Schuld

Schuld, dette, faute, dívida, culpa, deuda, guilt, debt, obligation

Nous avons rencontré le mot Schuld une première fois à l’alinéa 5 du §48, page (242), et ce dans une acception dont le contexte ne présentait aucune difficulté à ce que ce mot soit traduit par son premier sens courant, à savoir dette. Le §58 qui suit va nous engager dans une épreuve linguistique très difficile à suivre (épreuve que j’ai tenté de préparer au mieux en traduisant comme je l’ai fait das Gewissen par conscience d’obligation) dans la mesure où Heidegger va jouer sur tout l’éventail que lui permet la polysémie du substantif allemand Schuld, lequel signifie dette, mais également faute, culpabilité et responsabilité, épreuve linguistique qui se reportera sur l’adjectif correspondant, schuldig. L’éventail de significations va donc aller de la notion de dette (mais être l’obligé de quelqu’un, n’est-ce pas avoir contracté une dette à son égard), jusqu’à celle de faute et de culpabilité, en passant par les stades intermédiaires de redevable, d’obligé, d’obligation, tout cela sans possibilité de trouver un dénominateur commun vraiment satisfaisant. E. Martineau choisit de tout faire reposer sur le mot dette, ce qui obscurcit de nombreux passages. F. Vezin, quant à lui, campe sur le mot faute, lequel pourrait être plus prometteur (en dépit de ses relents peccamineux), mais il ne joue pas (sauf dans sa note concernant la page (283), note que l’on ne peut qu’approuver), ce qui serait envisageable, mais difficile, sur les deux sens du mot (d’une certaine façon, contracter une obligation, c’est, au départ, manquer de quelque chose, devenir redevable de quelque chose, être obligé, avoir un passif, et c’est, potentiellement aussi, manquer à ses obligations, donc se mettre en faute). Dans la mesure du possible, j’essaierai de suivre, à partir du contexte, le registre d’orgues qu’utilise Heidegger. En l’occurrence, à cet endroit, s’agissant de la structure chapeau, donc de l’existential, je traduis, et ce conformément à la note , alinéa 8 du §54, page (269), Schuld par obligation, et cela en n’oubliant pas ce sur quoi j’ai déjà insisté, à savoir que s’obliger, c’est, quelque part, manquer de quelque chose. (Auxenfants; ETJA:§58)


Le lecteur l’aura remarqué, ce paragraphe, outre les difficultés de traduction qu’il pose, est très difficile à suivre, pour ne pas dire à expérimenter, en raison essentiellement du sens profond qu’il faut donner, en français, à la traduction chapeau du mot Schuld, en tant qu’existential, en dehors de toute présupposition d’ordre moral. Outre cela, mon impression personnelle, toute révérence gardée, est que Heidegger-Cyrano, dans sa montée vers la lune qu’est pour l’instant le sens de l’Être du Dasein, ne cesse de s’éloigner de sa condition de possibilité originelle et, ne voulant s’appuyer sur rien « d’extérieur », pose brique sur brique suspendues dans le vide. Dans ces conditions, le paragraphe qui suit va-t-il permettre d’ouvrir un passage menant d’une telle ontologie vers l’éthique ? Jusqu’à quel point résistera « l’alibi de l’orientation purement ontologique de l’analytique existentiale ? » Sur les problèmes que pose la conscience d’obligation (ou morale) chez Heidegger, on pourra s’aider des pages qu’y consacre Paul Ricœur dans ‘Soi-même comme un autre’ (pages 393-409). (ibid.)


VIDE: (SCHULD E DERIVADOS->http://hyperlexikon.hyperlogos.info/modules/lexikon/search.php?option=1&term=schuld)

débito (STMSCC)
faute et dette (GA7 13)
dette (ETEM)
guilt (BTJS)

VIDE sollen

NT: A tradução se decidiu por “débito” em razão de seu sentido primitivo e por apresentar o maior espectro semântico do radical. Porque um dos integrantes desse espectro é a culpa, traduziu-se Schuld, em seu sentido derivado, por culpa. Cf. p. 69s e 75. O sentido originário de Schuld usado por Heidegger explica claramente no texto em que medida é justificada a tradução desse termo por débito. (STMSCC)


NT: Schuld (techn.) : dette. — Cf. 281, et N.d.T. Voir notamment les expressions distinguées en 281 sq.: Schulden haben, avoir des dettes, schuld sein an : être responsable, sich schuldig machen : se mettre en-dette. (ETEM)


