incapacité de séjourner

Unverweilen [SZ]

Mais si la curiosité libérée se préoccupe de voir, ce n’est pas pour comprendre ce qui est vu, c’est-à-dire pour accéder à un être pour lui, mais seulement pour voir. Elle ne cherche le nouveau que pour sauter à nouveau de ce nouveau vers du nouveau. Ce dont il y va pour le souci d’un tel voir, ce n’est pas de saisir et d’être dans la vérité en sachant, mais de possibilités de s’abandonner au monde. Aussi la curiosité est-elle caractérisée par une incapacité spécifique de séjourner auprès du plus proche. Aussi bien ne recherche-t-elle pas non plus le loisir du séjour considératif, mais l’inquiétude et l’excitation que donne le toujours nouveau et le changement incessant d’objet rencontré. En son non-séjour, la curiosité se préoccupe de la constante possibilité de la distraction. La curiosité n’a rien à voir avec la contemplation admirative de l’étant, avec le thaumazein, ce qui lui importe n’est point d’être frappée d’incompréhension par la stupeur, mais elle se préoccupe d’un savoir simplement pour avoir su. Les deux moments constitutifs de la curiosité : l’incapacité de séjourner dans le monde de la préoccupation [Besorgen] et la distraction vers de nouvelles possibilités, fondent le troisième [173] caractère d’essence de ce phénomène, ce que nous appelons l’agitation. La curiosité est partout et nulle part. Ce mode de l’être-au-monde [In-der-Welt-sein] dévoile un nouveau mode d’être du Dasein quotidien [alltäglich], où celui-ci ne cesse de se déraciner. [EtreTemps36]