le Dasein l’être-pour le pouvoir-être le plus propre, c’est-à-dire l’être-libre pour la liberté du se-choisir-et-se-saisir-soi-même. L’angoisse place le Dasein devant son être-libre-pour (propensio in…) l’authenticité de son être en tant que possibilité qu’il est toujours déjà. Or c’est en même temps à cet être que le Dasein comme être-au-monde [In-der-Welt-sein] est remis.
Ce pour-quoi [en-vue-de-quoi] l’angoisse s’angoisse se dévoile comme ce devant-quoi elle s’angoisse : l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. L’identité du devant-quoi de l’angoisse et de son pour-quoi s’étend même jusqu’au s’angoisser lui-même. Car celui-ci est en tant qu’affection un mode fondamental de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein]. L’identité existentiale de l’ouvrir avec l’ouvert, identité telle qu’en cet ouvert le monde est ouvert comme monde, l’être-à comme pouvoir-être isolé, pur, jeté, atteste qu’avec le phénomène de l’angoisse c’est une affection insigne qui est devenue le thème de l’interprétation. L’angoisse isole et ouvre ainsi le Dasein comme « solus ipse ». Ce « solipsisme » existential, pourtant, transporte si peu une chose-sujet isolée dans le vide indifférent d’une survenance sans-monde qu’il place au contraire le Dasein, en un sens extrême, devant son monde comme monde, et, du même coup, lui-même devant soi-même comme être-au-monde [In-der-Welt-sein]. [EtreTemps40]
isolieren
L’être n’étant jamais saisissable que du point de vue du temps, la réponse à la question de l’être ne peut se résumer à une proposition isolée et aveugle. La réponse ne saurait être comprise si l’on se borne à répéter ce qu’elle énonce propositionnellement, et surtout pas si cet énoncé est traité en simple résultat et transmis pour information comme témoignage d’un « point de vue » peut-être aberrant par rapport à la manière traditionnelle de s’y prendre. Que la réponse soit « nouvelle », cela n’a aucune importance et demeure extérieur. Si elle doit contenir quelque chose de positif, ce ne peut être qu’en étant au contraire assez ancienne pour nous apprendre à concevoir les possibilités ouvertes par les « Anciens ». La réponse, selon sa signification la plus propre, donne une consigne à la recherche ontologique concrète, celle de redonner son élan au questionnement philosophique au sein de l’horizon par elle libéré — et elle donne seulement cela. [EtreTemps5]