co-destin

Lorsque le Dasein, en devançant, laisse la mort prendre pouvoir sur soi, il se comprend, libre pour elle, dans la sur-puissance propre de sa liberté finie, afin d’assumer en celle-ci, qui n’« est » jamais que dans l’avoir-choisi du choix, l’im-puissance de son abandon à lui-même, et de devenir clairvoyant pour les contingences de la situation ouverte. Mais si le Dasein destinal comme être-au-monde [In-der-Welt-sein] existe essentiellement dans l’être-avec [Mitsein] avec autrui, son provenir est un co-provenir, il est déterminé comme co-destin, terme par lequel nous désignons le provenir de la communauté, du peuple. Le co-destin ne se compose pas de destins individuels, pas plus que l’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] ne peut être conçu comme une co-survenance de plusieurs sujets [NA: Cf. supra, §26 [EtreTemps26], p. [117] sq.]. Dans l’être-l’un-avec-l’autre [Miteinandersein] dans le même monde et dans la résolution pour des possibilités déterminées, les destins sont d’entrée de jeu déjà guidés. C’est dans la communication qui partage et dans le combat que se libère la puissance du co-destin. [385] Le co-destin destinal du Dasein dans et avec sa « génération » [NA: Sur le concept de « génération », cf. W. DILTHEY, « Ueber das Studium der Geschichte der Wissenschaften vom Menschen, der Gesellschaft und dem Staat » (NT: « Sur l’étude de l’histoire des sciences de l’homme, de la société et de l’État »), dans ses Ges. Schriften, t. V, 1924, p. 36-41.] constitue le provenir plein, authentique du Dasein. EtreTemps74

L’auto-délivrance devançante, contenue dans la résolution, au Là de l’instant, nous la nommons le destin. En lui se fonde conjointement le co-destin, terme par lequel nous entendons le provenir du Dasein dans son être-avec [Mitsein] avec autrui. Le co-destin destinal peut, dans la répétition, être expressément ouvert quant à son attachement à l’héritage transmis. C’est la répétition qui seule rend sa propre histoire manifeste au Dasein. Le provenir lui-même et l’ouverture qui lui appartient, ou encore son appropriation, se fondent existentialement dans le fait que le Dasein comme temporel est ekstatiquement ouvert. EtreTemps74

Mais qu’est-ce que cela veut dire : le Dasein est « factuel » ? Si le Dasein n’est « à proprement parler » effectif que dans l’existence, alors sa « factualité » se constitue justement dans le se-projeter résolu vers un pouvoir-être choisi. Par suite, ce qui a à proprement parler été-Là « en fait », c’est la possibilité existentielle en laquelle se déterminèrent facticement un destin, un co-destin et une histoire du monde. L’existence n’étant jamais que comme facticement jetée, l’enquête historique ouvrira de manière d’autant plus pénétrante la force tranquille du possible qu’elle comprendra plus simplement et concrètement l’être-été-au-monde à partir de sa possibilité et se « bornera » à le présenter comme tel. EtreTemps76