comput du temps

L’interprétation temporelle de la quotidienneté (Alltäglichkeit) et de l’historialité fixe suffisamment le (333) regard sur le temps originaire pour mettre celui-ci même à découvert comme la condition de possibilité et de nécessité de l’expérience quotidienne (alltäglich) du temps. Le Dasein, en tant qu’étant pour lequel il y va de son être, s’emploie, expressément ou non, primairement pour lui-même. De prime abord et le plus souvent, le souci est préoccupation (Besorgen) circon-specte. S’employant en-vue-de lui-même, le Dasein se « consomme ». Se consommant, le Dasein use de lui-même, c’est-à-dire de son temps. Usant du temps, il compte avec lui. La préoccupation (Besorgen) circon-spectivement calculante découvre de prime abord le temps et conduit à la formation d’un comput du temps. Le compte avec le temps est constitutif de l’être-au-monde (In-der-Welt-sein). La découverte préoccupée de la circon-spection laisse, en comptant avec son temps, l’à-portée-de-la-main et le sous-la-main découvert faire encontre (begegnen) dans le temps. L’étant intramondain devient ainsi accessible comme « étant dans le temps ». La déterminité (Bestimmtheit) temporelle de l’étant intramondain, nous l’appelons l’intratemporalité. Le « temps » d’abord trouvé ontiquement en elle devient la base de la formation du concept vulgaire et traditionnel du temps. Cependant, le temps comme intratemporalité provient d’un mode essentiel de temporalisation de la temporalité originaire. Cette origine indique que le temps « où » le sous-la-main naît et passe est un phénomène temporel véritable et non pas l’extériorisation d’un « temps qualitatif » en espace, ainsi que veut nous le faire croire l’interprétation totalement indéterminée et insuffisante ontologiquement du temps par Bergson. EtreTemps66

Ce qu’il y a de décisif au point de vue ontologico-existential dans le compte ou le comput du temps ne doit donc pas être aperçu dans la quantification du temps, mais être conçu plus originairement à partir de la temporalité du Dasein comptant avec le temps. EtreTemps80

Dans l’ouverture de l’horloge naturelle qui appartient au Dasein existant comme jeté-échéant est en même temps contenue une publication privilégiée, à chaque fois déjà accomplie par le Dasein factice, du temps de la préoccupation (Besorgen), qui s’accentue et se consolide encore davantage dans le perfectionnement du comput du temps et l’affinement de l’usage des horloges. Nous n’avons pas à retracer ici historiquement, dans ses modifications possibles, l’évolution historiale du comput du temps et de l’usage de l’horloge. Posons plutôt la question ontologico-existentiale suivante : quel mode de temporalisation de la temporalité du Dasein se manifeste-t-il dans la direction suivie par la formation de ce comput et de cet usage ? De la réponse à cette question doit se dégager une compréhension plus originaire du fait que la mesure du temps, c’est-à-dire en même temps la publication expresse du temps dont on se préoccupe, se fonde dans la temporalité du Dasein, plus précisément dans une temporalisation tout à fait déterminée de celle-ci. EtreTemps80

Parce que la temporalité de l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) factice possibilise originairement l’ouverture de l’espace, et que le Dasein spatial s’est à chaque fois assigné un « ici » à sa mesure à partir d’un « là-bas » découvert, le temps dont le Dasein se préoccupe en sa temporalité est à chaque fois lié, du point de vue de sa databilité, à un lieu du Dasein. Non que le temps soit rattaché à un lieu : bien plutôt la temporalité est-elle la condition de possibilité qui permet que la datation puisse se lier au spatio-local, et cela de telle sorte que celui-ci soit obligeant, à titre de mesure, pour tout un chacun. Loin que le temps soit après coup accouplé à l’espace, cet « espace » soi disant accouplable à lui ne fait encontre que sur la base de la temporalité préoccupée du temps. Conformément à la fondation de l’horloge et du comput du temps dans la temporalité du Dasein qui constitue cet étant comme historial, il est possible de montrer dans quelle mesure l’usage des horloges est lui-même ontologiquement historial, et comment toute l’horloge « a » comme telle une « histoire » (NA: Nous ne pouvons ici nous engager dans le problème de la mesure du temps en théorie de la relativité. L’éclaircissement des fondements ontologiques de cette mesure présuppose déjà une clarification du temps du monde et de l’intratemporalité à partir de la temporalité du Dasein, et tout aussi bien la mise au jour de la constitution temporalo-existentiale de la découverte de la nature et du sens temporel de la mesure en général. Une axiomatique de la technique physique de la mesure repose sur ces recherches, et elle est par elle-même incapable de déployer le problème du temps comme tel.). EtreTemps80