NT: Guilt, guilty (Schuld, schuldig), 242, 269-270, 279, 280-289 (§ 58), 290-293, 295-297, 301, 305-307, 306 n. 2, 311, 317, 325, 372, 382, 385, 400; translator’s note, 269 n.4. See also Conscience; Resoluteness (BTJS)


Schuld (die), Schuldigsein (das), schuldig sein: «culpa», «ser culpable» (el), «ser culpable». El término aparece brevemente a finales de 1924 y en las lecciones del semestre de verano de 1925 para indicar como el Dasein deviene culpable por no haber decidido y como un modo por el que el Dasein se hace responsable de su propio pasado. El término adquiere su sentido pleno de contenido de la llamada de la conciencia en Ser y Tiempo. En los parágrafos dedicados a la conciencia (Gewissen), donde se atestigua la posibilidad de un poder-ser propio y resuelto del Dasein, se muestra como éste remonta su condición de caído en la impropiedad por medio de una elección que se manifiesta a través de la conciencia. La conciencia contempla tres momentos: la llamada de la conciencia (Gewissensruf), la culpa (Schuld) y la resolución (Entschlossenheit). 1) La llamada (Ruf) de la conciencia invita al Dasein a volver sobre sí mismo; una llamada que habla en la forma del silencio desde la inhospitabilidad (Unheimlichkeit) del arrojamiento (Geworfenheit) al mundo. 2) Pero la llamada no dice en rigor nada, tan solo remite en su silencio a una culpa (Schuld). La voz de la conciencia anuncia una culpabilidad originaria del Dasein: la condición de arrojado que se presenta como fundamento de su propia negatividad. El ser-culpable (das Schuldigsein) remite a cada uno de los tres aspectos del cuidado (Sorge) en la forma de una triple negatividad: a) el Dasein no es dueno de su facticidad, es decir, él no se ha puesto a sí mismo en el ahí; b) el Dasein no es dueno de su existencia, a saber, su capacidad de proyección es, en cuanto arrojada, esencialmente negativa; c) el Dasein no es inmediatamente él mismo, sino que vive por lo pronto en la caída del mundo público. 3) Finalmente, la respuesta del Dasein a la llamada de la conciencia se expresa en el querer-tener-conciencia, en la resolución que muestra el Dasein por salir de la dictadura del uno. De esta manera, el estado de abierto (Erschlossenheit) se convierte en estado de resolución (Entschlossenheit). Véanse también las entradas Entschlossenheit (die), entschlossen sein, entschlossen y Gewissen (das). (GA20, pp. 440-442; Ph&Th, p. 64; SZ, pp. 280-289 (conciencia moral), 306 (existencia (im)propia)) (LHDF)


Schuld (guilt, debit of existence) – The term first appears briefly in November 1924 in the unmasking quality of resoluteness through “becoming guilty in not having chosen” and as the way of becoming (responsible for) one’s own past. GA20 explicates the phenomenon a bit further, but only in BT is the term first thematized as the “content” of the call of conscience and as the debit already intrinsic to existence. (Kisiel)


Ce paragraphe extrêmement difficile forme le véritable centre de gravité de l’analyse heideggérienne du phénomène de la conscience. D’emblée, le texte nous confronte à un très délicat problème de traduction qui engage toute l’interprétation : comment traduire le terme Schuld qui apparaît dans le titre du paragraphe et autour duquel se noue toute l’analyse ? Vezin traduit par « faute », Martineau par « dette ». S’il fallait se laisser guider par l’interprétation naturelle de la voix de la conscience évoquée à l’instant (la voix intérieure qui nous déclare coupable — mauvaise conscience — ou qui nous « disculpe » — bonne conscience) nous pourrions également envisager la traduction par « culpabilité ». Même si elle ne paraît pas s’imposer, nous adopterons la traduction de Martineau, à charge de trouver dans l’analyse heideggérienne elle-même les raisons qui plaident en faveur du terme de « dette ». (OTGreisch)


1. ‘…das im Gewissen gerufeneschuldigexistenzial zu begreifen.’ As Heidegger will point out, the words ‘schuldig’, ‘Schuld’ and their derivatives have many different meanings, corresponding not only to ‘indebtedness’, as we have seen on H. 242 above, but also to ‘guilt’ and ‘responsibility’. In the present chapter we shall translate them by ‘guilty’ and ‘guilt’ whenever possible, even though these expressions will not always be entirely appropriate. (BTMR:325)